Chapitre 2

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Je ne faisais plus attention à ce qui m'entourait, la douleur étant trop présente. Je n'arrivais plus à me libérer de mes pensées qui tournaient autour de l'incident qui venait de se produire. J'éprouvai de la colère contre eux et j'aurais voulu me venger mais ça aurait été inutile, le mal était déjà fait. Je ne voulais pas l'admettre mais j'étais très sensible aux moqueries, je ne pouvais les supporter. Elles n'étaient pas quotidiennes, loin de là, mais quand je les écoutais, c'était comme si je chutais d'une hauteur de 20 mètres.

Mes amies discutaient entre elles, j'étais incapable de me joindre à elles. Elles n'ont, heureusement, pas remarqué que j'avais pleuré. Feindre était l'un de mes rares points forts. Je portai à ma bouche une boulette de viande de la cantine. C'était à peine comestible...Je jugeai que c'était mieux de stopper la dégustation si je ne voulais pas avoir une intoxication alimentaire. De toute façon, j'avais perdu l'appétit. Mon cerveau était complètement embrouillé. Les autres ne m'apparaissaient que comme des silhouettes, les arbres devenaient mous et le sol mouvant. Tout s'évaporait petit à petit. Le vacarme incessant de la cantine disparut. Il n'y avait plus que le calme et cela me faisait un bien fou. Je m'efforçai de songer à autre chose, je m'imaginai alors avec un joli visage et un corps bien fait. Je vis le regard que les autres portait sur moi, intéressé quelquefois, mais surtout normal, simple. Pas ce regard méprisant et supérieur dont j'avais droit d'habitude. Pourquoi le monde était-il aussi superficiel ? Notre apparence n'était qu'une couverture qui enveloppait notre âme et rien d'autre. Elle pouvait évidemment, inciter les autres à être captivé mais en aucun cas elle ne devait les repousser. Pourquoi une seconde chance n'était-elle pas accordée, dans cette situation ? Dès qu'on nous collait une étiquette, nos efforts étaient réduits à néant. Que tu sois souriante ou non, lorsque tu étais décrite comme « insignifiante et laide », les filles, les garçons, sans même t'avoir adressé la parole, ne s'approchaient plus de toi. Ce monde était conçu ainsi et il était souvent détestable. Les adolescents autour de moi étaient truqués et artificiels, ils avaient tous la même mentalité. Malgré leurs tentatives de paraître original, ils restaient de vulgaires clones, trop effrayés à l'idée d'être exclu. Ce qui était scandaleux aussi, c'était moi, moi qui les critiquait et les vomissait alors que j'étais leur semblable. Oui, de nous tous dans cette cantine, celle qui devait être exécrée était ma petite personne. J'étais celle qui était la plus effrayée de l'exclusion et de la solitude car j'étais timide de nature. J'avais été si pitoyable, si pathétique lorsque je pleurais tous les soirs, en sixième, quand...


« Vous savez que Daniel m'a proposé de sortir avec lui ? S'exclama Hasna, buvant son verre.

-Quoi ? SERIEUX ?! Crièrent ma bande en chœur. » 

Plusieurs têtes se retournèrent, les foudroyant du regard.

« Oui, ça m'a beaucoup étonné. Je n'aurais jamais pensé que je pouvais lui plaire. Je m'étais toujours mise en tête que je n'étais pas attirante...

-Mais qu'est-ce que tu racontes Hasna ? Tu es absolument magnifique !»

Jade avait raison. Avec ses longs cheveux noirs et sa peau hâlée, Hasna était divine. Qu'est-ce qui clochait chez elle pour qu'elle se dise qu'elle était moche ? C'était une chose qui m'échappait.

« Et donc ?

-Quoi Aminata ?

- Fais pas semblant d'être innocente. As-tu accepté ?

-Euh...oui. Franchement il est super gentil, adorable, drôle et...beau, répondit-elle en rougissant. Je ne vois pas pourquoi j'aurais refusé, ç'aurait été méchant de ma part.

La dame de CoeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant