Chapitre XXVI

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Le souffle court, je reprends doucement ma respiration, les larmes aux yeux. Tout ce que j'ai pu voir, ce sont des yeux vairons et une touffe de cheveux bruns. Ceux d'un petit garçon, bien trop jeune pour mourir à mon goût. La main sur le coeur, essayant de calmer le rythme de mon palpitant, j'écoute les bruits alentour. Ce que je sais, c'est qu'il y a deux personnes dans cette grotte, en plus de moi. J'entends leurs respirations également, sans doute grâce à mes dons de Banshee. Je n'ai pas besoin de me tourner pour savoir de qui il s'agit, puisque cette personne s'approche de moi et pose sa main sur mon épaule.

— Sam, ça va ? Demande la troisième personne, qui se trouve être Elyane. 

Je hoche la tête en silence, la main redescendant vers mes hanches. Je lève la tête et me mords la lèvre, l'image de ce petit être tournant en boucle dans mon crâne. Mon coeur me fait toujours plus mal. Plus je découvre ce dont je suis capable, plus je me sens comme un monstre...

— Pas vraiment. Quelqu'un est mort, je réponds laconiquement, incapable de faire autrement sans fondre en larmes.

Archibald ferme les yeux et ses lèvres murmurent une prière. Je suppose que c'est son rôle de Gardien qui lui imposent d'envoyer les âmes des défunts en paix. A moins que ça ne soit le côté prêtre... Dans tous les cas, quelqu'un est mort et ça m'a percuté comme un boulet de canon...

— Je crois qu'Aoile va me tuer si elle apprend ce qu'il vient de se passer, soupire Elyane, relâchant sa pression sur mon épaule.

Je reste interdite avant de plisser les yeux et la regarder fixement.

— Je ne vois pas comment lui cacher ça. Elle semble connectée à mes cris, de toute façon. À l'heure qu'il est, elle doit déjà essayer de me retrouver, je conclus, un peu énervée.

J'ai horreur de cacher des choses aux gens, en plus aux seuls amis que j'ai. Hors de question qu'Aoile soit écartée de ce genre de chose alors que c'est toujours elle qui a été là pour moi depuis le début, ou presque. Sans parler du fait qu'à chaque cris, elle me retrouve en moins de dix minutes. Elyane semble surprise de ma réaction mais ne renchérit pas.

— Mademoiselle Green doit apprendre à maîtriser son don. Sinon, elle deviendra sénile, à force de voir les gens mourir. Personne n'est éternel, surtout avec la guerre à venir... Termine Archibald d'un ton lugubre.

Je cligne des yeux quelques secondes, d'abord pour accuser le coup, puis par pure surprise. Quelle guerre ? Je ne tiens pas à devenir sénile, ni à voir des gens mourir toute ma vie, ni même faire la guerre ! Je ne suis pas venue ici pour cela, je suis venue pour trouver la place quelque part dans ce monde, avec les gens...comme moi. Parce que je ne suis pas humaine. Pour la première fois depuis le départ, je me rends compte que j'ai accepté qui je suis. Je n'ai hâte que d'une chose : en apprendre plus.

— Heu... Guerre ? Quelle guerre ? Je répète tel un perroquet.

Archibald se tourne vers moi, le visage fermé. Elyane semble le supplier du regard de ne rien dire.

— Je pensais que tu savais. Cette question, pour être comprise et pour y répondre entièrement, nécessité une leçon d'histoire qui nous prendra du temps. Il faut que tu te reposes et que tu découvres l'île. Demain, puisqu'il le faut, je t'expliquerai tout, réponds le vieil homme.

Je fronce les sourcils mais n'insiste pas. Il est vrai que je ne me sens pas vraiment d'attaque pour un cours historique complexe. Ma tête me lance encore un petit peu et je veux juste savoir comment contrôler mes capacités avant de me mettre à hurler tout le temps. Elyane referme ses bras autour de moi, collant mon dos contre son torse. Je ne bouge pas, appréciant le contact chaleureux et maternel.

Les Chroniques d'Idan (tome 1) : La Dernière BansheeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant