Chapitre 23 - Un jeu dangereux

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NP : Too Close - Ariana Grande

PDV Emmanuel

Je m'efforçai de continuer mes visites sur le salon et de rester professionnel. L'intervention du reporter de Quotidien ne me disait rien qui vaille. Je savais que s'il avait choisi d'interviewer Helena à ma place, c'est parce que la rédaction de l'émission avait une idée derrière la tête. J'espérais juste qu'il ne lui aient pas posé de questions trop indiscrètes. C'est à vrai dire ce qui me faisait le plus peur. Elle n'avait pas été habituée à répondre aux questions – c'était une erreur de ma part, je m'en rendais compte aujourd'hui – et avait dû perdre ses moyens. Alors que je discutai avec d'autres entrepreneurs, je ne pouvais m'empêcher de jeter quelques regards inquiets dans sa direction.

Elle faisait son travail, comme à son habitude, mais affichait un air préoccupé sur son visage et se retournait régulièrement pour vérifier que nous n'étions pas suivis, malgré la présence de Makao qui veillait aussi à ce qu'il n'y ait pas de débordements. Je croisai le regard d'Helena brièvement, décelant une lueur d'inquiétude dans ses yeux verts. Elle semblait résignée et avait l'air de s'en vouloir. Je me mordis la lèvre inférieure, stressé, et écourtai la conversation que j'avais avec un membre de la French Tech avant de l'emmener à l'écart. Il fallait que je sache quelles questions le journaliste lui avait posé.

Le salon était noir de monde et nous marchâmes quelques minutes avant de trouver un coin tranquille pour discuter. Des minutes qui me semblèrent interminables tant l'expression sur le visage d'Helena m'inquiétait. Nous nous assîmes à un comptoir où on nous servit du café, parfait alibi pour cette discussion qui se devait d'être discrète. Je touillai mon café calmement, observant les quelques personnes autour de nous, cherchant inconsciemment la présence de journalistes, avant d'en boire une gorgée puis je capturai le regard d'Helena avec le mien, une moue inquiète sur le visage, ce qui lui fit comprendre que je voulais lui parler de son entrevue avec le journaliste de Quotidien.

"Que t'a-t-il demandé ?", m'enquis-je dans un murmure, jetant de nouveau un coup d'œil autour de nous pour m'assurer que nous n'étions pas écoutés.

"Il a commencé par me parler de Benoît Hamon.", me dit-elle les yeux baissés, passant sa main contre sa nuque d'un air gênée.

"Ah ?", m'étonnai-je, les sourcils froncés.

"La semaine où tu n'étais pas au QG, j'étais allée à son meeting à Montreuil.", m'expliqua-t-elle. "J'y étais avec ma sœur, tu sais. Je ne pensais pas qu'on allait me reconnaître et encore moins que l'on allait me filmer. Je ne les ai même pas vu faire, d'ailleurs.", continua-t-elle, l'air désemparée. "Je suis désolée, j'espère que ça ne va pas te porter préjudice.", dit-elle en levant son regard vers moi, son visage se muant en une moue inquiète.

"Ne t'inquiète pas.", souris-je faiblement, attendri par l'expression sur son visage. "Que leur as-tu répondu ?", demandai-je tendrement.

"Ils pensaient que j'y étais pour le compte d'En Marche alors je leur ai dit que ce n'était pas là et que je pensais avoir le droit à une curiosité politique en dehors de mon travail. Ensuite, il m'a demandé si je te soutenais à 100% alors j'ai dit oui. Je ne sais pas s'ils me croiront.", me répondit-elle d'un air désolée.

"Ça devrait le faire.", hochai-je la tête, rassuré. "Tu semblais inquiète, c'était seulement à cause de ça ?", m'enquis-je, penchant la tête sur mon épaule pour la regarder.

"Hé bien, je...", bredouilla-t-elle, le regard fuyant. "J'ai..."

Pendant de longues secondes, mon regard fut attiré par ses mains qu'elle triturait, l'air stressée, puis remonta naturellement vers sa lèvre inférieure mordue puis vers ses yeux émeraude qu'elle leva lentement vers moi, l'air impuissante. Mon instinct aurait été de prendre ses mains dans les miennes pour la rassurer et il me fallut un effort surhumain pour ne pas le faire, me rappelant de la présence possible de journalistes aux alentours. À la place, je capturai de nouveau son regard et l'observais d'un air curieux, censé l'intimer à parler.

His Fate | Emmanuel MacronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant