1 . Le dernier baiser

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Appartement, 27 Août 2015, 2h26

Lentement, un nuage de fumée s'échappait de ma bouche entrouverte. La dernière cigarette de la journée, celle que je fumais, assis sur le bord du matelas, dans le plus grand des silences. Elle avait cette saveur toute particulière, impossible à expliquer avec de simples mots, qui la rendait si indispensable. Avec elle, tous mes problèmes étaient balayés le temps de quelques bouffées, jusqu'à ce qu'elle se retrouve avec les cendres de celles qui l'avaient précédé.

Un léger grognement brisa le silence, un froissement de drap, un grincement de lit. Il passa ses bras autour de ma taille et se colla contre moi, son front contre la nuque. Je sentis alors son souffle lourd et chaud, frôler ma peau encore humide qui ne cessait de refroidir.

Des frissons parcoururent mon corps, le recouvrant de chair de poule, hérissant les poils de mes bras. Je ne comprenais pas comment ce simple contact pouvait me mettre dans cet état, mais à chaque fois, sans faute, il y arrivait.

Je passai mes mains, plus chaudes, sur ma peau pour faire disparaître les frissons, avant d'écraser le reste de la cigarette dans le cendrier posé sur la table de chevet.

Mes doigts se mêlèrent aux siens, le détachant en douceur de ma taille puis de moi. Je me retournai, observant son corps baigné par la lumière du lampadaire dehors, passant par la fenêtre restée ouverte. Je ne la fermais jamais, car elle me permettait de le voir quand j'éteignais toutes les lumières.

J'aimais le regarder. À mes yeux, il était l'être le plus beau de toute la création. Et ce soir, la sueur qui dégoulinait le long de ses muscles, redessinant ses courbes, le rendait que plus magnifique, plus désirable.


Une main posée sur les draps humides, l'autre dans ses cheveux trempés, le dos arqué, je réduisis à néant la distance qui séparait nos deux bouches. Nos langues purent alors se réunir pour une ultime danse, tantôt fougueuse, tantôt majestueuse.

Quand le souffle nous manquait, nos lèvres se séparaient l'espace d'un instant avant de se retrouver inlassablement. Je sentais ses mains remonter le long de mon dos, s'accrochant à moi pour me retenir auprès de lui. Il ne voulait pas que j'interrompe ce baiser, il me l'interdisait, mais même si je l'avais désiré, j'en aurais été incapable. Aucun de nous ne pouvait s'y résoudre, ce dernier baiser était trop précieux.

Il me fit finalement basculer, comme il savait si bien le faire, et se retrouva au-dessus de moi, prenant appui sur ses bras de chaque côté de la tête. Mes mains glissèrent sur ses flancs, se joignirent à la base de son dos, le maintenant collé contre moi. Nous savions que la danse ne durerait plus très longtemps, la fatigue envahissait la salle de bal, nos forces disparaissaient peu à peu. Nos langues se séparèrent, seules nos lèvres continuaient de danser, se cherchant, s'éloignant, se retrouvant pour finalement se quitter.

Son front se colla au mien, et nous restâmes ainsi, à écouter le souffle de l'autre, si près de l'autre et en même temps si loin. Mon cœur qui battait si vite il y a quelques instants, reprenait progressivement son rythme habituel, infiniment plus lent et silencieux.

« S'il te plaît, juste une dernière fois », me supplia t-il, au creux de l'oreille.

Ses lèvres avaient déjà retrouvé le chemin qui menait à mon cou, mais mes mains vinrent l'arrêter, bloquant sa tête sous mon menton. Il sut immédiatement qu'il ne pouvait pas aller plus loin, il abandonna.

Glissant sur le côté pour ne pas m'écraser sous son poids, il vint cacher son visage entre mon épaule droite et mon cou. Il se conduisait de cette manière pour que je ne puisse pas le voir, mais je savais qu'il pleurait. Je sentais ses larmes chaudes ruisseler le long de son nez, avant de venir finir leur course contre ma peau.

Le dernier baiserOù les histoires vivent. Découvrez maintenant