Elle avait cette façon de parler, avec cette voix délicate et ces mots si justes. Des mots qui blessaient parfois, mais le genre de blessures qui nous font du bien par après. J'sais pas, y'avait quelque chose chez elle qui me rendait insécure. J'voulais tout savoir d'elle, l'apprendre par coeur.
Pourtant, j'pouvais pas. Jamais je n'aurais pu la connaître sur le moment, tout d'un coup. Et pourtant c'est ce que je voulais, je la voulais tout de suite et en entier. Je voulais tout prédire d'avance, je voulais que tout ce que je nous imaginais faire ensemble se réalise pour vrai et que tout soit comme je l'aurais souhaité, peut-être même mieux encore.
Enfin, c'est clair que je divaguais. Elle avait à peine 17 ans et moi j'approchais mes 32. J'aurais pu la connaître de tous les moyens possibles, sauf physiquement. Jamais je n'aurais pu la toucher, l'embrasser ou la flatter. Jamais je n'aurais pu la déposer dans mon grand lit ou dans un bain bouillant avec des odeurs à nous en faire perdre la tête. Et pourtant, quand elle est venue chez moi, qu'elle a enlevé ses souliers et attaché ses longs cheveux. Quand elle s'est accotée contre le mur du salon et qu'elle sirotait son verre de lait, quand le vent froid qui passait par ma fenêtre entrouverte lui a caressé les joues et balayé ses cheveux... Je crois qu'à ce moment-là, je pouvais la sentir de partout. Je pouvais sentir l'odeur fruitée qui flottait doucement autour de son cou, ses mains fatiguées qui dansent sur ma peau et sa peau à elle, si chaude et si lisse.
C'était pur et peut-être un peu malsain, mais j'en pouvais plus. À chaque jour ou presque, je la regardais m'écouter et me dévorer des yeux. Quand je rentrais chez moi le soir, je la sentais partout autour de moi et je voyais ses cheveux et ses lèvres, ses mains, ses coudes et ses genoux.
Elle avait cette façon de parler, avec ces cris et ces pleurs. Ça m'a pris une si grande force de simplement lui dire non, cette nuit-là. Parce que tout mon être et chaque parcelle de mon corps voulait dire oui et j'en tremblais presque. La porte s'est claquée et je crois que c'était la dernière fois que ses grands yeux ont regardé les miens. Puisque, le lendemain matin, j'ai démissionné et logiquement, un autre prof en train de lui enseigner l'histoire du XVIIè siècle.
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c'est ça
Short Storyun recueil, un amas, une agglomération, une poubelle, bref, tout ce que tu voudras. c'est ça *** pour les images: elles se retrouvent toutes sur 'we heart it', elles ne m'appartiennent pas ***