Chapitre 3 : le Lapin Blanc (part 1)

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—Adrian—

Bon, Il était temps que j'y aille, «Elle» nous a dit que nous allions avoir des visiteurs, alors autant les accueillir. J'espère qu'ils seront courtois, et pas trop regardant, il faut dire que les humains qui sont venus ici pour la première fois m'ont bien fait savoir que j'étais ridicule. Comme si c'était volontaire ! Tsssss... Enfin bon, je ne vais pas ruminer pour les 3 prochains siècles.

-Attention Adrian, ils sont bizarres, d'après Violette, fit une voix à mes côtés.

-Oui, vraiment. Elle a dit que la première à être venue est tombée dans les pommes, dit une seconde.

-Et ceux qui sont venus après ont des vêtements ridicules, renchérit une autre...

-... et en plus ils parlent fort, compléta une quatrième !

-Tu es sûr qu'ils sont assez dignes pour traverser la Maison des Merveilles, questionna une cinquième ?

-Nous le saurons bien assez tôt, Lys Tigré, répondis-je avec un sourire.

J'espère juste que ce n'est pas l'abruti dont avait parlé ce cher Loïc... ça fait un moment qu'il n'est pas venu, d'ailleurs. C'est dommage, je suis sûre que Raphaëlle sera contente de le revoir. Seulement Gabriel risque de ne pas aimer...

J'avançais sur la route damier rouge et blanche poussiéreuse et sale, bordée de fleurs parlantes qui pour la plupart étaient mortes ou desséchées sous le soleil couchant transformant le ciel en une magnifique palette de rose, d'orange et de bleu.

Sur mon chemin, les fleurs potassaient sur les nouveaux arrivants. Il faut dire que dans leurs tristes vies sédentaires, elles n'ont pas grand chose d'autre à faire que de discuter en attendant que mon cher Gabriel leur offre le thé.

Voyant le soleil décliner encore plus, je décidais de sortir ma montre à gousset de mon gilet de velours bleu nuit bordé de blanc pour vérifier si je n'étais pas en retard. Et bien non, je suis à l'heure pour une fois. C'est magnifique. Enfin bref, ce n'est pas parce que je ne suis pas en retard et que je peux contrôler le temps que je dois trainer en chemin, si je commence à utiliser mes pouvoirs alors qu'ils viennent juste d'arriver, ça risque de les perturber un peu.

Ah, voilà, je suis arrivé devant le miroir.

Trois individus masculins, deux individus féminins, tous avec des couleurs de cheveux différentes et des vêtements différents quoiqu'un peu ridicule. J'ai l'impression qu'ils ne savent pas s'habiller. Pire que Dante. Enfin bref, passons.

Je m'avançais à leur rencontre. En m'approchant, je vis qu'un jeune homme aux cheveux sombres soutenait une demoiselle vêtue d'une robe violette, tandis que les trois autres regardaient leur environnement comme s'il n'avait jamais vu le monde. Il me semble que Loïc m'avait dit que dans son monde, les routes n'étaient pas en damier, que les fleurs ne parlaient pas et tout était moins intéressant et coloré, ce qui expliquerait peut-être leurs réactions.

-Excusez-moi, messieurs-dames, puis-je vous être utile, demandais-je d'un ton aimable ?

Ils éclatèrent tous de rire en me voyant, sauf le jeune homme qui tenait la demoiselle, qui me semblait d'ailleurs assez familier...

-Et bien quoi ? Vous n'avez jamais vu d'être humains ?

-C'est... C'est pas ça... répondit la fille aux cheveux à moitié turquoises.

-Un... Un lapin, prononça le blond avant de partir en fou rire.

Voilà pourquoi les humains se moquent de moi quand ils me voient la première fois : j'ai de magnifiques oreilles de lapin blanches et une jolie queue de lapin touffue grâce, ou plutôt à cause, de laquelle je dois porter des pantalons spéciaux. Mais peut-être que mes cheveux blancs mi-longs attachés sur ma nuque ou mes grands yeux noirs peuvent accentuer cette impression de ridicule chez certaines personnes.

-Un lapin en costard, ricana le petit châtain.

Je ne vois pas le ridicule. Je porte simplement une chemise blanche, un gilet sans manches foncé avec un pantalon blanc, des bottes bleu nuit et rien de plus ! Ce n'est pas comme si j'étais vêtu comme Dante, à porter toute sorte de chaines et de bracelets à piques !

Le jeune homme qui soutenait sa compagne, lui, me regardait d'un air choqué. Il me rappelait quelqu'un ce type...

-Excusez-moi, jeune homme, ne nous serions-nous pas déjà vu quelque part ?

Il bégayait :

-N-n-non... J-je ne crois pas...

-Vraiment ? Pourtant votre visage m'est familier... Vous n'avez pas de la famille qui est venue ici ?

Il hésita quelques secondes, puis répondit :

-N-non...

Entre temps, les autres s'étaient calmés. Je sondais du regard. Il serait peut-être temps de faire connaissance :

-Bref, peu importe. Je m'appelle Adrian. Et vous ?

Ce fut le jeune homme aux cheveux sombres qui répondit :

-Je m'appelle Florian, le blond c'est David, l'autre mec c'est Lucas, celle que je soutiens s'appelle Camille et la fille là-bas, c'est Angélique.

-Il va bientôt faire nuit, fis-je d'un ton amical, «Elle» souhaiterait que vous nous rejoignez pour le dîner.

-Et... Comment allons-nous faire pour rentrer chez nous, me demanda la dénommée Angélique ?

-Nous en reparlerons après le diner, je vous prie. Pour l'heure, il faudrait que vous fassiez connaissance avec les autres. Ah, et je vous conseille de ne pas essayer de vous éloignez de moi, qui sait, un bandersnatch est tellement rapide que vous pourriez vous faire tuer sans même vous en rendre compte, dis-je avec un sourire en coin.

Je crois que je leur ai fait peur. Les humains sont-ils si impressionnables que ça ? C'est ridicule. Je commençais à avancer, suivi par les jeunes humains, qui hésitèrent tout de même un peu avant de me rejoindre. Quand nous passions, les fleurs chuchotaient entre elles, effrayant par la même occasion les jeunes gens. Soudain, j'entendis la demoiselle Angélique me dire :

-Arrêtez-vous ! Florian n'arrive pas à nous suivre.

Je me suis retourné en soupirant et je me suis approché du jeune homme en lui prenant la demoiselle Camille dans mes bras, bien que monsieur Florian m'envoya un adorable regard plein de méfiance. Que veux-tu que je te dise, si tu n'arrives pas à porter qui que ce soit sur un chemin, laisses faire ceux qui ont un minimum de muscles ! 

Le Pays des Merveilles, de l'autre côté du MiroirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant