Caldion (Chapitre 2)

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Caldion n'eut cependant pas le temps de reprendre la parole que sa mère pénétrait à son tour dans la petite entrée.

— Ils t'ont juste donné l'autorisation d'usage n'est-ce pas Cal' ?

Elle semblait craindre une autre réponse de sa part et il hocha simplement la tête pour lui répondre. Elle parut alors soulagée et se détourna pour regagner la cuisine où elle était en train de commander la nourriture du soir sur le programmateur.

C'était une femme d'une quarantaine d'année, au visage avenant, à la peau légèrement foncée également et aux cheveux noirs. C'était d'elle que Caldion tenait son profil typé.

Son père, qui ne rentrerait que dans une heure de son travail, n'ayant pas les mêmes horaires, était au contraire originaire d'Astra et avait la peau blanche en même temps qu'une tignasse de cheveux blonds. Un mariage comme il y en avait beaucoup sur Mars, la planète des tensions multi-culturelles mais aussi souvent capable d'accorder les différences.

Quoique son père et sa mère avaient beaucoup de points communs, plus que ne le laissaient présager leurs origines respectives, et c'était peut-être grâce à cela que leur petite famille était si soudée.

— Caldion, tu me racontes ?

Le jeune homme esquissa un sourire à l'intention de son petit frère de quatre ans qui sautait toujours autour de lui dans tous les sens et il se contenta de répondre :

— Ah ah, il n'y a pas grand-chose à dire Shan. Juste que j'ai eu ma permission pour me présenter le 48 de ce mois...

— Oh non c'est dans longtemps !

— Seulement dix jours bonhomme...

Pourtant Caldion partageait son point de vue. Éprouvant brusquement le désir d'être un peu seul pour réfléchir, il dépassa son jeune frère après lui avoir administré une gentille et très légère bourrade dans le dos avant de gagner le couloir face à lui et sa chambre, petite mais pourvue d'une couchette réglable et d'un écran mural.

Des vestiges de toutes les richesses qu'ils avaient eu de disponibles avant le cloisonnement de la planète en différentes zones.

En s'asseyant sur la couchette, rêveur, Caldion songea une fois de plus que pourtant, malgré la haine de son père et de sa mère visible pour le nouveau régime, lui le trouvait fascinant.

Derrière les dômes c'était la richesse, la technologie, l'avenir, l'ouverture au monde... Le jeune homme ne regrettait pas le passé avant l'arrivée du prince Liam.

Les cités-états n'étaient pas idyllique et aucune n'offrait le rêve de pouvoir changer ainsi radicalement sa vie comme ces mystérieux dômes et tout ce qui avait changé en trois années...

Caldion posa un regard pensif sur les murs de sa chambre, un peu sales, puis sur l'écran mural. Il espérait tellement être pris...

Mais il en doutait. À partir de dix-huit ans, toute personne pouvait se présenter au bureau gouvernemental de sa ville pour déposer une candidature pour gagner les dômes. Ce qu'il venait de faire...

Mais les candidatures retenues n'excédaient pas chaque années plus d'un millier de personnes prises sur toute la planète. Cela faisait deux ans que personne n'avait pu accéder aux dômes depuis Turrand. Caldion tentait depuis qu'il avait fêté ses dix-huit ans la veille de voir en cela un fait positif... Après tout, statistiquement, il y avait plus de probabilité chaque nouveau mois qui passait qu'il y ait l'un des leurs qui soit retenu.

Mais quelle chance pour que ce soit lui ? D'autant que cette seule entrevue accordée par le gouvernent aux demandeurs extérieur était précieuse : elle était unique. Si Caldion était recalé cette fois-ci, il ne pourrait pas se représenter.

Une voix résonna soudain au bout de l'appartement, le tirant de ses pensées.

— Salut tout le monde ! Je suis rentrée...

Il esquissa un sourire mais ne bougea pas. Il savait très bien que sa sœur aînée viendrait le voir dans les minutes suivantes, dès qu'elle aurait réussi à s'extirper de l'accueil de Shan, leur adorable petit frère un peu "pot de colle", ce qui amusait toujours Caldion mais moins ce soir.

En effet, il entendit les rires de Shan et, un instant plus tard, sa sœur entrait sans façon dans sa chambre. Elle referma la porte avec son habituel sourire enjoué et demanda en venant s'asseoir près de lui :

— Alors frérot, le moment si crucial est passé ?...

Il lui fit une grimace en réponse à son ton gentiment ironique.

— Oh, Gly' ! On ne voit pas les choses de la même façon, ne te moque pas...!

Elle se mit à rire. Elle était jolie du haut de ses dix-neuf ans, tenant plus de leur père par sa peau plus pâle mais gardant les cheveux noirs typiques des trois enfants. Elle répondit alors :

— Je le sais bien, petit frère. Je te souhaite de réussir, même si ça signifierait qu'on ne se verrait plus jamais.

Caldion n'aimait pas qu'on lui rappelle cette donnée du problème. Il ne put s'empêcher de protester :

— Si j'entrais à l'intérieur du dôme, je reviendrai vous voir...

Glycine esquissa un sourire.

— Bien sûr, et j'y compte bien. Mais pas avant plusieurs années je crains...

Là le jeune homme ne trouva rien à répondre. Sa sœur pour sa part n'avait jamais fait de demande pour participer à la sélection, et il savait qu'elle n'était pas du tout intéressée et fascinée comme lui.

Et elle avait raison, le dôme ne laissait pas sortir si facilement que cela les jeunes recrues, préférant garder un contrôle sévère des entrées et sorties.

Caldion détourna la tête et laissa échapper un soupir. Il se faisait parfois l'impression d'être tellement égoïste ! Mais sa sœur lui prit la main d'un geste amical et le rassura d'un regard.

— Vis tes rêves Cal'. Il n'y a pratiquement aucune chance que tu sois pris... Et si c'était le cas, on se réjouirait tous pour toi à la maison. J'ai eu tort de te mettre le cafard... De toute façon, même si nous étions séparés quelques temps, je suis certaine que nous trouverions un moyen de nous voir.

Elle redevint hésitante, lâcha sa main puis se décida à ajouter, retrouvant son sourire :

— Même si je ne comprends toujours pas ton désir d'aller là bas.

— Tu es trop désintéressée pour comprendre de toute façon...

Ils éclatèrent tous deux de rire devant sa réponse. Sa sœur était en effet trop généreuse pour même comprendre l'intérêt de vouloir un meilleur cadre de vie, de l'argent ou des plaisirs matériels.

Cela attirait Caldion bien sûr... Mais c'était surtout le statut mystérieux et au dessus des autres hommes qui environnait les habitants des dômes maintenant. Il avait envie de connaître cette vie de lumières, de paillettes, de féerie et de modernité face à sa cité de naissance qui ne cessait de se détériorer au fil des jours.

Il n'avait plus qu'à espérer avoir ce petit quelque chose de spécial que recherchaient visiblement les recruteurs.

Les enfants d'Astra T3 & 4 [SOUS CONTRAT D'EDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant