Wendy

Jour 14

Lorsque je me levais, mon corps etait endolori par le temps que j'avais passé sur le sol froid et mon esprit à l'affût du moindre bruit, de la moindre voix. Cela faisait tout de même du bien d'être sortie de ma geôle, lorsque deux femmes vinrent me chercher pour me conduire au bureau de Madame Shane j'étais prête. J'avais l'intention de me soumettre à elle, je devais accepter ce qu'il m'arrivait et essayer d'adoucir le plus possible cette épreuve déjà fort difficile.

La vielle femme m'attendait, elle était assise à son bureau, son regard gris me transperçait comme de nombreuses petites lames et m'effrayait. Elle m'invita à m'asseoir avec sa voix condescendante:

-Assieds-toi, je te prie.

J'obéis à sa demande, docile, et d'un signe de tête elle pria ses deux subordonnées de sortir de la pièce afin de nous laisser en tête à tête. Elle ne prit plus la peine de cacher sa haine envers moi derrière une affabilité hypocrite que j'avais déchiffré depuis déjà bien longtemps. Elle me regarda comme un prédateur regarderait sa proie, une lueur féroce brillant dans ses prunelles sombres. Lorsqu'elle prit la parole, son ton était froid, tranchant:

-Bien Wendy, j'espère que tu as tiré une leçon de ta punition.

Je baissais mes yeux sur mes mains, n'osant l'affronter, j'étais épuisée de me battre. J'hochai la tête pour lui signifier ma réponse, cependant cela ne lui suffit pas.

-Allons mon enfant, tu n'as tout de même pas perdu ta langue?

Je raclai ma gorge.

-Non, je... oui j'ai tiré une leçon de ma punition.

Un sourire satisfait allongea sa bouche.

-Je préfère cela. Maintenant dis-moi l'enseignement que tu en as tiré?

-Je n'essaierai plus de partir d'ici.

Elle se pencha sur son bureau en prenant appuis sur ses avant-bras, afin de se rapprocher de moi.

-Bien, et pourquoi restes-tu ici?

Elle voulait me faire reconnaître une folie dont je ne pensais nullement être victime, louer son jugement.

-Parce que j'ai été au Pays Imaginaire et que personne ne me croit.

Elle fronça les sourcils.

-Wendy, souhaiterais-tu retourner d'où tu viens?

La peur s'empara de moi tel un étau, ma respiration s'accéléra et mes mains se mirent à trembler.

-Non...

-Bien, donc je repose la question et saches que c'est bien la dernière fois: Pourquoi es-tu ici?

Je n'eus même pas besoin de réfléchir, ma bouche prit le contrôle afin de dire ce qu'elle souhaitait entendre:

-Parce que je suis folle.

Ces mots laissèrent un goût acre sur mes lèvres, mais semblèrent lui convenir.

-Bien, maintenant, tu peux disposer Wendy, cependant tu n'iras pas à la salle commune avant demain, j'exige que tu restes dans ta chambre toute la journée pour méditer un peu plus longtemps sur tes actions et leur conséquences.

-D'accord.

Je me levai et les deux femmes qui attendaient à la porte me raccompagnèrent à ma chambre qui ressemblait plus pour moi à une autre geôle. Je ressassai cette conversation, regrettant cette partie de moi qui acceptait les circonstances et craignant celle qui voulait se soulever contre ce traitement qui me paraissait si injuste. Mais je devais reconnaître une chose à Madame Shane, c'est que si même mes parents avaient décidé de m'envoyer dans un asile psychiatrique, comment une femme qui m'était tout bonnement inconnue pourrait-elle me faire confiance d'une quelque façon? Je commençais à réaliser que je ne sortirai probablement jamais de ce lieu sordide qui méritait son nom mieux que je ne l'aurai pensé.