Lorsqu'elle rentra dans la skáli en compagnie d'Örvar, personne ne fit attention à elle. La plupart des membres du clan se préparaient à partir dès le lendemain.
Seul le Konungr la gratifia d'un hochement de tête.
Sigrún fondit sur elle avant qu'elle ne puisse faire un pas pour rendre à Erling ses fourrures.
— Eldrid ! Que t'es-t-il arrivée, ma fille ?
— J'ai... trébuché sur une pierre... en parlant au Konungr.
Sa mère adoptive la contempla d'un long regard scrutateur, l'air peu convaincu. Ses yeux finirent par accrocher la fibule dorée qui scintillait sur son épaule et qui retenait les lourds pans du vêtement prêté par le chef du clan.
— Pourquoi portes-tu sa cape ? Oh, peu importe ! L'essentiel, c'est que tu sois affranchie.
Eldrid se sentit pâlir. Elle n'eut pas l'impression de chercher le Konungr par dessus l'épaule de Sigrún. Pourtant, quelques secondes plus tard, ses yeux étaient soudés aux siens.
— Nous partirons avec Örvar et les autres en bateau, pour le Danemark, à l'aube, ajouta la femme rondelette.
Elle fixa les traits figés de la thraell.
— Qu'as-tu ?
— C'est que... je... il... je...
Les sons s'étranglaient dans sa gorge. La jeune femme pouvait nettement apercevoir Erling s'approcher d'elles. Sa mère adoptive sursauta lorsqu'il abattit une main sur son épaule.
— Vous vous direz adieu demain.
La femme devint livide, et le cœur de la jeune thraell se serra.
— Je... je ne suis pas certaine de bien comprendre... balbutia Sigrún.
— J'ai pourtant été de la plus grande clarté.
Il allait faire demi-tour, lorsque Eldrid tira sur sa tunique brodée d'argent sous les exclamations stupéfaites de sa mère adoptive. Il se retourna d'un bloc, se dégageant de l'emprise de la thraell d'un mouvement sec. Elle qui avait toujours été si révérencieuse en présence du Konungr, avait la sensation d'être au bord de l'implosion. Elle ne supportait pas que cet homme, à qui elle avait dédié tant d'années de sa vie, la rejette ainsi.
— De la plus grande clarté ? répéta Eldrid. Sans vouloir vous offenser, je ne crois pas, non.
Le Konungr plissa le front, tandis qu'une lueur menaçante fulgurait dans son regard. Cependant, il attendait qu'elle s'exprime. Eldrid n'avait jamais eu aussi peur de sa vie, mais elle se refusait à rejoindre les anglais. Örvar avait raison : elle faisait partie du clan, pas seulement parce qu'elle appartenait à leur chef, mais aussi car elle avait été élevée par eux. Ils étaient sa famille, même si un sang différent coulait dans ses veines.
— Vous souhaitez que je rejoigne les miens. Vous m'avez frappée, humiliée ! Tout ça pour que les anglais aient... quoi, au juste ? Pitié de moi ?
— C'est cela.
Le chef du clan s'était raidi. Et la thraell prit conscience du silence qui planait dans la salle.
— Je suis désolée de vous le dire, mais ça ne fonctionnera pas. Ils me tueront. Ils ne feront pas la différence, exactement comme vous autres, n'avez jamais fait la moindre différence quand vous les massacriez eux !
Elle sut qu'elle était allée trop loin avant même de voir le visage d'Erling se décomposer.
Elle crut qu'elle allait mourir pour de bon lorsqu'il l'attira à lui, dégaina son poignard et le posa sur son cou, juste au-dessus de son collier. Elle pouvait sentir une veine y battre follement.
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Thraell : jusqu'à ce que le monde s'effondre [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]
Ficção Histórica[Édité aux éditions HLAB (Hachette) sous le titre "ELDRID"] Premiers chapitres (non corrigés) disponibles sur Wattpad Angleterre, XIe siècle. Les combats entre Saxons et Vikings ravagent le pays tout entier. Eldrid est née saxonne, mais a été captur...