II. Le silence du disparu

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Samedi 6 avril 2013.
10h00.

– Tu n'as pas l'air d'être de la campagne, toi. rit Antoine en voyant l'étrange adolescent grimacer à chaque fois qu'un mouton s'approchait de lui.

Le nouveau venu n'avait pas encore dit un mot. Il était terrorisé et avait bien mis cinq minutes avant de daigner sortir de la grange. Il regardait partout autour de lui, s'interrogeait sur l'endroit où il était. Antoine avait cessé de le harceler de questions: il savait qu'il ne fallait pas le brusquer. Quand il lui donna le croissant qu'il lui restait dans son sac, l'adolescent à capuche ouvrit enfin la bouche et murmura un "merci" presque inaudible.
Les deux garçons s'étaient assis l'un à côté de l'autre, sur un banc qui avait été taillé dans le tronc d'un arbre déraciné. Le petit dévorait son croissant et Antoine le regardait avec un sourire bienveillant.

– Je dois aller traire quelques brebis. Tu restes ici ?

Le nouveau le regarda s'en aller, puis tourna la tête à plusieurs reprises pour vérifier qu'il n'y ait personne d'autre dans les parages. Craignant trop l'apparition d'une tierce personne, il courut pour rattraper le chevelu.

– Bon, puisque tu me suis, je peux te montrer comment faire !

Sous le regard attentif et intrigué du citadin, Antoine trayait une brebis, qui se laissait faire comme s'il s'agissait de son agneau.

– Ça ne nous fait pas beaucoup, mais ce sera suffisant. affirma le garçon en tendant un petit seau rempli de lait à l'ado à capuche, après la traite de quelques brebis.

Antoine demanda au nouveau s'il voulait venir avec lui apporter le lait à sa grand-mère, mais celui-ci refusa en secouant la tête silencieusement. Il attendit que le chevelu revienne et s'assit sur un rocher, à l'ombre d'un arbre.
L'ado serrait son sac contre son ventre, comme s'il contenait un trésor. C'était la seule attache qu'il lui restait. La dernière chose qui le ramenait à la ville. Il enfouit son nez dans le tissu du sac, dans l'espoir de sentir encore l'odeur de sa chambre, mais elle avait déjà disparu pour laisser place à celle du foin et des moutons.

•••

Samedi 6 avril 2013
15h40.

– Vasquez ! Vasquez ! s'écria l'informaticien Perrin à travers le commissariat.

L'inspectrice, qui était dans la salle commune avec deux autres membres de l'équipe, se retourna à l'entente de son nom.

– Ils ont retrouvé le portable du gosse !

Tous se redressèrent à l'entente de ces mots.

– Je viens d'avoir les agents sur le terrain, ils ont retrouvé un portable qui est celui du fils de M. Sommet !

– Où était-il ?

– Dans les hautes herbes d'un fossé à proximité de l'arrêt de bus. Là où on a perdu la trace du gamin. C'est la brigade canine qui a retrouvé le téléphone en inspectant à nouveau les lieux.

– Super, ils vont nous le remettre ?

– Oui, ils devraient nous l'apporter d'ici quelques minutes.

L'inspectrice regarda l'horloge au mur: il était déjà presque quatre heures de l'après-midi. Elle n'avait même pas pris soin de manger et s'accordait à peine le temps pour s'hydrater. Le temps passait trop vite, les autorités n'arrivaient pas à s'organiser. Les médias grouillaient comme des hyènes et enquêtaient même de leur côté, voulant à tout prix décrocher une information inédite.
Vasquez était satisfaite d'obtenir enfin un nouvel indice. Ses équipes avaient déjà commencé à interroger des suspects, mais leurs efforts étaient pour l'instant infructueux. Elle espérait que la découverte de ce téléphone serait le déclic à cette enquête.

Le temps d'un sourire [Matoine]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant