Chapitre 8 : les Préparatifs

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—Lewis—

Ce repas était déplaisant au possible. Et encore, déplaisant est un mot assez faible. Je dirais plutôt qu'il était chiant. Chiant à en mourir. Entre les humains qui montraient autant de capacités de réflexions que des insectes (et j'en sais quelque chose, je les ai énormément étudié quand je m'ennuyais) et les autres qui mettaient tellement de coeur à les clasher que j'ai cru que j'allais m'endormir... Et encore, je ne parle pas des regards que me lançaient l'humaine Angélique.

Une fois retourné dans ma bibliothèque, je suis allé perfectionner mon piège. Il était 22h02. J'avais eu le temps de le commencer peu avant l'heure de manger, de toutes façons, il était assez simple à réaliser. Je savais que j'allais devoir attendre un certain temps avant de voir les humains se pointer, mais j'avais peur que ce ne soit pas assez parfait. J'avais beau savoir que le mieux est l'ennemi du bien, je n'avais pas droit à l'erreur. Une incision de trois millimètres sur le côté pourrait tout rater. À la limite, je pourrais maintenir la paupière ouverte pendant l'incision, mais ça serait trop louche. Je suis le premier piège. Je dois au moins faire semblant d'être amical avec eux pour les faire tomber. J'espère juste que je ne les aurai pas trop amochés, les autres m'auraient pété la gueule.

Je bougeais le pan de mur à travers lequel ils devraient passer plus tard.

-T-tu fais quoi, questionna Timothy ?

-Rien, je vérifie que tout fonctionne normalement, répondis-je.

Il ne dit rien de plus et je refermais le pan de mur.

Je vérifiais que mon matériel était bien en place. Parfait. Je rêvais d'en tuer un de mes propres mains, seulement si je le faisais je risquais de m'attirer les foudres des prochains. Si seulement je n'avais pas été obligé d'être le premier ! Après tout, ils n'ont pas tous cette soif de sang...

Timothy, par exemple, était loin du grand psychopathe sadique et sans pitié. Seulement, tuer quelqu'un ne lui faisait ni chaud ni froid. Même s'il préférait éviter de répandre du sang, selon lui tuer était un acte «grave», ce que je trouve stupide. Ambre aussi, était loin d'être une tueuse exemplaire, elle semblait toujours triste d'assassiner n'importe quelle personne. Une fois je l'ai même vue pleurer. Mais le plus drôle, c'étaient quand même Émilie et Émilia. Cette dernière, plutôt grande gueule, était toujours assez hésitante quand il s'agissait d'assassiner, tandis qu'Émilie, bien que réservée, était une véritable machine à tuer, froide et détachée. À côté de ça, Eve était sanguine, Dante une machine de torture, Sébastien un destructeur psychologique, Gabriel et Raphaëlle semblaient tellement fous qu'ils pourraient pousser au suicide, Adrian avait une certain classe dans l'assassinat et en ce qui me concerne... Disons que je me considère comme un scientifique, testant différentes manières de mourir.

C'étaient les humains qui nous avaient, indirectement, transformés en ce que nous étions devenus. Une longue et pénible histoire à laquelle nous n'aimions pas penser. Seule «Elle» se plaisait à la raconter à chaque personne qu'elle allait tuer. Elle devait ressentir une certaine satisfaction à tout dire pour les derniers moments d'une victime quelconque.

En attendant qu'Adrian et Eve aient une conversation «compromettante» dans laquelle ils devront expliquer à quel point ils voudraient que les humains restent au Pays des Merveilles puisqu'ils ont besoin d'eux pour survivre et qu'ils ont l'intention de bloquer l'aile ouest juste devant la porte de la chambre du frère de Loïc, je décidais de passer le temps comme l'accoutumée : narguilé et relecture de notes.

Enfin, je vis Eve et Adrian passer la porte en courant et la refermer derrière eux.

-Alors, demandais-je ?

-Ils ont mordu à l'hameçon, fit Eve surexcitée.

-Ils ont convoqués leurs amis assez rapidement et ont pris leur décision encore plus vite. Ils devraient arriver dans les cinq minutes, développa Adrian calmement.

-Qu'est-ce-que c'est stupide un humain, rigola Eve.

-Bon, il va falloir vous grouiller, les coupais-je en escaladant avec facilité le côté d'une des nombreuses bibliothèques composant les murs.

Une fois monté à la hauteur que je souhaitais atteindre, je poussais un rayon entier, entrainant une bonne partie de ceux du dessous en même temps, puis sortis une échelle du rayon au dessus de celui que j'ai poussé et la laissais tomber.

Adrian et Eve ont rapidement compris ce qu'ils avaient à faire. Il laissa la jeune femme passer devant lui puis monta l'échelle. J'observais leur progression en silence. Dès qu'ils parvinrent à poser le pied sur l'embrasure de porte créée et à passer de l'autre côté, je tirais le rayon de livres poussé plus tôt, refermant ainsi le passage, puis je rangeais la corde et descendais en essayant de faire le moins de bruit possible.

Certaines de mes vieilles habitudes de chenille ne m'avaient pas quittées. Encore heureux.

Je me rassis dans mon fauteuil, repris mes notes et continuais de fumer mon narguilé.

Le Pays des Merveilles, de l'autre côté du MiroirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant