VII. Et si je tombe...

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Mercredi 10 avril 2013
8h35.

Encore une nuit passée au commissariat, à échafauder toutes sortes d'hypothèses des plus pragmatiques aux irréalistes. Cumulant à eux deux cinq glorieuses heures de sommeil, Vasquez et Perrin tentaient de rester alertes, puisque le commissariat était à nouveau en pleine ébullition.

– Arthur Franc a accepté de venir à l'interrogatoire ! lança une policière, qui venait apparemment d'avoir un échange téléphonique avec lui.

– Parce qu'il pensait avoir le choix ? répondit sarcastiquement le lieutenant Tullier, produisant une série de rires gras parmi les agents.

Vasquez roula des yeux et reporta leur attention sur le tableau blanc. À la manière d'une professeur instruisant ses élèves, elle leur désigna les prénoms d'Ève et Arthur.

– Ces deux-là ont eu une relation jusqu'en 96. Et Ève a quitté Arthur pour Serge, peu avant la création de l'entreprise.

– En fait Ève c'est une michto, quoi. lança un stagiaire, déclenchant l'hilarité chez ses collègues masculins.

– La ferme, Kevin. le rappela à l'ordre Vasquez, après avoir levé les yeux au ciel une seconde fois.

– Avec cette découverte, Monsieur Franc est bien plus susceptible d'avoir enlevé le jeune Sommet... releva une apprentie, qui prenait des notes dans un calepin.

– C'est... c'est exact. admit l'inspectrice à contre-cœur.

Un instant, celle-ci s'en voulut d'avoir découvert cela. Elle était tant persuadée que Franc était une personne honnête qu'il lui semblait impossible de l'imaginer commettre un rapt. Elle avait l'impression qu'elle jouait l'avocate du diable, ou pire, qu'elle tissait la toile qui servirait de piège à Franc.
Pourtant elle était loin de se douter que, ce qui partait d'une simple intuition au début, la mènerait aussi loin.

– Arrêtez de douter, Inspectrice ! On l'a trouvé, notre ravisseur. Il s'est tout fait prendre par Sommet: son idée, son argent, sa copine... il n'y a plus qu'à le confondre durant l'interrogatoire, et ce sera fini !

– Vous oubliez le gosse, lieutenant... lui signala un agent.

– Le gosse...! Soit il est retenu dans une cave, soit c'est fini depuis longtemps. Certains sont prêts à aller loin pour se venger, tu sais...

– Lieutenant ! s'exclama l'inspectrice, qui avait ouvert grand les yeux en l'entendant parler. Présumer que Franc est un ravisseur, soit, mais qu'il est un meurtrier, non ! Et j'ai l'impression que beaucoup oublient que le but de cette affaire est en premier lieu de retrouver l'enfant sain et sauf !

– Sain et sauf ! rit amèrement Tullier. Inspectrice, on sait tous ce qu'il se passe dans ces cas-là !

– Et que faites-vous du message de rançon ?

– Ça ? C'est juste un gamin de campagne qui a acheté un portable jetable pour se marrer ! Monsieur Sommet vous a bien dit qu'il ne savait pas de quoi parlait le message...

– Et bien, je ne sais pas où vous avez passé votre enfance, mais les gamins que je connais n'envoient pas de messages de fausse rançon pour s'amuser. rétorqua-t-elle très sèchement.

Perrin, qui s'était fait silencieux jusque là, intima aux autres de se taire. Il n'était en général pas un exemple d'autorité, mais, placé aux côtés de l'inspectrice, personne n'osa contester.

Le temps d'un sourire [Matoine]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant