Chapitre 4-1

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Devant mon mutisme et ma détresse évidente, je sentis mes compagnons commencer à s'agiter. Même Connie, qui était restée tout le temps auprès de Connors, se leva.

— Retournons déjà aux abords de la ville, annonçai-je d'une voix mal assurée.

— Tu ne sais pas comment tu as fait la première fois, c'est ça ?

La voix d'Elana résonna sinistrement sur les parois de la caverne, reflétant parfaitement ce que tout le monde supposait et craignait. J'étais partagée, je redoutais leur réaction si je leur avouais la vérité mais, dans notre situation actuelle pourrie, à quoi bon mentir ?

— Tout s'est passé tellement vite lors de notre...fuite que...j'ai agis d'instinct, bredouillai-je mal à l'aise. Mais je suis certaine que dans les bonnes conditions, j'y parviendrai de nouveau, dis-je d'une voix plus affirmée au fur et à mesure que les mots sortaient de ma bouche.

— Et on est censé te croire sur parole, parce que...susurra la voix venimeuse de Lada.

— Parce que tu n'as le choix ! Mais si tu préfères rester seule ici à attendre de te faire bouffer par des oiseaux mutants, libre à toi ! explosai-je avant de sortir de l'abri rocheux d'une démarche plus qu'énergique.

Là elle dépassait les bornes, fulminai-je intérieurement. Je pouvais comprendre son inquiétude pour Connors, puisque je ressentais la même peur et douleur insoutenable au fond du cœur, mais sa méchanceté était gratuite et ça j'avais du mal à le digérer.

— Elle ne pense pas ce qu'elle dit, elle est effrayée c'est tout, me dit gentiment Isy en me rejoignant à l'extérieur.

— Parce que nous on ne l'est pas peut-être ? lui rétorquai-je toujours ulcérée. Mais si tu le dis, ajoutai-je d'un ton sceptique et fatigué.

— Tu pensais ce que tu disais...tu pourras nous faire tous retourner derrière le dôme ?

— Je l'espère et je ferais de mon mieux, mais...

— Tu n'es pas convaincue que ce soit la solution, termina O' à ma place en nous rejoignant à son tour.

— Pas à long terme, non. Et puis...même si je parviens à nous faire tous retourner là-bas, on ne sait pas ce qu'il s'est passé exactement...et si...

— Il sera bien temps de s'en préoccuper une fois à l'intérieur, tu ne crois pas ? intervint Elana, croyant de toute évidence bon, de venir ajouter son grain de sel.

Je ne me retournai pas, assaillie par tout un tas de sentiments contradictoires, je ne voulais pas leur montrer ma faiblesse ou risquer de péter les plombs. Je pourrais dire des choses que je regretterais par la suite. J'étais tellement déchirée, apeurée, blessée, perdue, que j'avais du mal à faire le tri dans mes émotions. Nous avions finalement réussi à quitter cette ville et se dôme infernal qui était devenu une prison, pour finalement nous retrouver dans une autre. Ici pas de murs, ni d'air toxique mais une nature inexplorée et sauvage qui nous tuerait tout aussi facilement que les gardes du conseil.

J'étais prête à tenter le coup, quelque part au fond de moi, je savais que j'y arriverai. Peut-être pas du premier coup et peut-être pas facilement, mais j'y parviendrai. Néanmoins la question qui me taraudait était, devais-je conduire sept personnes à une mort certaine pour peut-être n'en sauver qu'une seule ? Même si nous nous connaissions à peine, je tenais à Connors, d'une manière que je ne m'expliquais pas vraiment. Devoir envisager la possibilité de le laisser mourir ici sans rien faire, était...inacceptable, compris-je soudain, prenant enfin la seule décision qui s'imposait depuis le début. De plus, si nous restions là, blessés et sans armes, le pronostique n'était pas très optimiste non plus !

— Connors est transportable ? demandai-je en me retournant enfin.

— ça ira, m'affirma Blake en sortant du refuge, Connors bien calé sur son dos, ses bras et ses jambes entravés avec des cordes de fortune pour ne pas qu'il tombe.

— Vous venez d'avoir une commotion cérébrale...vous ne devriez pas faire ça.

— Vous avez une autre solution ? Nous ne sommes que trois hommes à peu près valide et je suis le seul ayant la carrure nécessaire pour le porter sur cette distance. Alors au lieu de perdre du temps, allons-y.

Devant l'évidence de son petit discours, je ne discutai pas davantage et une fois tout le monde à l'extérieur, Ophélia prit la tête de notre petit groupe d'éclopés pour nous guider jusqu'au dôme. Le trajet était éprouvant, le soleil haut dans le ciel à cette heure de la journée dardait implacablement ses rayons, nous écrasant de sa chaleur. Je sentais la sueur dégouliner dans mon dos, mes cheveux et sur mon visage. Elle s'insinuait partout, recouvrant mes différentes égratignures d'une pellicule salée qui semblait me dévorer la peau et me brulait atrocement. Nous étions enfin en vue de notre camp dévasté, quand Ophélia laissa les autres la dépasser pour se retrouver à ma hauteur.

— Sois franche avec moi, me dit-elle de but en blanc mais d'une voix volontairement sourde pour ne pas être entendu des autres. Pourquoi nous mentir et nous faire quitter un abri relativement sûr alors que tu sais pertinemment que tu ne pourras pas nous ramener ?

— Pourquoi affirmes-tu cela ? lui demandai-je sincèrement surprise par sa véhémence et sa certitude.

— Tu as bien dû le remarquer toi aussi, non ?

— Remarquer quoi ? lui demandai-je énervée par ses tergiversations.

— Que nos pouvoirs ne fonctionnent plus ici ! s'exclama-t-elle d'une voix agitée.

— On l'a supposé quand Lynch a voulu...

— Et alors, comment comptes-tu nous ramener de l'autre côté sans le...je ne sais quoi, qui t'a permis d'y parvenir la première fois ?

J'étais sensée être quelqu'un de réfléchi et d'intelligent...comment avais-je fait pour passer à côté de ça ! Et apparemment il n'y avait pas que moi, puisque Ophélia semblait être la seule à avoir réussis à relier A avec B !

— Tu n'avais pas pensé à ça, hein ? me demanda-t-elle dans un petit rire sans joie, devant mon air ébahi et consterné à la fois.

Durant les quelques derniers mètres qui nous séparait des autres, je marchais comme une automate, mon cerveau turbinant à cent à l'heure mais paraissant surtout tourner dans le vide. Ophélia, toujours à mes côtés, ne disait rien mais je voyais bien l'inquiétude et la résignation gagner davantage ses traits à chaque seconde qui passait.

— Très bien Hayden, où veux-tu te placer pour ta tentative ? me demanda soudain Lynch, me sortant de mes réflexions stériles.

— À l'endroit où nous sommes arrivés, lui répondis-je sans hésiter mais d'une voix absente, toujours perdue dans mes pensées.

— Quoi ? Mais c'est idiot, tout a explosé ! la ramena une nouvelle fois Lada, qui vraiment commençait à me courir sur le système !

— Justement ! C'est à peu près le seul endroit où ils ne nous chercheront pas. Sans compter que le reste du périmètre accessible dans le peu de temps dont nous disposons est clos de murs de béton, ajoutai-je d'un ton moqueur en la foudroyant du regard. 

Elle se tut et tout le monde fit de même, se contentant de m'observer en silence.

— Tu veux tenter d'emmener Connors dès le premier essai, ou...

— Non, je vais essayer seule, interrompis-je brusquement Lynch, toujours embourbée dans les interrogations insolubles soulevées par Ophélia. C'est plus sûr, ajoutai-je en commençant à me diriger vers le mur éventré.

Les autres ne me suivirent pas, respectant mon besoin de solitude. À mesure que j'approchai de la structure ravagée, protégée du bouclier invisible qu'était le dôme, je sentis une certitude absolue enfler en moi. Cet endroit nous avait privé de nos dons, mais j'allais y arriver...il le fallait !

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Voilà, nouveau chapitre ! Les idées se réorganisent, la trame prends forme, les idées fusent...c'est reparti !!^o^!!

Bisous, bisous *-*

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant