Visionnistes

Chapitre 17

- Qu'est-ce que c'est que ce délire? s'exclama Alex sitôt assis sur le siège passager de ma voiture.

Je l'ignorai et me concentrai sur la route. Je n'avais ni l'envie ni le temps de tout lui expliquer.

Tout ce qui m'intéressait pour l'instant, c'était d'augmenter la distance entre ce Chasseur et moi. Je secouai la tête, encore choquée. Ils savaient ce que j'étais. Ils m'ont découverte et ne tarderont pas à m'enlever, tout comme ils ont fait pour ma mère, ma grand-mère, la mère de Cate ainsi que des centaines de Visionnistes.

- Tu veux jouer à ça? Je crois que je mérite de savoir ce qui se passe, j'ai été menacé par un fusil, bordel!

Je détournai le regard de la route un instant afin de le regarder. Je ne le croyais pas le genre de mec à lancer des jurons, mais bon, qu'en sais-je? Nous étions loin d'être les meilleurs amis du monde. Le terme de "connaissances" était à peine applicable, d'ailleurs.

- C'est une longue histoire, commençai-je, et tellement dingue en même temps que je doute que tu me croie si j'essayais de te la raconter.

- Essaye quand même. Je suis plutôt ouvert par rapport aux aventures hors du commun depuis quelques temps.

Quoi? De quoi parlait-il? Je lui jetai un coup d'oeil interrogateur, mais il avait le regard tourné vers le rétroviseur.

- Je... Je ne crois pas que tu comprendrais, ou même que tu y croirais, je te l'ai dis.

- Allez, tu me dois bien cela, j'ai failli mourir.

- Franchement, une simple balle dans le thorax ne suffirait pas à te tuer. Surtout si j'avais arrêté le saignement à temps pour l'arrivée de l'ambulance.

À son tour de me lancer un regard interrogateur. Je devais avouer que j'étais moi-même étonnée par mes paroles. Je ne me savais pas ces connaissances en soins d'urgences.

Je soupirai, récitante à lui dire la vérité.

- Mon père... a longtemps fait partie d'un gang avant de diriger Coco Chanel New York, lâchai-je néanmoins (c'était le premier mensonge qui m'était venu à l'esprit). Il doit un paquet d'argent à un mec depuis des années. Il y a peu, celui-ci a refait surface, plus insistant. Mon père a refusé de le payer et j'imagine donc qu'envoyer un homme m'attaquer est un moyen de pression de sa part.

J'avais senti le regard d'Alex sur moi durant tout mon discours. J'espérai qu'il n'avait pas détecté le mensonge et qu'il n'allait pas chercher plus loin.

- La vie d'une ado ordinaire des beaux quartiers, donc, conclut-il. En quoi est-ce incroyable? Cela doit arriver à tous les gosses de riches du monde.

Je pilai net. Heureusement, ce fut à un feu rouge.

- T'es sérieux?

- Quoi? répondit-il avec rudesse.

- Pourquoi me juges-tu autant? Ce n'est pas mon problème si tu ne possède pas autant d'argent que moi! D'ailleurs, que crois-tu? Que lorsque je n'étais qu'une ovule en maturation j'ai rempli un formulaire stipulant que je désirais naître dans une famille aisée?

Voilà qui lui coupa l'herbe sous le pied. Je n'avais pas demandé de me coltiner un mec qui trouvait un préjugé à me servir à chaque instant parce qu'il avait des problèmes financiers, contrairement à moi!

Il détourna la tête vers la fenêtre.

- On devrait appeler la police, non? dit-il.

- T'es dingue? hurlai-je presque. Tu n'as rien écouté de ce que je t'ai raconté?