Prologue: il était une fois...

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Il était une fois, dans un pays fort fort lointain, un prince tout-à-fait charmant.

C'était tout d'abord un homme accompli, qui dans la perspective d'endosser la cape d'hermine du roi, son vieux père, quand son tour serait venu de régner, avait appris tout ce qu'il est utile de savoir.

Ainsi, il était aussi expert dans l'art de dessiner des jardins que pour tracer des plans de bâtiments, de routes ou de ponts, et avait agrémenté le pays de constructions et de parcs extraordinaires. Désormais, même les moins bien lotis des habitants disposaient d'un logement confortable, dans un environnement idyllique.

Patient et compatissant, il savait écouter, et réglait les conflits à la satisfaction de tous, qu'il s'agisse de problèmes hiérarchiques ou pratiques, de relations de travail ou de conflits familiaux. Il s'était même montré si efficace dans ce domaine que désormais, les adversaires qui se rendaient devant lui au tribunal pour y faire juger leur cause y arrivaient déjà côte à côte, certains d'obtenir chacun satisfaction, et en repartaient bras dessus bras dessous.

Même pour ce qui était de tenir un ménage, il avait des prédispositions très supérieures à la moyenne. Ainsi, il était capable de choisir le bon programme de lavage sur sa lessiveuse d'avant-garde aussi bien que de cuire les spaghetti al dente, il nettoyait la douche après son passage aussi efficacement qu'il tournait le jambon à la broche, et il ne connaissait aucun rival dans la confection du tiramisù. Il n'avait certes pas un goût extraordinaire en matière d'habillement; mais au fil des années des gouvernantes, puis des valets de pied, avaient suppléé avec plus ou moins de bonheur à ce léger handicap.

Il n'était du reste pas difficile à mettre en valeur, étant fort bel homme. Il avait le cheveu déjà grisonnant, certes; mais il avait belle prestance - une haute stature, des épaules larges, des hanches étroites, une démarche souple, tranquille et assurée. Les habitantes du royaume comme les employées du palais avaient l'habitude d'ajouter qu'il avait aussi le regard tendre, et un sourire craquant.

Bref, le prince était apprécié et respecté dans tout le royaume. Il n'avait qu'un regret, qu'un chagrin: il était arrivé au milieu de ses jours, il n'allait sans doute pas tarder à monter à son tour sur le trône, et il n'avait toujours pas trouvé l'Amour Vrai.

On lui avait bien sûr présenté bon nombre de beaux partis, au fil des années. Lorsqu'il fêta son vingt-cinquième anniversaire, un grand bal fut même organisé au château, dans l'idée qu'il y trouverait une fiancée. Mais apparemment sa Cendrillon ne put pas s'y rendre. Elle avait dû se tromper, et faire pousser des courgettes au lieu de citrouilles. Car comme chacun sait, si les courgettes peuvent éventuellement se transformer en gondoles, il est impossible d'en faire des carrosses. Or il n'y avait pas de rivière navigable dans le pays, pas même des douves autour du château: on y accédait par une très large allée sablée ombragée de tulipiers géants.

Tout le pays aimait le prince. Mais personne ne l'aimait de toute son âme, et il n'avait jamais aimé personne de toute son âme. Lorsqu'il y pensait, lorsque cela le rendait trop triste, il se levait avant l'aube, et sans rien dire à personne, sellait son cheval préféré et partait au galop sur les routes du royaume, sans but et sans itinéraire.

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