VIII. ...promets-moi de me sauver

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Jeudi 11 avril 2013
8h25.

« – Vasquez, c'est quoi ce bordel ?! rugit le commissaire. »

L'inspectrice attendit quelques secondes pour permettre à son sang-froid de revenir, et se tourna lentement vers lui, une mine partagée entre l'agacement et la fatigue.

– Ce bordel, c'est une fuite d'informations capitales. Quelqu'un a livré le contenu de notre nouvelle hypothèse à la presse et-

– Je ne parle pas de que de ça. l'interrompit le commissaire. La fuite est une conséquence de la gestion désastreuse de cette enquête !

Vasquez écarquilla les yeux, choquée de la remarque. Béate, elle mit du temps à trouver ses mots.

– Vous... vous êtes en train de m'accuser de mal gérer l'affaire ?

– Prenez-le comme vous voulez.

Tous les autres fonctionnaires de police observaient la scène en silence, sans oser intervenir ou se permettre une remarque. Vasquez remarqua le vouvoiement exceptionnel de la part de son supérieur, sûrement dû à la présence d'un public.

– Commissaire, je crois qu'il faut mettre les choses au clair.

– En effet ! approuva-t-il avec un air de défi. À quel moment l'idée que Sommet ne soit pas le père de son enfant vous est-elle venue ? À quel moment vous êtes-vous dit qu'il serait plausible et correct d'envisager une telle hypothèse ?

Vasquez croisa les bras et releva le menton, prête à camper sur ses postions.

– Samedi matin, huit heures. Au moment où vous m'avez dit très clairement « Vous avez carte blanche pour cette affaire, je n'interférerai pas. »

– Mais vous avez complètement craqué ?! Est-ce que vous imaginez seulement la publicité désastreuse envers les Sommet que cette fuite engendre ?

– Quoi ? Une réputation de cocu ? ironisa-t-elle. Ce n'est pas ma faute si quelqu'un a donné les infos à la press-

– Taisez-vous ! hurla l'homme, dont les nerfs des tempes étaient visibles.

Silence total dans le commissariat. Même ceux qui n'avaient pas prêté attention à la conversation relevèrent la tête, y compris les agents en pleine communication téléphonique.
Vasquez avait baissé la tête une demi-seconde, pour la relever presque immédiatement. Elle ne laisserait pas passer cela. Elle reprit, avec un ton plus posé qui dégénéra crescendo au fil des phrases:

– Vous m'accusez d'une mauvaise gestion de l'affaire. Vous m'accusez d'être la responsable de la fuite des informations. Mais dois-je rappeler qui a ordonné à la brigade d'intervention de mettre un homme en garde à vue sans accusation valable ? Dois-je rappeler qui m'a interdit d'aller le voir, avec aucune justification ? Dois-je rappeler qui lui a interdit le droit basique d'accéder à un avocat, sans que je ne le sache ? Dois-je rappeler qui représente la loi et la viole depuis le début ?

Un silence de mort s'installa dans les bureaux. Elle allait trop loin, en était consciente, mais son sang-froid l'avait abandonnée à nouveau et elle reprit de plus belle:

– Vous m'accusez de mal gérer l'enquête, mais vous ne cessez de me mettre des bâtons dans les roues. Les intérêts des Sommet sont-ils si importants qu'ils outrepassent les lois ?

Le temps d'un sourire [Matoine]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant