Chapitre 3

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Vendredi 6 avril

Qu'est-ce qu'elle me fait...?

  Je vois Iris arriver vers moi en courant. Elle me fait des grands signes, inutiles puisque je l'ai vue.

  Je lui répond quand même d'un léger sourire. Elle semble très enthousiaste.

  La blondinette s'arrête devant moi, essoufflée. Elle brandit son carnet à listes. Parce qu'en plus des cacahuètes dans sa chambre, elle a une autre manie : les listes. Et pas question que quelqu'un jette un oeil dedans, pire qu'un journal intime.

  Il lui arrive parfois de me faire part de certaines à l'oral, mais rarement dans leur totalité.

  - Je pense que tu as fini ce que tu voulais faire, je me trompe ? Je lui demande.

  - Et ouais ! Ahah, ma liste est complète !

  - Et je peux savoir sur quoi elle porte ?

  Elle ouvre son carnet et lèche le bout de son doigt - beurk - avant de tourner les pages. J'essaye de me pencher légèrement pour voir quelque chose, mais elle cache aussitôt la page en collant le cahier contre elle.

  - Maiiis je t'ai déjà dit de pas regarder ! Me reproche-t-elle en fonçant exagérément les sourcils.

  - Oui, désolée. T'as trouvé la page ?

  - Yep, c'est là !

  Iris place son carnet à la verticale, devant son visage.

  - J'ai appelé cette liste : "Plan de génie pour que Gabrielle fasse tomber Hugo amoureux d'elle" !

  Je ris. J'ai bien envie d'en savoir plus.

  - Et par quoi on commence ? Dis-je en haussant les épaules.

  Elle me regarde par-dessus la couverture, très heureuse que je sois intéressée par son travail.    

  Soudain elle fait un tour sur elle-même et pointe quelque chose derrière moi.

  Devinez quoi, c'est Hugo.
 
  Il vient d'arriver au lycée, tout beau tout propre, et discute avec des amis à lui. C'est amusant car il les dépasse tous d'au moins une tête.

  - Va lui faire un compliment !

  J'hausse les sourcils. J'attends qu'elle me dise que c'est une blague. Dites moi que c'est une blague. Mais oui c'est une blague.

  Elle continue de pointer Hugo en sautillant.

  - Sérieux ? Je demande, incrédule.

  - Bah oui, c'est sur la liste. Rétorque-t-elle comme s'il s'agissait de la chose la plus naturelle du monde.

  Ce n'est malheureusement pas une blague.

  - Mais il est avec pas mal de gens que je connais pas...

  - Oooh te bloque pas pour ça ! Aller fonce !

  Et elle me pousse vers le groupe.

  Pourquoi ai-je accepté son plan ? J'ai horreur de parler devant des inconnus - je vous laisse imaginer en classe... - et en plus c'est pour faire un compliment gratuit à mon meilleur ami que j'aime à sens unique !

  J'hésite à filer ni vu ni connu mais... Hugo m'a vue. Il me fait signe de la main. Plus de retour en arrière possible.

  Mon coeur bat fort, je me force à avoir l'air de bonne humeur et me rapproche de lui.

  - Salut Gabri ! Ça va ? S'enquiert-il.

  Pense compliment. Compliment. Compliment. Compliment.

  - Tu as... de beaux sourcils aujourd'hui.

  Quelle truffe. J'aurais difficilement pu faire pire.

  Tous ses potes se moquent de moi. J'ai envie de m'enfoncer dans le sol.

  Lui se contente de son sourire en coin.

  - Merci, mais que me vaut ce magnifique compliment matinal ?

  - Rien.

  - Dans ce cas... Il fait mine de réfléchir un moment. Tu as de belles baskets aujourd'hui, elles sont nouvelles ?

  - Oui, merci. T'es le premier qui le remarque.

  Et je rigole, alors qu'il n'y a rien de drôle.

  Mais je suis contente, il a vu mes nouvelles chaussures.
 
  Nous avons à peine le temps d'échanger deux-trois mots au sujet de mes baskets que la sonnerie retentit. Je retourne donc voir ma meilleure amie, qui griffonne je sais pas quoi dans son carnet. Je sens ma journée illuminée, je souris toute seule.
 
  - Alors ça s'est passé comment ? Me questionne-t-elle

  - Du tonnerre !

  Oui cette expression ne mérite pas de sortir de ma bouche, mais dans le feu de l'action c'est ce qui m'est venu.

  - Tant mieux ! Et j'espère que tu es prête parce que pendant que je mettais à jour ma liste des "Gens qui méritent une baffe que je ne leur donnerai pas", j'ai eu une idée géniale pour ce week-end !

  Attends... Quoi ?

  - Parce qu'il faut que je m'investisse même le week-end ?

  - La drague est un travail à plein temps ma chère amie. Récite-elle en levant le doigt.

  Je soupire. Je pense qu'on a pas fini.

Quand l'amour va tout vaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant