Inconditionnel

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« Emy,

Tu vas te marrer si jamais tu lis ça en la trouvant dans mes fringues, je planquerai ça ici tout le temps, jusqu'à ce que tu trouves cette feuille si jamais tu reviens.

Mais tu reviendras, j'en suis sûr. J'en suis persuadé.

Si c'est toi qui me lis, ce que j'espère... Sache que j'en suis ravi. Non, ça ne veut pas dire que je suis en train de crever du cancer, j'avais juste envie de l'écrire quelque part, histoire de soulager ma conscience, tu comprends ?

J'écris ça depuis que j'ai chopé la crève et que tu m'as rendu visite pour la première fois. Enfin t'as plutôt rangé et fouillé dans mes affaires, mais tu es quand même venue voir un mec que tu ne supportais pas.

Pourquoi, d'ailleurs ? Faudrait que je le devine un de ces quatre. Ou que je te pose directement la question.

Tu sais, je ne compte pas te foutre la paix avant de t'avoir. Et je n'ai qu'une parole. Si ça ne fonctionne pas, tant pis, mais au moins je l'aurais fait et je ne regretterai rien.

Tiens, ça me fera un bon marque-pages. C'est mon marque-pages pour la pièce de Murray Schisgal. Harry Berlin est plutôt dépressif, tu sais, Milt est clairement un enfoiré et Ellen Manville, bordel, a-t-elle une conscience ?

Je vais le relire en fumant une clope, histoire de vérifier. Ah non, ne lève pas les yeux, tu sais que ça m'énerve. Et ne retrousse pas non plus ton nez en sentant cette feuille.

Pour tout te dire, je ne m'attendais pas à ce qu'on se parle si facilement. Je voulais te parler depuis longtemps, t'avais l'air sympa de loin, quoiqu'un peu agaçante et maniaque. Le dernier fait est avéré : t'es maniaque. Maniaque, mais tu m'intéresses sincèrement.

On t'a déjà dit que t'avais de belles fesses ? OK, je retire ce que j'ai dit, mais je ne suis pas désolé d'avoir laissé échapper cette remarque.

Tu me diras probablement que je suis une espèce d'enfoiré de menteur obsédé. J'adore cette expression, elle est personnalisée, elle me désigne, moi. Juste moi.

J'écris ce truc stupide alors que cette crève de mort est en train de m'achever. Je vais vraiment survivre avec les médocs que t'as posé dans le salon ? Putain, je parle à un papier en imaginant que c'est toi. Peut-être que tu ne trouveras jamais cette feuille parce qu'elle sera trop bien cachée pour toi et que je me fais honte.

Vous, les femmes, vous rendez les hommes faibles. Et ça, avec vos seins et votre cul, c'est vraiment pas du jeu. Si vous voulez, on peut se foutre à poil pour être à égalité, vous en pensez quoi ? Sérieusement, j'ai pas le cul bombé pour attirer les regards.

Il ne me reste que ma belle gueule.

Pas de chance pour les types boutonneux.

Moi, ça me convient.

Les femmes me kiffent. Mais je voudrais que ce soit toi qui viennes à moi, parce que tu comptes. Je ne te le dirais certainement jamais, tu vas te marrer et ce genre de truc, c'est pas fait pour moi.

Tu ne veux pas me le dire, toi ?

Pathétique, putain. « Oh Elijah, je t'ai déjà dit que je n'aime pas quand tu es vulgaire. » Oui, madame.

J'ai le cerveau pété et je crois que j'ai la conjonctivite, mes yeux piquent et ils étaient rouges quand je suis allé dans ma salle de bain rangée. Ah non. Ce doit être l'écran et le manque de sommeil qui font ça. Mais ça brûle quand même. Il faudrait que je dorme, il est quatre heures du matin, mais Kuroko's basket m'empêche de fermer l'œil. À quoi tu penses, toi, à 4 h 09 du matin ?

Moi, je pense à toi. Un brin de lucidité qui s'efface au fil des minutes qui s'écoulent de plus en plus vite.

Tu imagines, je n'ai même pas le courage de t'appeler ? Tu m'arracherais les yeux, mais je t'entendrais l'espace de quelques secondes si tu décroches et que tu n'es pas trop énervée pour t'avoir réveillée.

OK, je ne t'appelle pas.

J'ai l'air lâche, hein ?

Emy. Sérieusement. Tu m'as fait quoi, aujourd'hui ? Je suis à la limite de craquer.

Sois prudente, parce que la prochaine fois que je te croise et que j'ai l'occasion de coucher avec toi, je le ferais. Je vais le faire parce que j'ai envie de toi et que je ressens déjà quelque chose. Alors fais attention.

Ne te marre pas, je t'ai dit. J'ai déjà honte de l'écrire. C'est la première fois que ça m'arrive. Je savais que ça viendrait, mais pas si profondément et si vite. Je suis persuadé que c'est ça, mais comment te demander ce que c'est au risque de te montrer ma faiblesse ? C'est ça, aimer ? Être faible ?

Si oui, je t'aime déjà, Emy. Je t'aime comme j'aime la physique et le basket. OK, c'est pas top comme déclaration, mais je suis sérieux.

Fais chier, j'ai plus de place sur la feuille.

Mais j'en ai encore un peu pour te dire que je t'aime de façon inconditionnelle, même si ce n'est pas réciproque.

Ce n'est pas moi qui décide de ça. C'est toi. »

Mes mains tremblent en tenant le papier et une larme l'abîme en tombant dessus. Je me dépêche de remettre la feuille sous sa pile de jeans et fais semblant de ranger quand je l'entends arriver dans la chambre.

— Qu'est-ce que tu faisais ? questionne-t-il en fronçant les sourcils.

J'aurais dû me douter qu'il remarquerait quelque chose. La curiosité m'apprendra, mais j'essaye quand même de faire comme si de rien n'était.

— Rien du tout. Je range tes jeans. Ça ne se voit pas assez ?

Il sourit, comprenant que je mens. Ce n'est pas faute d'avoir tenté le coup, même au bout de trois ans. Je sors la feuille en question et il tire nerveusement ses cheveux.

— Tu... Tu l'as lue ?

On dirait qu'il est embarrassé et qu'il a peur de ma réponse. Pourquoi pensait-il que j'allais en rire et penser que c'est honteux d'avouer ce qu'il a sur le cœur ?

— Je n'aurais pas dû ?

— J'en sais rien. Je savais pas si je devais te la filer, alors je l'ai planquée jusqu'à ce que tu trouves ça toute seule.

J'agite la lettre froissée sous son nez et me mets sur la pointe des pieds en m'appuyant sur son torse.

— Murray Schisgal fait vraiment des miracles, murmuré-je contre sa bouche.

Il regarde distraitement sa montre que je lui ai offerte pour son anniversaire et sourit d'un air satisfait avant d'enrouler ses bras sur ma taille.

— C'est moi qui vais en faire un dans mon lit juste avant d'aller chez Roni, rétorque-t-il.

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Merci d'avoir suivi cette histoire, j'espère que la nouvelle version vous a plu et que vous avez passé un bon moment ! Quel est votre moment préféré ? Celui qui vous a agacé ? Lâchez vous dans l'espace commentaire, c'est fait pour ça !

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