Chapitre 19 : Une interlocutrice

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-Tu es réveillée ? Murmure une voix débordante de soulagement. Comment te sens-tu ?

-Ça peut aller...

-Tu veux boire ou manger quelque chose ? Demande le jeune homme.

-Oui, volontiers merci ! Répondis-je

Yanis me tend une banane et une bouteille d'eau déjà entamée. Je m'étire et me secoue un peu avant d'avancer vers la suite du chemin. Je ne veux pas perdre encore plus de temps ! Il reste cinquante mètres pour retourner sur le sommet. Yanis flotte comme une bulle dans les airs alors que je m'apprête à continuer à remonter vers la plateforme. Je pense descendre sur le dos de Yanis, c'est la dernière option. Les rochers sont glissants, je ne sais pas où mettre les pieds, une légère apparition semblable à un trou noir s'incruste dans ma tête. Heureusement, elle fait vite volte-face, mes muscles sont en compote et j'ai comme une envie de tout laisser tomber, de tout lâcher pour faire cesser ces insupportables crampes. Mais en vain je reste tout de même agrippée, soulagée une demi seconde, l'affreux tournis refait surface très rapidement. Toujours plus violent, j'ai si peur de retomber. Tout mon corps le ressent, ma précédente chute est réellement gravée. Je tremble et aborde une encoche plus ou moins stable, Yanis me rassure, il comprend mon mal être. Il me prend vite par la taille et me propulse le plus haut qu'il peut.

-Vas-y ! Mets ton pied dans le trou ! Me crie-t-il. Tu vas y arriver !

Mais d'un coup plus aucune prise à l'horizon, je suis coincée. Les encoches les plus proches sont un peu plus hautes et je n'ai franchement plus le courage de tenter de les atteindre après ma violente descente.

-Je ne peux pas passer Yanis ! M'écrie-je avec peur.

Habituellement, je suis assez sportive mais aujourd'hui mes bras sont flasques et engourdis. Avec l'aide de Yanis, je finis par m'en sortir. Depuis la falaise, j'observe mes amis virevolter, Olive s'amuse à exécuter diverses figures et danse sous le regard éberlué du Leprechaun énervé.

-Tu ne peux pas simplement rester tranquille ! Réplique-t-il en fronçant les sourcils agacé.

Assise malgré la poussière et les cailloux, je ne peux pas m'empêcher d'esquisser un sourire. Ce petit couple de créature est trop mignon. Ils me permettent de reprendre des forces. Par ailleurs, j'aperçois d'un autre œil que Yanis semble s'ennuyer et ne cesse pas de me jeter des regards furtifs. Puis soudain il décide de me rejoindre, une bouteille d'eau fraîche à la main.

-Là bas, c'est la forêt rose ! Dis-je en pointant du doigt une masse d'arbre dans la vallée.

-Nous n'arriverons pas chez le magicien aujourd'hui, suppose le garçon. Regarde, il y a une demeure juste au pied de la montagne !

-Et si elle est habitée ? Demandé-je.

-Ça m'étonnerait qu'il y ai quelqu'un, c'est un coin perdu, annoncent les deux créatures des mondes qui ont tout compte fait terminé de se chamailler.

Finalement, les oiseaux de malheur qui s'étaient éclipsés plus tôt, reviennent bientôt en force. Ils s'élancent et s'apprêtent à s'écraser comme des avions en papier. L'un d'eux a jeté son regard effrayant sur ma chevelure rousse, il va y accrocher ses grosses pattes fourchues. Je ne peux pas rester là plus longtemps ! Olive et Yanis se rapprochent et me crient de monter sur leur dos. Une jambe sur l'épaule de la fée puis une autre sur celle du jeune homme. Le triangle que nous formons flotte comme une bulle et descend petit à petit vers la verdure. Je ne suis pas du tout balancée dans tous les sens, Olive et Yanis arrivent à accorder leurs ailes parfaitement. Il n'y a que très peu d'écarts entre leurs corps et l'altitude. Le Flyivor continue de se diriger vers sa proie bien que celle-ci s'écarte de plus en plus de lui. Il siffle dans le but de signaler sa prochaine défaite à ses camarades ! Et soudainement, l'un des affreux volatiles se rapproche dangereusement de nous. Celui-là est certainement le plus rapide, il nous rattrape sans que nous n'ayons le temps de réagir. Je ne cesse jamais de vérifier ce qui se passe au-dessus de moi mais malgré mes efforts pour l'empêcher d'atterrir sur ma tête, il s'y pose subitement. Mes mouvements de bras ne l'ont pas déconcentré ni arrêté. Le Flyivor tire mes cheveux tant ils sont épais et facilement emmêlés, je ne dois pas m'exciter sinon ce sera pire, me dis-je. Chaque minuscule mouvement qu'il effectue me griffe atrocement le crâne, de plus il ne va certainement pas rester planté là. Heureusement, V est toujours libre de ses actions et vole à mon secours. Dans l'étui accroché à sa ceinture, il trouve sa flûte enchantée, l'une de celle qui pourrait malgré un sommeil profond vous ensorceler ! La musique qu'elle joue est fabuleuse, elle mêle le chant des sirènes, le bruit des vagues qui nous emportent et une mélodie grave puis sourde comme l'écho d'un son au fond d'une grotte. On est toujours tenté de bouger pour rejoindre la mer, tel un mort qui cherche à rejoindre son tombeau.

Somewhere over the rainbows !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant