Eléonore (Chapitre 8)

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— Altesse, on m'a dit de vous transmettre le message qu'il y avait une urgence, une attaque sur le dôme cinquante-deux. Apparement vos soldats ont repris le contrôle de la situation.

Liam abandonna son sourire en se relevant d'un bond pour rejoindre le jeune homme qui venait d'arriver et de prendre la parole à son niveau :

— Quoi ? Une attaque ! Bougres d'imbéciles, ils vont le payer d'une sacrée répression... Mais dis donc, qui êtes vous ? Vous êtes entrés ici sans permission ?

Eléonore sentit immédiatement que Liam était à deux doigts de s'énerver, ayant perdu sa bonne humeur en apprenant la nouvelle. Mais Edward, sans bouger de son siège ni relever la tête lança :

— Laisse le tranquille, c'est mon compagnon de voyage. Je l'ai gradé lieutenant mais je n'ai toujours pas réussi à lui apprendre à toquer à une porte... Il s'appelle Carlys Hespre.

Liam se calma légèrement, mais ne répondit pas au jeune incivile avant de tourner la tête vers son frère pour expliquer tout en avançant vers la porte du salon :

— Je vais voir ce qui s'est passé exactement. Ed', je t'ai montré où se trouvent tes appartements, à côté tu as ceux pour les six personnes que tu as amenées.

Visiblement il n'appréciait pas du tout l'échantillon présent dans la personne de Carlys de l'entourage de son frère mais il n'ajouta aucun mot avant de définitivement quitter la suite d'Eléonore. Celle-ci, après s'être relevée, se retourna avec hésitation vers ses deux visiteurs restant et demanda :

— Vous resteriez prendre un verre ?

Le dénommé Carlys secoua la tête avant de se diriger vers la porte par laquelle il venait d'arriver en lâchant :

— Non, j'étais simplement curieux de vois à quoi ressemblait la compagne du tyran de Mars. Maintenant que j'ai jugé de si c'était oui ou non la plus belle femme du monde, je peux m'en aller...

Son insolence exaspéra Eléonore qui retrouva sa fougue pour crier avant qu'il ne franchisse la porte :

— Vraiment ? Et quel est le résultat ?

Carlys répondit avec nonchalance, ne la regardant même pas :

— Que c'est faux. La plus belle je la connais, elle est toujours là pour foncer chercher tous les ennuis du monde et elle a des cheveux coupés courts qui lui donnent un côté beaucoup moins jolie-poupée que toi. Au plaisir de te revoir El'.

Et il quitta définitivement le salon avec un hochement ironique de la tête. Eléonore aimait le luxe, la dévotion et la peur qu'elle savait aussi elle même inspirer. Qu'un homme qu'elle ne connaissait pas la traite ainsi, sans s'extasier devant ses beaux yeux, en la tutoyant et en la surnommant, c'était beaucoup trop à la fois.

Sa main la démangea de prendre dans le tiroir du placard mural son pistolet à fuser et de courir après Carlys pour tirer pour faire disparaître sa colère mais elle songea que ce n'était probablement pas le meilleur moyen d'accueillir favorablement le frère adoré de Liam.

Elle s'obligea donc de nouveau à sourire et se retourna vers celui-ci qui prenait un rafraîchissement sur le plateau qui venait d'être apporté par un serviteur, aussitôt reparti d'ailleurs.

Edward murmura avec un sourire en prenant une gorgée de son verre :

— Oui, je sais, il a l'art de tourner les compliments.

— Pour quelle raison le tolères-tu auprès de toi alors ?

Eléonore avait laissé la question lui échapper en se rasseyant dans son siège. Elle ne pouvait pas comprendre qu'un prince, mieux un dirigeant, accepte un semblable manque de respect. Pour un peu, cela aurait fait descendre Edward du piédestal où elle l'avait inconsciemment hissé depuis qu'elle l'avait vu discuter avec son fils.

— Par amitié je suppose. Sentiment que tu connais peu El', je me trompe ?

La jeune femme ne sut quoi répondre.

— J'ai... Je ne comprends pas ce que tu veux dire. J'ai Liam, ton frère. Mon fils aussi...

Edward reposa son verre sans la regarder avant de se relever de son siège. Elle l'imita et il reprit alors la parole.

— Mais tu n'as personne d'autre. Tu aimes trop jouer de ton pouvoir de séduction pour véritablement t'attacher et tu adores encore plus être crainte, ce que tu prends pour du respect alors que ça n'en est pas.

Comment pouvait-il avoir deviné tout cela ? Elle avait les yeux qui la piquait soudain et elle réagit en accentuant son sourire pour cacher son émotion.

— Oh je crois que tu es un peu dur avec moi Edward...

Elle se rapprocha d'un pas de lui sans vraiment réfléchir. Peut-être qu'il n'avait pas complément tort au fond... Elle aurait aimé lire dans son regard qu'il aurait voulu l'embrasser une nouvelle fois.

À moins qu'elle ne parvienne pas à oublier cette incroyable sentiment de sécurité ?

Mais Edward recula de deux pas en lâchant d'une voix furieuse :

— Arrête de faire ça Eléonore.

— Faire quoi ?

— Jouer à me séduire. Je déteste les femmes dans ton genre qui font cela...

Elle ne répondit pas, ravalant son amertume. Visiblement il se souvenait des premières années quand elle avait connu Liam et où elle était demeurée l'unique sujet de désaccord entre les deux frères.

Mais Edward s'adoucit et se rapprocha d'elle pour lui prendre la main d'un geste amical.

— Désolé de ma brusquerie. Je souhaite vraiment que nous soyons amis... Mais j'aimerais que tu évites de me regarder comme tous les autres que tu rencontres : ceux que tu cherches à séduire.

Elle ne répondit pas tout de suite. Il avait parfaitement raison au fond. Elle aimait jouer à allumer les passions, et détestait avoir été percée à jour aussi facilement en même temps qu'ignorée superbement pour la deuxième fois de l'après-midi avec Carlys.

Eléonore se décida pourtant et dégagea sa main de celle du jeune homme avant de répondre :

— Bien sûr. Moi aussi je souhaite que l'on s'entende sans malentendus.

— Merveilleux. Alors à demain, d'accord ? Là je n'en peux plus je vais me reposer mais j'ai hâte de visiter la ville, même si je déteste ce que Liam en a fait... Je souhaite par ailleurs plus discuter avec mon neveu, tu l'amèneras avec nous ?

Elle hésita et il ajouta alors d'un ton tranquille :

— Mon frère ne lui fera rien tant que j'y veillerai, ne t'inquiète pas de ça.

Elle acquiesça alors et Edward la salua gentiment d'un hochement de tête avant de quitter la pièce. La jeune femme resta seule un long moment sans bouger, le cœur brisé.

Le prince représentait ce dont elle avait toujours rêvé : un Liam qui serait un père pour son fils, aimant et protecteur. Et un mari royal tout en étant aussi présent pour elle, lui attachant une réelle importance qu'elle désirait depuis quelques années sans pouvoir l'obtenir.

Seulement voilà... Ce prince-là ne l'aimerait jamais, et de toute façon il n'était pas Liam. Il n'était pas celui dont elle était amoureuse, mais leurs images se confondaient déjà si bien dans son esprit...

Avec, ressortant de toutes les autres, l'instant où elle avait vu Edward racontant simplement des histoires à un Ivan rassuré et heureux.

Les enfants d'Astra T3 & 4 [SOUS CONTRAT D'EDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant