42.Avigaël

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Après les cours, je suis allée chez Tante Mae et M. Reynolds m'a remis les clés de la Cadillac de sa mère. J'ai protesté, mais il m'a assuré qu'elle aurait voulu qu'elle me revienne.

C'est ainsi que maman profite de sa pause pour me conduire chez Mme Reynolds et m'aide à ouvrir le garage. Je souris devant la voiture qui me rappelle le jour où la vieille dame m'a aidée à surmonter ma peur de conduire.

— Tu te sens prête ? demande maman.

— Oui. Allez, retourne au travail. Je vais me débrouiller.

— Avigaël, tu es particulièrement forte ces derniers temps, mais pour conduire, je ne sais pas...

Le moment est venu de lui expliquer l'état d'esprit dans lequel je suis. J'ai tenté de me contrôler pour l'épargner, mais désormais je crois que je lui ferais plus de mal en continuant à me taire.

— J'ai besoin d'espace, maman, dis-je en appréhendant sa réaction.

Malgré son air dubitatif, je vois qu'elle cherche à comprendre.

— J'ai eu du mal à l'accepter moi-même, mais maintenant j'y arrive. J'accepte mon corps et ses limites. Je suis moi... la nouvelle moi. Je ne suis peut-être pas parfaite mais ça ne me dérange pas. Il est temps que j'arrête de fuir la réalité, tu ne crois pas ?

Une larme coule sur sa joue. Elle me sourit, avec une chaleur qui illumine son regard.

— Cet accident a tué toute une partie de toi...

— Parce que je n'ai rien fait pour empêcher cela.

Nous sommes toutes les deux en larmes. Je l'enlace longuement.

Après quelques minutes, elle remonte en voiture et s'éloigne, me laissant l'espace dont j'ai besoin. Je pose un long regard ému sur le jardin. Le belvédère, dressé comme un château au milieu de la pelouse. Les parterres de fleurs, tout autour. Les bulbes en hibernation, qui attendent patiemment l'heure de percer la terre pour prendre leur essor.

J'ai l'impression d'avoir éclos. Pour m'extraire de ma phase d'hibernation, il m'a fallu une histoire d'amour et l'aide d'une vieille dame, mais j'y suis tout de même arrivée.

Alors que je longe prudemment les terrains de foot du parc municipal, j'aperçois Louis et je m'arrête à sa hauteur. Je veux lui dire que je ne lui en veux pas de m'avoir trahie. Que je l'oublierai et qu'avec le temps, tout finira par rentrer dans l'ordre. Je vais connaître d'autres amoureux et d'autres aventures, d'autres moments de confiance, d'insouciance et de bonheur. Je suis une survivante. Même si je boite.

Je descends de voiture en rassemblant tout mon courage et marche vers lui, qui continue à dribbler comme s'il ne m'avait pas vue. 

— Louis !

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— Louis !

— Pourquoi est-ce que tu ne m'as rien dit pour Mme Reynolds ?

— Je voulais le faire, mais je n'en ai pas eu l'occasion, dis-je en continuant d'avancer.

— Ne m'approche pas, si tu ne veux pas que je te harcèle.

Ça, je le mérite. Hier, je l'ai giflé quand il a voulu m'aider. Mais c'était avant que je mette tout à plat dans ma tête.

— Il paraît que tu as eu des ennuis.

— Tu es venue pour enfoncer le clou ou pour une partie de foot ?

— Tu sais très bien que je ne peux pas jouer.

Il me toise des pieds à la tête.

— Oh, si, tu peux jouer, Avigaël. Peut-être pas au foot, mais tu maîtrises des jeux plus complexes.

— De quoi parles-tu ?

Il coince le ballon sur sa hanche avec un air moqueur.

— Ne me dis pas que tu as peur de moi ?

J'avance vers lui, le menton levé, pleine d'assurance.

— Je n'ai pas peur de toi.

Il me toise avec le même aplomb.

— Prouve-le.

— Comment ?

Il envoie le ballon sur le côté du terrain et fait quelques pas dans ma direction.

— Devine.

J'ai du mal à respirer, soudain.

— Je... je ne sais pas de quoi tu parles.

— Tu ne devines pas ?

— Tu veux que je t'embrasse ? dis-je le souffle court.

— Tu m'as anéanti, tu le sais, non ? affirme-t-il avant que, me hissant sur la pointe des pieds, je pose mes lèvres sur les siennes.

Me prenant par la taille, il me plaque contre lui. Je sens sa force sur mon corps. Mes doigts enserrent ses biceps. Je m'abandonne à son étreinte protectrice, à l'odeur et au goût uniques de Louis Tomlinson.

Il m'embrasse violemment. Avec colère. Je recule tout en le repoussant, chancelante.

— Que fais-tu ?

Il s'essuie la bouche du plat de la main.

— Je veux être sûr de te faire peur. C'est bien ce que tu veux, non ? Comme ça, tu peux continuer à affirmer que la victime, c'est toi.

Nous nous toisons du regard. Lequel contrôle l'autre ? L'assaillant face à la victime. Le garçon ou la fille ?

Il reprend son ballon.

— Rentre chez toi, Avigaël. Tu as eu ce que tu voulais.

C'est alors qu'un mouvement attire mon attention. C'est Lottie qui vient vers nous.

— Louis, les parents veulent que tu rentres. Tout de suite.

Je me recoiffe, lisse mon pantalon, m'éclaircis la gorge. Je fais tout mon possible pour éviter de les regarder. Puis je retourne à la voiture, aussi vite que possible.

Paradise with TomlinsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant