Chapitre XX

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Thomas ne dit rien tandis que je me laisse aller dans ses bras, mouillant son haut. Au moins, le dauphin imprimé pourra nager ! Cependant, consciente de l'incompréhension qu'il doit ressentir en ce moment, je prends sur moi et arrête de pleurer. Je me détache de mon ami et inspire profondément l'air pur, qui s'infiltre dans mes poumons jusqu'à me faire mal. Je me relève dans un grand silence sans ressentir le moindre malaise. En réalité, je ne ressens rien du tout, si ce n'est de la peine et de la rancœur.

— Sam ? Demande Thomas, toujours à mes côtés.

Assis, les genoux ramenés contre son torse, il me dévisage de ses yeux clairs, semblant attendre une réponse. À quelle question au juste ? J'essuie fermement les larmes sous mes yeux, pensant qu'Aoile lèverai les yeux au ciel si elle me voyait comme ça. Elle qui voulais m'apprendre à me défendre et devenir forte, je pense même qu'elle serait outrée de me voir pleurer aussi crûment, dans un espace ouvert. D'ailleurs, où suis-je ? Les sourcils froncés, j'observe en silence le paysage autour de moi. Une cabane en bois assez vieille, dissimulée par deux gros arbres très feuillus. Il ne doit pas y avoir beaucoup de soleil à l'intérieur. Sous mes pieds, de l'herbe sèche et brunâtre s'étend, ainsi que sur le reste de cette... forêt ? Hormis quelques arbres encore vert, le reste semble avoir été brûlé dans un incendie.

— Comment...comment je suis arrivée ici ? Je questionne, perdue.

Thomas se relève et remonte ses lunettes sur son nez, l'air soucieux.

— De quoi parles-tu ? C'est notre point de rendez-vous ! Aoile ne t'en a pas parlé ? Il s'insurge, sans doute à l'égard de la blonde.

Je me mords la lèvre pour ne pas reprendre mes pleurs de veuve éplorée et inspire une nouvelle fois, assez fortement.

— Pas vraiment non. Elle n'a pas eu le temps, j'explique devant son air colérique.

Thomas regarde autour de lui, l'air presque apeuré, avant de reprendre un visage plus sérieux.

— Elle est restée avec son père ? Tant mieux, sérieusement cette fille me fait peur ! À chaque fois qu'elle me croise j'ai peur de finir dans son tableau de chasse, souffle-t-il.

Je pouffe discrètement, le cœur lourd. Le ton léger de Thomas me fait du bien, son humour, même décalé, me permet de penser à autre chose. Brièvement, une image du corps blessé de mon amie s'impose à moi, que je chasse en écoutant le rire cristallin du brun à mes côtés.

— Plus sérieusement, elle compte revenir ? Parce qu'elle a beau me foutre la trouille, elle se bat...plutôt bien, concède Thomas.

Je secoue la tête de gauche à droite.

— Elle... Je doute qu'elle... Enfin elle..., je bégaye, poings serrés.

Je ferme les yeux, me souvenant d'une scène. Un enterrement. Celui de mon père adoptif, quelques mois avant mes cinq ans. J'étais très triste parce qu'il était quelqu'un de bien, mais pas assez pour m'empêcher de parler. Je connaissais Aoile depuis presque un an et demi, nous n'étions pas si proches que ça. La raison pour laquelle sa mort m'affectait autant, c'est sans doute qu'elle traversait mon changement de vie avec moi. Cela nous avait rapprochées. Mais pour autant, j'étais assez mature pour faire mon deuil rapidement et avancer. Trouver un endroit sûr où commencer mon apprentissage. Cela devenait urgent.

— Elle ne reviendra pas. Maintenant, si tu le permets, il faut que l'on bouge. J'ai besoin d'apprendre à contrôler mes habilités avant de me remettre à cauchemarder ou crier sur des gens, je grimace.

Thomas reste un instant interdit devant mon ton condescendant et un peu incertain, laissant un blanc gênant se créer entre nous. Puis, il m'indique du doigt la petite cabane.

Les Chroniques d'Idan (tome 1) : La Dernière BansheeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant