XI. Quand les masques tombent

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Samedi 13 avril 2013
8h28.

« Cela fait désormais une semaine que Mathieu Sommet, le fils de l'entrepreneur Monsieur Sommet, est porté disparu. La police n'a pas souhaité communiquer de nouvelles informations mais affirme que les recherches se précisent. L'alerte enlèvement et l'appel à témoins sont toujours valables et quiconque ayant des informations est prié de les communiquer le plus rapidement à la police... »

Yvette éteignit la radio d'une main tandis que l'autre beurrait sa tartine d'un geste machinal. Antoine et Mathieu, assis à ses côtés autour de la table, mangeaient les leurs avec un air fatigué. On devinait facilement qu'ils avaient encore veillé tard la nuit dernière, mais s'étaient tout de même levés pour aider la grand-mère.

– Vous auriez du café ? hésita Mathieu, qui regardait sa tasse de lait de brebis avec un peu de dépit.

Yvette parut surprise mais acquiesça. Elle se leva, prépara la cafetière et, quelques minutes plus tard, Mathieu sirotait une tasse de café brûlant.

– Comment un enfant de quatorze ans peut-il boire aussi facilement un café sans sucre ni lait ? s'étonna l'aïeule, ce qui fit sourire l'intéressé.

– Je sais pas. Je m'y suis habitué.

Antoine sourit, lui qui buvait son lait de brebis auquel il avait ajouté du cacao. Le contraste entre les deux adolescents était bien plus frappant dans ces moments-là, et on aurait presque pu s'attendre à ce que Mathieu enfile un costard pour partir travailler.

– Antoine, tu pourrais passer à l'épicerie après ? Je te donnerai la liste de ce qu'il nous faut.

Le garçon accepta, sans surprise, et en quelques minutes la table fut débarrassée et les deux jeunes faisaient une escale à la grange afin de se procurer le panier des courses.

– Elle est où, l'épicerie ? demanda Mathieu.

– Sur la place du village, mieux vaut que tu restes ici, on pourrait te reconnaître.

– Oh non, pas encore. Je viens avec toi.

Antoine grimaça, tout en se mettant sur la pointe des pieds pour récupérer le panier.

– Tout le monde connaît ton visage, c'est une prise de risque inutile. J'en aurai pas pour long.

– Je mets ma capuche et des lunettes de soleil et c'est bon !

– Mathieu... il n'y a pas de soleil dehors, tu aurais l'air suspect... et stupide, par la même occasion.

– Ou je pourrais mettre une perruque.

– C'est la pire idée que t'aies eue. Et puis tu la trouves où, ta perruque ? Bonne chance pour en fabriquer une à partir de paille et de foin. Hé, je sais que tu t'ennuies, mais je ferai pas long.

Le plus petit finit par se résigner, faisant mine de bouder, tandis que l'autre quittait le domaine des Daniel pour se rendre au village.

Lorsqu'Antoine rentra dans la grange, après avoir donné à sa grand-mère les provisions fraîchement achetées, il trouva Mathieu en train de tresser une perruque à base de brins d'herbe séchée.

– Ok, je vois que l'ennui a atteint ses limites. Allez viens, on va faire un tour en side-car.

Le citadin réprima un cri de joie et sauta immédiatement sur la moto entreposée dans l'étage inférieur de la grange.

– On va où, cette fois-ci ? lança Mathieu alors qu'il se débattait avec la lanière de son casque.

– Je vais t'indiquer le chemin. Ça te plaira.

Le temps d'un sourire [Matoine]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant