Chapitre 9 : La sorcière aux corbeaux

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Le jour pointait le bout de son nez lorsque Chihiro ouvrit les yeux. Elle venait de dire au revoir à Haku, et ils se promirent de bientôt se retrouver.

Zeniba était levée depuis longtemps et elle faisait les cent pas à travers la caverne. La jeune fille se releva et s'approcha de la vieille sorcière avant de lui demander :

— Savez - vous où se trouve la sorcière aux corbeaux ?

L'expression de Zeniba se figea, elle se tourna lentement vers Chihiro avant de la questionner :

— Pourquoi veux - tu savoir ça ?

La jeune femme comprit dans le ton de son amie que la sorcière aux corbeaux n'était pas très appréciée.

— C'est Haku qui m'a expliqué comment vous sortir de là... Et la solution à ce problème, c'est elle qui l'a.

Le visage de Zeniba se crispa et Chihiro sentit dans l'air une certaine tension qui la mettait mal à l'aise.

— Cette femme est la pire crapule qui soit... Tu ne devrais pas te fier à elle.

— Je n'ai pas le choix si je veux retrouver Haku...

Le ton de la jeune femme était si fébrile que la vieille sorcière sentait la pitié s'emparer d'elle. Malgré son amertume envers la femme aux corbeaux, elle accepta de dire où elle se trouvait :

— Elle habite non loin des arbres chanteurs...

Chihiro écarquilla les yeux, elle n'avait aucune idée d'où se situait l'endroit que décrivait Zeniba. Mais même avec cette incertitude elle décida de partir dans les bois, munis de sa boussole.
Elle pensait si fort aux arbres chanteurs que la boussole ne changeait pas d'un millimètre de cap. Le temps semblait s'accélérer à mesure que la jeune femme avançait, elle marchait puis courrait avant de ralentir. C'était une danse endiablée dont son cœur avait l'habitude, elle jouait avec lui comme avec une balle en mousse, sans se soucier de son état.

Au bout de plusieurs heures d'errance dans les bois, elle entendit une douce mélodie lui caresser les oreilles. Les arbres chanteurs étaient tout près d'elle et un pressentiment lui clouait le cœur. Son souffle était saccadé et son pouls affolé. Elle s'avança en direction de la mélodie et commençait à entendre les paroles de la chanson sylvestre :

" Oh mère nature,

Ton abandon nous torture.

Tes douces mélodies,

N'ont plus aucune symphonie."

C'était un chant d'agonie pour tous ses arbres en perdition. Chihiro arriva à leur frontière et fut surprise de voir sur les troncs noirs de gigantesques chênes, des visages humanoïde qui chantait en pleurant.

"Malgré ton caractère,

On a tous souffert.

Tu ne nous as pas protégés

Contre ses hommes damnés...

Ils coupent, rasent et broient,

Tout ce qu'ils voient !

Nos vies ont été écourtées,

Pour faire leurs papiers"

Chihiro ne savait pas comment se comporter face à ses arbres si malheureux, elle s'approcha du plus proche et lui demanda en chuchotant :

— excusez-moi, où se trouve la sorcière aux corbeaux ?

Le visage du chêne se transforma en grimace de terreur intense, il hurla :

— Une humaine !! Elle vient nous couper et nous broyer !

La jeune femme écarquilla les yeux, elle ne s'était pas rendu compte du sens qu'avait le chant des arbres. Elle recula d'un pas en voyant tous les chênes hurler de peur. Mais une voix féminine et rassurante les arrêta :

— Mes amis ! Soyez indulgents, cette jeune fille ne s'est pas encore présentée que vous la voyez déjà comme une ennemie.


Une nuée impressionnante de corbeaux noirs et menaçants s'abattirent sur Chihiro. Elle se protégea de ses mains, mais l'impact fut terrible, les serres des volatiles se plantèrent un par un dans les vêtements et la peau de la jolie brune. Elle hurla au contact de ses centaines d'oiseaux, mais elle n'eut pas fini de protester que ses pieds commençaient déjà à décoller du sol. Elle traversa la forêt d'arbres pleureurs et se retrouva lâcher par les corbeaux devant une femme. Elle avait les cheveux noir charbon, la peau blanc neige, les yeux d'un rouge sanglant et sa beauté était ténébreuse. Habillée d'une longue robe noire et d'une cape de la même couleur elle faisait sensation au milieu des magnifiques arbres centenaires teintés de multiple verts et marrons.

— Enchantée jeune enfant, que veux - tu dire à la plus puissante des sorcières ?

Le goût du sang arracha un gémissement à Chihiro qui examina ses blessures avec inquiétude. Les serres des oiseaux avaient percé sa chair et des gouttes de sang coulaient le long de sa peau. La sorcière lui lança un regard noir, elle ne répondait pas à sa question.

— Jeune fille tu as intérêt à répondre !

Le visage de la sorcière était tiraillé par la colère, de petites ridules se dessinaient sur son front et aux coins de ses yeux. Chihiro finit par répondre l'air ailleurs, elle souffrait tellement que la douleur devenait insupportable.

— Je viens chercher un remède contre les sorts d'illusions...

La femme aux corbeaux écarquilla les yeux puis éclata de rire, un rire diabolique et terrifiant. Chihiro se sentit outrée par le comportement de la femme, elle se moquait ouvertement d'elle.

— Je suis très sérieuse !

La sorcière la toisa d'un regard amusé, elle dit simplement :

— Cette potion vaut beaucoup plus que ce que tu peux me donner, mon enfant. Tu devrais rentrer chez toi petite.

Elle lui désigna le chemin inverse avec un sourire tordu sur le visage, mais Chihiro n'allait pas se laisser faire. Elle se mit droite, et de toute sa hauteur dit d'une voix claire :

— Jamais je n'abandonnerais ! La vie de Haku est entre mes mains... Alors ne comptez pas sur moi pour rentrer chez moi !

Le visage de la sorcière s'illumina.

— Et pourquoi donc une jeune fille comme toi voudrait sauver ce gamin ?

Une flamme s'alluma dans les yeux de Chihiro.

— C'est bien plus qu'un "gamin" ! Il est gentil, courageux et surtout, c'est mon ami !

Le sourire sadique de la sorcière disparu enfin, elle avait une petite lueur de tristesse dans le regard.

— Toi, une humaine, est amoureuse d'un esprit de la rivière... Tu devrais te rendre compte que votre amour est impossible. Que deviendrais-tu dans ce monde ? Ce n'est pas fait pour toi.

Chihiro entra dans une colère noire.

— Je ne vous permet pas de dire une telle chose ! Je fais ce que je veux et vous n'avez pas votre mot à dire !

La sorcière retrouva son sourire terrible et ajouta :

— Bien ! Si telle est ta volonté... Mais saches que la potion qui contre les sorts d'illusions est très chère. Ce prix, tu ne pourras le payer qu'une fois dans toute ta vie.

Le visage de la jeune fille se crispa, elle ne savait pas de quoi parlait la sorcière, mais cela devenait étrangement terrifiant.

— Il me faut ton âme, la potion ira à la personne que tu désigneras et tu rejoindras mon armée d'oiseaux.

Chihiro jeta un regard intrigué sur les corbeaux qui mangeaient non loin, tous ses oiseaux étaient en réalité des personnes qui avaient payé le plus grand prix de leur vie. De quoi donner la chair de poule.

Haku ? (Histoire Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant