Chapitre XXVIII

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Arynn est assise à côté de moi, sur l'herbe mouillée par la rosée du matin. J'ai passé la nuit à penser à Aoile, comment la sauver, en vain. Je ne serais jamais capable de faire quelque chose d'irrationnel, même pour elle. Ce n'est pas moi. 

Et à ma grande surprise, Arynn s'est révélée être une sorte de grande sœur. Elle m'a écouté, a ri devant les idées saugrenues et a même essayé de me forcer à en appliquer une ou deux pour "faire chier Elyane Flint". Je comprends pourquoi Thomas l'apprécie autant. Contrairement à ma première impression, Arynn n'a rien d'une fille superficielle et pipelette. C'est une fille très stratège...

— Et si tu allais voir Edgard Baldweather pour lui piquer les informations dont il dispose ? Tu pourrais même faire chanter ce grand cornichon, s'exclame soudainement Arynn, après une dizaine de minutes de silence.

Je me tourne vers elle, observant ses yeux brillants d'une lueur que je ne qualifierai pas. Un mélange entre la sournoiserie et la pure innocence. Comment est-ce possible ? Je me contente de froncer les sourcils.

— De qui ? Je réponds, confuse.

Arynn perd sa lueur oxymorique et hoche la tête.

— J'avais oublié que tu n'es ici que depuis trois jours. Edgar est le "Grand Juge" d'Idan. Si Aoile a un procès, c'est à lui qu'elle aura affaire. Et cet homme est bien plus que malsain. Je veux dire, certaines personnes sont méchantes pour obtenir quelque chose. Lui, il le faut pour conserver le pouvoir et c'est une horreur à voir. Met toi cet homme dans ta poche, et Aoile est tirée d'affaire, m'explique-t-elle.

Je me relève, passe une main ferme sur mon pantalon et soupire. Suis-je réellement capable de me mettre un homme pareil dans la poche ? Est-ce faisable ?

— Je ne vois pas comment. Je n'ai rien de charismatique, sauf si il aime les Banshees perdues et incontrôlables. Arynn, je n'arrive pas à me mettre les pouvoirs dans la poche, et tu veux que j'y mette ce type ? Déjà, ma poche sera jamais assez grande, et ensuite, c'est complètement dingue, j'éructe.

Arynn s'approche de moi tandis que mon cœur s'emballe dangereusement. Je le sens, je suis sur le point de crier, jusqu'à ce qu'Arynn plaque sa main sur ma bouche. Dans ses yeux, je lis une inquiétude et une tristesse qui me touche beaucoup, au point de me faire perdre mes moyens. 

Dans un bruit, elle me sert dans ses bras et je sens ses larmes couler sur mon épaule dénudée, vite séchée par les quarante degrés de cette journée. Mon cœur se calme, j'appose fermement mes bras dans son dos et tente de la calmer. Je la repousse avec gentillesse et douceur tandis qu'elle me transperce de son regard noisette.

— Qu'est-ce que j'ai dit pour te mettre dans un état pareil ? Je demande, presque dans un murmure.

Arynn sourit.

— Rien. C'est juste...toi. Tu n'es pas comme les autres Banshees dont nous avons entendu parler. Celles et ceux qui sont venus et que ont vécus sur Idan, qui se sont mélanger à nous et qui ont pris des risques immenses. Toi, tu débarques avec une mince notion de qui tu es, de ce que tu peux et va devoir faire et pourtant...tu es déjà plus proche de nous que les autres, réponds Arynn.

Touchée, je souris avant de poser ma main sur mon bracelet. Ou plutôt celui de ma mère. En toute évidence, ce bracelet a grandi avec moi, sinon comment expliquer qu'il m'allait à un mois et aussi à dix-huit ans ? Mais quelque part, les deux yeux verts du serpent qui m'observe me rappelle cette image de ma mère. La seule que je n'ai jamais eue.

— Merci Arynn. Même si j'ai l'impression d'être une héroïne de roman parfois. Toutes ces choses qui s'accumulent, toutes les questions restées en suspens... Je vais devenir folle ! Aoile enfermée, les pouvoirs à maîtriser, la "guerre" à venir dont m'a parlé Archibald, celle que je vois déjà arriver entre les Flints et Aoile... C'est trop pour ma caboche, je lâche en souriant.

Les Chroniques d'Idan (tome 1) : La Dernière BansheeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant