Chapitre 3 (partie VI - Démons)

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Apolyon avait passé toute la nuit à transformer son humaine. C'était un exercice auquel il ne s'était jamais tenté jadis, très ardu, mais il avait laissé son imagination et son pouvoir faire le travail. Et il n'était pas peu fier du résultat.

Il s'agenouilla à ses côtés et caressa son visage lilial aussi froid que le marbre. Les paupières closes, elle respirait doucement et dégageait une odeur de rose musquée qui excitait au plus haut point les sens du Démon. Sous sa forme humaine, il sentait la bosse de son pantalon grossir de plus en plus, le sang affluant dans son sexe déjà gonflé. Il n'attendait plus que sa Démone se réveille, et qu'ils s'accouplent sauvagement, passionnément, des nuits durant. Les sens tout en éveil, des pensées plus érotiques les unes que les autres, il se retint de jouir avant même de pouvoir la pénétrer.

La belle et nouvelle Démone trembla des paupières quelques minutes plus tard et ouvrit enfin les yeux. Apolyon put voir le rouge profond de ses iris, d'une couleur sang qu'il affectionnait plus que tout. Elle poussa un petit cri de plaisir, qui affola d'autant plus les sens d'Apolyon, et s'étira. Elle se redressa à l'aide de ses bras et regarda, perdue, l'intérieur de l'alcôve où elle se retrouvait. Elle se demanda comment elle était arrivée ici.

Puis, elle regarda l'homme à côté d'elle, avec ses longs cheveux noirs jusqu'aux épaules et ses yeux aussi ténébreux que la nuit, et lui sourit.

— Où suis-je ? lui demanda-t-elle.

Par les Neuf Boucliers, sa voix était aussi douce que le sable blanc d'une plage des îles, mélodieuse comme le chant d'un rouge-gorge. Apolyon ne l'aima que davantage. Rien en elle ne lui inspirait l'horreur d'un Démon, hormis son nouveau sang et son âme aussi noire que les Abysses ancestraux, plutôt la lascivité de la vénérée Maïalèle, déesse de l'Amour et du Sexe, fille du Chaos ancestral, quintessence du Désir et de la Beauté, idole incomparable de la mythologie des humains qu'il connaissait fort bien.

Apolyon se positionna face à elle sur les genoux et la regarda dans le fond des yeux. Il se retint pour ne pas l'embrasser et la fouiller de sa langue.

— Vous êtes dans mon appartement, ma lady.

— Ma lady ? Diantre non, je ne suis pas une lady. Je suis tout au plus une putain des plus bas-fonds de la société.

— Alors, vous êtes la plus magnifique putain qu'il m'ait été donné de rencontrer, mademoiselle...

À son grand étonnement, la demoiselle afficha un magnifique sourire dentée.

— Je vous remercie, sir... ?

— « Sir » ? Par l'Enfer, non. Je ne suis pas un sir. Appelez-moi Apolyon, si vous le désirez, mademoiselle.

— Apolyon. Un nom pour le moins peu commun. Enchantée, je m'appelle...

Une ombre traversa son visage. Elle chercha en vain à se souvenir de son nom, mais n'y parvint pas. Lorsqu'elle fouilla dans sa mémoire, elle ne vit que des images affreusement sanglantes : elle en catin égorgeant un homme la pénétrant ; elle étouffant un autre avec un coussin ; elle empoisonnant un énième avec de l'arsenic – entre autres assassinats. Mais elle n'en ressentit aucune tristesse, aucune peur. Cela sembla même lui plaire. Puis, elle fouilla encore, à la recherche d'une quelconque identité, celle de ses parents, d'un frère ou d'une sœur, mais ne trouva rien. Alors elle se contenta de sourire plus encore.

— Je suis navrée, je n'ai aucun souvenir, dit-elle d'une simplicité stupéfiante.

Par le Seigneur Noir, que ce sourire est magnifique, pensa Apolyon.

Les Trois Gardes, Tome I : Les Prémices du Mal [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant