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«  Madame, je vais devoir vous demander de partir. Les visites sont terminées pour aujourd'hui », annonça l'infirmier, vérifiant par la même occasion les signes vitaux du patient.

Les doigts de la jeune femme agrippèrent un peu plus fort à la couverture du lit, au point que ses phalanges changèrent progressivement de teinte. Son regard inquiet se dirigea vers le visage de l'homme toujours inconscient. Il avait repris quelques couleurs depuis son admission, mais il était impossible pour la rousse de respirer paisiblement. Le simple fait de quitter la pièce, ne serait ce que quelques instants, faisait monter en elle une vague de stress. La peur d'entendre l'une des machines auxquelles il était relié s'affoler ne la quittait pas, malgré les dires des docteurs, lui affirmant qu'il était entre de bonnes mains. Elle ne voulait pas qu'il meure.

Elle ressentait le besoin absolu de rester là, à ses côtés, pour s'assurer qu'il s'accroche bien à la vie. Après l'avoir connu pendant plusieurs années, elle savait quel genre de personne se cachait derrière sa carapace. Il était à bout. Il souffrait. Beaucoup, et toujours en silence, très certainement par fierté masculine. Il s'était enfermé dans ce silence, et personne ne semblait en posséder la clé qui lui permettrait de s'échapper. Elle ne pouvait donc que le regarder et l'aider, enfin, le peu de fois où il lui en laissait l'occasion.

Et maintenant, en le voyant dans cet état, elle s'en voulait de l'avoir laissé la veille. Elle pensait qu'étant une adulte, qu'il était une capacité de rester seul pendant une journée, et que ce n'était pas une petite grippe qui allait avoir sa peau. Mais une petite voix lui répétait qu'elle aurait dû insister pour l'emmener aux urgences ou chez le médecin après son malaise. Il n'avait rien voulu entendre. Selon lui, des médicaments et du repos suffisaient. Il y avait déjà bien assez de malades dans les hôpitaux en cette période de fêtes. La rousse l'avait cru, et maintenant, il y était pour de bon.

« Madame ? Vous devez partir. Les visites sont terminées. » , insista l'infirmier.

La jeune femme se tourna vers lui, et hocha la tête pour lui dire qu'elle s'en allait. Doucement, elle lissa la couverture à laquelle elle s'était accrochée, en promettant à l'homme toujours inconscient de revenir le lendemain. Puis elle attrapa son sac et se dirigea vers la sortie, sous le regard de l'infirmier.

« Excusez moi. À quelle heure reprennent les visites demain ? » , lui demanda la rousse, avant que l'homme ne disparaisse dans une autre chambre.

« 14h », lui répondit-il.  


*** 


La femme fixait le téléviseur face à elle. Cela faisait une vingtaine de minutes qu'elle fixait l'écran noir de l'appareil, en tripotant un des jouets de son fils. Il était bientôt 22h, et le petit venait tout juste de s'endormir. L'enfant avait du mal à trouver le sommeil après la soirée qu'il venait de passer. Il avait insisté pour une première histoire, puis une deuxième... Et ainsi de suite pendant plus d'une heure. La jeune mère n'avait rien dit et elle lui avait lu tous les livres pour enfants de la bibliothèque. Étrangement, il ne lui avait pas posé la moindre question sur les événements.

Elle aurait dû s'estimer heureuse de ne pas avoir à lui fournir d'explications, mais elle craignait de devoir l'emmener voir un psychologue pour enfant dans un futur proche. La rouquine ne pouvait s'empêcher de penser que ce n'était pas juste d'exposer ainsi son Mister Bouclettes à la dureté de la vie. Il ne méritait pas ça, ce n'était encore qu'un enfant. Cette situation ne pourra pas durer indéfiniment, il allait bien falloir qu'elle considère son fils comme une priorité absolue, même si pour cela, il fallait abandonner l'homme à son propre sort.

Le dernier baiserOù les histoires vivent. Découvrez maintenant