J'ai croisé un ancien ami de mon adolescence, hier. Sa barbe avait poussée, ses épaules avaient changées. Il paraissait moins blond qu'avant et peut-être un peu plus grand.
Je lui ai demandé si on pouvait aller prendre un café, un de ces quatre. Il a dit qu'il n'était que de passage, qu'il partirait demain dans la matinée. Que s'il fallait se voir, c'était à ce moment-là et c'était tout.
Alors il a sucré son thé parce qu'il ne tolère plus le café. Et moi j'ai joué avec ma cuillère dans le noir de mon café en lui parlant de ce que je faisais de bon, avec quoi j'payais mon loyer. Il m'a raconté qu'il travaillait un peu partout, de droite à gauche, dans tous les coins du pays. Parce qu'il est camionneur. Il a dit qu'il aimait bien son boulot parce que, maintenant, il savait toutes les routes par coeur et que ça lui laissait le temps d'écouter d'la bonne musique et de chanter à tue-tête.
Et là il a souri et j'ai reconnu ses dents un peu croches et ses fossettes cachées sous sa barbe. Et j'ai revu sa cicatrice, entre ses deux sourcils et ses mains minces, ses doigts fins. Je lui ai demandé s'il se souvenait de nos soirées dans son sous-sol à écouter du Modest Mouse en fumant des clopes. De nos party d'Halloween à écouter Harry Potter à 2h du matin pendant que la plupart des ados se baignaient nus dans une piscine.
-C'était les meilleures années de ma vie, il a dit.
Et je l'ai regardé partir avec sa même démarche d'il y a 11 ans, ses cheveux un peu trop longs et son manteau de cuir troué. Son allure morne et ses traits fâchés. Je me suis sentie tellement jeune encore en regardant le numéro de téléphone qu'il m'avait laissé sur la main. Et je me suis dit qu'au fond, on avait pas si changé.
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c'est ça
Short Storyun recueil, un amas, une agglomération, une poubelle, bref, tout ce que tu voudras. c'est ça *** pour les images: elles se retrouvent toutes sur 'we heart it', elles ne m'appartiennent pas ***