15. L'ombre d'une menace

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   Lorsqu'il avait entendu pour la première fois parler de la Brèche et de Fort Schrade, on lui avait dit que tout était prévu avant le départ et que n'importe quelle situation avait été calculée. A présent il sentait au plus profond de lui que l'homme qui lui avait dit tout cela n'avait assurément jamais mis les pieds dans cette forteresse. Il avait fait face à tant de situations imprévues qu'il n'avait aucune idée de ce qui l'attendait pour la suite. Il renouvela ses sortilèges de protection contre les attaques physiques et magiques et se leva. Après s'être assuré de l'inviolabilité de ses quartiers, le magicien se rendit comme chaque jour au poste de commandement où se trouvait le commandant Griff. Sur le chemin il observa les soldats faire leurs rondes d'un air pensif. Il songeait à cet armagicien. Dès le premier jour de l'expédition il avait été rejeté et méprisé. Lui-même désapprouvait la participation d'Ethan de Thorn. Mais ils s'étaient tous lourdement trompés et aujourd'hui les actes de celui que l'on surnommait le tueur de mages l'avaient rendu célèbre et beaucoup le considéraient comme un héros. Le magicien devait admettre qu'il s'était quelque peu fourvoyé sur son compte. Sans lui ils auraient probablement péris plus d'une fois ou au moins perdus une grande partie de leurs troupes. Désormais il recherchait en lui-même ce qu'il avait mal fait. Quelle erreur Doegray avait-il pu commettre pour que la cité se retrouve dans de telles situations. Il avait un esprit rationnel. Il ne prenait jamais de décisions hâtives sans réflexions mais à plusieurs reprises il avait dû se reposer sur Ethan. Son arrivée au poste de commandement le sorti de ses réflexions.

   -   Bonjour commandant Griff. Dit-il sur un ton solennel.

   -   Bonjour à vous Doegray. Comment va la cité aujourd'hui ?

   -   Rien d'anormal.

   -   J'ai appris qu'Ethan de Thorn avait survécu.

   -   Oui.

   -   J'en suis ravi. Des nouvelles des Orcs ?

   -   Non, ils se tiennent tranquilles pour le moment.

   -   Bien. Doegray, je dois vous dire que je vous suis redevable pour avoir mené les dernières opérations sans moi.

   -   Ce n'est pas un problème.

   -   Je me doute que tu dois te demander pourquoi je suis si souvent absent.

   -   Eh bien commandant, je suppose que cela ne me regarde pas.

   -   Je vois, continue de faire ton travail consciencieusement, nous en reparlerons.

   -   A vos ordres.

   Doegray sortit de la pièce. Les activités de Griff étaient en effet une grande source de questionnement pour lui. Mais fouiner dans les affaires de ses supérieurs n'était pas dans ses habitudes. La citée tournait très bien comme cela après-tout. Il se mit à marcher dans celle-ce pour constater les dégâts de la tempête. Certains bâtiments étaient en ruine, d'autres avaient seulement été endommagés. Mais beaucoup n'avaient subits que de faibles dommages de par leur solidité. Les réparations étaient en cour et occupaient une partie des troupes sous la direction de maçons et d'artisans. Ne pas laisser les troupes sans activité était également une besogne à l'importance non négligeable. Un homme occupé est un homme qui ne se rebelle pas. Il accéléra le pas et atteignit la muraille pour contempler une nouvelle fois les grandes plaines désertiques autour du fort. Il repensa à ce qu'avait fait Loyra Herfang pour sauver l'armagicien. C'était de la folie, sans doute une première. Il avait déjà lu ou entendu quelques récits sur l'âme humaine mais jamais il ne pensait un jour assister à ce genre de chose. Lui-même aurait aimé connaître la nature de l'âme humaine et comprendre le lien particulier qui l'unit au corps et à l'esprit. Mais pour le moment il devait veiller sur cet endroit. Il était quelque peu déçu que le corps de l'Ifrit se soit intégralement désintégré. Il aurait aimé l'examiner, et connaissant Kelilt, ce dernier aurait donné n'importe quoi pour le disséquer.

Blue Sword (Tome 1) - Fort SchradeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant