Top départ dans une course contre la mort

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 La jeune fille plie soigneusement ses habits froissés. Un pull en laine tricoté par elle même l'hiver dernier, quelques sous-vêtements usés par le temps et deux tee-shirts trouvés dans un magasin abandonné. Le lieu en question, où jonchaient débris, ordures et briques, étaient habités par des sans-abris qui gardait cet endroit comme une forteresse. Ce n'était qu'au prix d'une ruse perfide qu'elle avait reussi à dérober à une femme encore plus maigrichonne qu'elle ces habits.

 Pour le voyage, elle aura un maximum sur elle. Afin d'avoir un minimum à transporter. En regardant par la fenêtre elle aperçoit de lourds nuages gris en provenance des montagnes, qui s'approchent. Les arbres sont ballottés comme de vulgaires brins d'herbe et leurs branches sont secouées avec violence. La fine couche de neige qui tapisse le sol s'épaissit de jour en jour ce qui fait soupirer l'adolescente.

 Soudain, un homme surgit dans l'encadrement de la porte d'entrée, les bras chargés de médicaments, et le souffle court. Tout en tentant de le reprendre, il recommande à la fille de se hâter.

 "Nous serons partis dans une heure, que tu sois prête ou non, dit-il.

 Sur ces paroles peu chaleureuses, il repart en courant.

 La fille se précipite alors sur son armoire et en sort son carnet et ses stylos .

 Ce carnet qu'elle a reçu pour ses quatorze ans, il n'y a pas si longtemps, représente pour elle un  amour qu'elle n'a jamais reçu. Elle y a relaté le jour où elle a appris que les habitants du pays immunisé avaient découvert une solution. En fait, ce carnet représente bien plus qu'un simple amour inexistant. Il représente l'expérience d'une fille qui survit dans un monde qui meurt. D'une fille qui a vu. Qui a vu la mort. Qui a vu l'espoir. Qui a vu la déception. Il représente une partie de l'Histoire

 Puis après une intense réflexion, les larmes lui viennent aux yeux. Ce journal est une partie de sa vie. Minuscule mais sûrement la plus importante qu'elle n'a jamais eu et n'aura jamais.

-"le strict minimum", récite-t-elle en se remémorant les paroles du conducteur qui avait été très strict à ce sujet.

 Puis elle repose le carnet dans l'armoire. Elle essuie d'un revers de manche les gouttes qui perlent à ses yeux ambrés puis ferme sa valise qui ne contient quasiment rien. Tout en attachant ses cheveux roux qu'elle a soigneusement lavés la veille en sachant pertinemment qu'elle n'en aurait sûrement pas le luxe dans les jours suivants, elle repense aux derniers. Et alors qu'elle est plongée dans ses pensées, noyée dans un océan de souvenirs, inondée par un flot de sentiments confus, une enfant plus jeune vient toquer à  sa porte.

-J'arrive... râle la première

-Je... je ne suis pas là pour ça, murmure la seconde en balbutiant. Je suis venue voir Sonia .

 L'aînée l'interroge alors du regard. La fillette a les cheveux si longs que même tressés, ils lui chatouillent les hanches. Et leur couleur sombre ne colle pas avec la timidité et l'innocence de son regard clair.

-Je ne te connais pas... marmonne la grande en fermant à clé l'armoire. Mais je suis effectivement Sonia. Que fais tu ici ? siffle-t-elle.

-On ne reviendra sûrement  pas ici, coupe l'autre avec une étonnante clairvoyance. Alors pourquoi tu fais ça? interroge-t-elle en désignant du menton le meuble.

-Je...Ça me regarde, rétorque la dénommée Sonia.

 La petite rougit en baissant la tête. Sonia, peu bavarde et encore moins sociable, jette un dernier coup d'œil à sa chambre.

 Son lit n'est qu'un simple matelas rongé par les mites. La fenêtre est l'une des rares de l'immeuble à être intacte et surplombe la cour, où les camions sont prêts à partir . Les murs sont abîmés, la tapisseries arrachées et l'unique table de la pièce  est une banale planche posé sur une caisse en bois. Mais c'est là qu'a vécu Sonia aussi loin que ses souvenirs remontent. Et l'idée de tout abandonner pour partir sans aucune ceritude quant à ce qui les attend sur la côte la terrifie. Puis son regard se pose sur l'enfant qui se tortille comme une chenille.

Solution finaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant