Quand je rentrai chez moi ce vendredi soir là -ou plutôt ce samedi matin très tôt- j'étais encore dans cette bulle dans laquelle je m'endormis comme un bébé. Je n'avais pas vu que la façade de la maison d'en face était allumée. Je ne me doutais pas que j'avais été aperçue...
Encore dans mon lit, j'allumai mon téléphone qui m'indiqua qu'il était onze heures passées ainsi qu'un message de celui-avec-un-smiley-qui-envoie-un-coeur.
C'était cool hier soir...suivi d'un unique coeur rouge.
Oui envoyai-je simplement. J'hésitai plusieurs secondes avant de me décider à renvoyer un deuxième sms composé seulement d'un petit smiley envoyant un coeur rose. Même si cela peut paraître peu voire ridicule, je savais -et je ne doutais pas qu'Aslinn le sache aussi- que cela représentait quelque chose. En effet c'était le premier que je lui envoyais depuis le jour où nous avions commencé à nous textoter.
Quand je descendis dans la cuisine, je fus accueillie par deux lourds regards qui s'avéraient être ceux de mes parents. Comprenant que cela n'annonçait rien de bon mais n'en sachant pas la raison, je lançai gaiement :
-Hello !
Ma mère me répondit par un "hello" pas du tout enjoué -ce qui vraiment ne lui ressemblait pas- et mon père, eh bien il ne répondit rien du tout. Il garda ce même regard posé sur moi. Quand il ouvrit la bouche, je saisis immédiatement à son ton sec et cassant que je n'allais pas tarder à découvrir la raison de cet accueil matinal pour le moins pas très sympathique.
-Claire, quand je suis allé au facteur ce matin, j'ai vu le voisin. Il dit qu'il t'a vu rentrée à minuit passé.
-Darling, où étais-tu last night ? Me demanda ma mère pour compléter les propos de mon père.
Instantanément, j'en voulu à ce vieux croûton de Kellor. C'était un vieux tout rabougris qui passait son temps caché derrière les rideaux de son salon à espionner les gens. Quelle plaie celui-là ! Bien sûr, il fallait qu'il ai une petite insomnie juste au moment où je revenais ! La bulle de hier soir explosa définitivement, me ramenant les deux pieds dans la réalité.
-Alors ? Répéta mon père qui visiblement s'impatientait et avait de plus en plus de mal à contenir sa colère.
Qu'est-ce-que j'allais leur dire ? Je mentais aussi bien que pinocchio ! Je n'avais pas le choix, je ne pouvais que leur dire la vérité.
-Je... Je n'arrivais vraiment pas à dormir, alors je suis sortie prendre l'air, mais je suis restée autour de la maison ! (un demi mensonge, ça je pouvais le faire).
Mes parents dardèrent sur moi des yeux remplis de reproches.
-Hum...murmura mon père qui visiblement n'était pas convaincu.
Heureusement je pus compter sur le soutien de ma mère.
-Bon, eh bien all is resolved ! S'exclama-t-elle avec un clin d'oeil à mon égard.
Mon père se leva, toujours en me regardant d'un oeil suspicieux puis alla rejoindre Tim qui l'appelait pour changer l'ampoule de son lustre.
-Thank you, mom, fis-je à ma mère.
Elle me répondit par un grand sourire.
Le lendemain, c'est avec joie que j'acueillis la visite hebdomadaire chez mes grands-parents maternels. J'avais passé quasiment toute l'après-midi ainsi que la soirée du samedi le nez dans mes cours -j'avais enfin réussi à me fourrer dans le crâne la tectonique des plaques, hourra!
Après le copieux déjeuner, alors que les adultes bavardaient dans la salle à manger, j'étais allée me peletonner devant la cheminée dans un immense fauteuil moelleux. Je crois qu'après ma chambre et la plage, le salon de mes grands-parents était le troisième endroit que je préférais sur Terre. Bien qu'il soit assez petit et exigu, il s'en dégageait une espèce d'intimité rassurante. Hypnotisée par la danse des flammes rouges, je ne vis pas tout de suite la silhouette dans le jardin des voisins. Quand je tournai la tête, je ne la reconnus pas, la personne qui se cachait derrière portait un épais manteau noir et avait la capuche rabbatue sur la tête. Bizarre de sortir par ce temps, me dis-je intérieurement. Qui sortait dans son jardin le premier décembre alors qu'un froid mordant emplissait l'air ? Intriguée, je sortis du fauteuil -avec la couverture en laine sur le dos- et me glissai près de la baie vitrée. Tu es en train de faire comme le vieux Kellor là ! Me réprimanda ma voix intérieure. Je ne l'écoutai pas et me rapprochai de quelques centimètres.
La personne sortit alors un briquet qu'elle amena au niveau de son visage. Je compris alors pourquoi elle était dehors. Seulement, lorsqu'elle se retourna et que je vis de qui il s'agissait, je n'hésitai pas et sortis en chaussons dans le froid.
-MAIS QU'EST-CE-QUE C'EST QUE ÇA ? M'exclamai-je en faisant sursauter celui qui me faisait face.
-Qu'est-ce-que ça peut bien te faire ? Répliqua Harry en tirant une bouffée.
-Mais Harry, qu'est-ce-que tu fais ? Tu dérailles !
Harry me regarda par-dessus ses lunettes en haussant les épaules.
-Mais...mais... Pourquoi ? C'est toi-même qui disait que fumer c'était n'importe quoi ! Je croyais que l'odeur de cigarette te dérangeait ! Fis-je, vraiment perdue.
-Bah j'ai changé vois-tu. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent jamais.
-L'imbécile en ce moment c'est toi ! Répliquai-je d'un ton cassant.
-Je ne t'ai rien demandé ! Laisse-moi, OK ? Fit Harry, qui commençait à s'énerver.
-Harry, tu ne peux...
-LAISSE-MOI ! Me coupa Harry qui était en train d'exploser. Retourne à tes affaires tu veux ? On n'est pas en couple que je sache ?
Je restai pétrifiée sur place. Je ne l'avais jamais vu comme ça.
-Aller ! Reprit-il en chassant l'air devant lui. Au fait, pour la danse j'arrête tout, j'ai bien compris que je ne serais jamais le bon partenaire pour toi.
Blessée et avec un fort sentiment d'incompréhension, je retournai dans le petit salon aux allures de cocon et fermai les épais rideaux rouges.
Je ne voulais pas voir Harry se détruire.
Je ne voulais pas le voir se détruire à cause de moi.
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Un joli triangle
Teen FictionClaire vient d'emménager en Irlande, terre natale de sa mère. Heureusement pour elle, elle va très vite s'intégrer dans une bande d'amis composée des pétillants jumeaux Fitz et du grand (et pas désagréable à regarder) Mckellen. Une nouvelle arrivée...