Hôpital 26 décembre 2017, 14h09
Il se tenait devant l'entrée de la chambre, n'osant pas entrer à l'intérieur. La porte représentait le dernier obstacle qui le séparait de son ancien amant, et la dernière chose qui le protégeait d'une réalité qui l'effrayait. Il n'était pas sûr d'être mentalement prêt à encaisser ce qui l'attendait de l'autre côté.
Il ne pouvait pas ignorer ce pincement qui le tiraillait dans sa poitrine.
Cela faisait un peu plus de deux ans qu'ils s'étaient séparés. Cette nuit-là, ils s'étaient aimés dans une ultime danse. Une supplication. Un au-revoir. Une promesse. Et au petit matin, il était parti, l'abandonnant dans ce qui était alors leur lit. Le temps ne les avait pas attendus et a continué sa course folle. Depuis, beaucoup de choses avaient changé.
Ces années de solitude à poursuivre un rêve en apparence inaccessible, l'avaient profondément marqué. Il avait dû apprivoiser la douleur qui se nichait dans chaque recoin de son être, pour pouvoir continuer d'avancer sans craquer et ne pas s'effondrer sur le parquet de la salle de répétition.
Certains soirs, seul le souvenir de leur promesse lui permettait de continuer de danser alors que son corps et son esprit atteignaient leurs limites. Il ne pouvait pas trahir sa parole. Il l'aurait sans aucun doute pardonné, comme toujours, mais il n'en était pas de même pour lui-même. Tous leurs sacrifices n'auraient été que des efforts vains, du temps perdu et de larmes versées inutilement. C'était inconcevable.
Cette expérience l'a quelque peu chamboulé. Il a commencé à douter, se posant des questions sur ses sentiments pour cette personne dont il ne pouvait que se languir. Étaient-ils réels ou le fruit d'un esprit qui sublimait des souvenirs pour tenir le coup ?
Après cela, il lui est arrivé de s'égarer sur des chemins obscurs, puis de retrouver sa route, se promettant alors de ne plus jamais réaliser la moindre action qu'il ne pourrait pas assumer au bout du voyage. Il savait alors que le lien qui les liait était unique et véritable.
Rien ni personne ne pouvait lui faire ressentir toutes ses choses qui le parcouraient quand il le touchait, l'embrassait, s'unissait à lui. Il n'était pas qu'un simple amant. Il était tellement plus.
Il était la plus belle rencontre de sa vie. Celle qui avait rendu son cœur d'adolescent totalement fou, et qui hantait les rêves de l'adulte qu'il était devenu. Avec lui, il avait ri, vibré, pleuré, crié à s'en briser la voix, mais jamais sa main n'avait lâché la sienne. Elles étaient toujours restées liées, malgré les épreuves qu'ils avaient pu traverser. Il ne pouvait pas imaginer un futur où il n'avait pas sa place.
C'est pour toutes ces raisons qu'il ne comprenait pas pourquoi, baisser cette fichue poignée lui était aussi difficile. Mais il le fit. Son désir de le voir, d'être enfin à ses côtés, était plus fort que sa peur.
Son regard ne tarda pas à le trouver. Impossible de le manquer, couché sur un lit d'hôpital qui paraissait étrangement large pour lui.
Chaque pas qu'il faisait dans sa direction était plus difficile que le précédent. Le moment qu'il avait tant attendu était enfin arrivé. Il n'aurait jamais pensé que cela se passerait ainsi. Sous le coup des émotions qui le submergeaient, les battements de son cœur restèrent en suspens.
Il déposa son sac à dos sur sol et d'une main tremblante, il fit glisser le siège installé à son chevet pour le rapprocher un peu plus près de lui.
Maintenant, qu'ils étaient enfin réunis, il pouvait admirer le visage endormi de celui qui hantait son esprit. Dans son sommeil, il paraissait si paisible, et en même temps si triste. Il aurait aimé lui dire à quel point il lui avait manqué, et lui répéter encore et encore qu'il l'aimait. Mais il ne le pouvait pas, sinon il risquait de ne plus pouvoir étouffer ses sanglots.
Sa main glissa doucement sur sa tête, dégageant les mèches qui masquaient son visage. Progressivement, son dos s'arqua et ses lèvres rencontrèrent la peau tiède de son front. Ce baiser était le seul geste affectif qu'il pouvait se permettre. Son cœur se serra dans sa poitrine. Une larme échappa à son contrôle, et glissa le long de sa joue.
Il l'essuya discrètement avec la manche de son blouson. Il était soulagé de remarquer que la fièvre avait chuté, cela voulait dire qu'il allait déjà mieux, enfin, il espérait. Le voir dans cet état l'inquiétait. Il l'avait vu dans ses pires phases, mais cette fois-là, il sentait que c'était différent. Jamais il ne lui avait paru aussi vulnérable. Son teint lui était bien trop pâle, et ses traits bien trop creusés. Il était évident que la grippe n'était pas la seule responsable de son état.
Quand le regarder devient trop difficile, il commença à détailler ses doigts, son index effleurant lentement sa peau nu. Il survolait les cicatrices qu'il connaissait si bien et s'attarda sur toutes les nouvelles qui lui étaient encore inconnues. On l'avait prévenu qu'il s'était blessé en tombant sur des assiettes brisées, mais il ne s'attendait pas à voir autant de coupures suturées. Son avant-bras était recouvert de pansements.
Il finit par plier son doigt, et se leva de son siège. Cela devait bien faire une heure qu'il était là, et il ne semblait pas vouloir quitter le royaume des rêves.
« Continu de dormir, je reviens », lui murmura t-il avant de quitter la pièce.
***
Encore trois ou quatre chapitres et se sera officiellement la fin. J'espère avoir moins de mal à les écrire que celui ci, comme ça, vous n'aurez pas besoin d'attendre 8 semaines pour connaitre le fin mot de l'histoire...
Je vous remercies de continuer à lire cette fiction et à la prochaine !
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Le dernier baiser
Romance" Quand le souffle nous manquait, nos lèvres se séparaient l'espace d'un instant avant de se retrouver inlassablement. Je sentais ses mains remonter le long de mon dos, s'accrochant à moi pour me retenir auprès de lui. Il ne voulait pas que j'interr...