Don't Run Away / VF

Chapitre 1 - Love who love you back

Les écouteurs vissés aux oreilles, je regardais le ciel défiler à travers la fenêtre de l'autobus. Le front collé lamentablement contre la vitre, je louchais sur les gouttes d'eau glissant sur la surface lisse. Quoi de plus normal que la pluie, ici ?

Snoqualmie, petite bourgade de l'État de Washington, perdue dans quelques immensités de forêts humides et de pâturages verdoyants, est connue pour ses chutes d'eaux splendides. Mais généralement, rien ne s'y passe.

Le ciel, encore bien sombre, commençait à montrer quelques reflets grisonnants à l'horizon. Je lâchais un soupir alors que le bus se stoppait.

Ma vie était plus plate qu'une feuille posée sur une table, je sais où je veux aller, mais je ne sais ni quand je le pourrai ni avec qui.C'est bien triste d'ailleurs.

J'aimerais quitter ma vie morose, partir loin de cette ville puant la solitude.J'aimerai aller à l'Université, pour ce qu'on en dit, ça semble bien mieux que pourrir dans un lycée une année de plus, ce qui est mon pitoyable cas : Je redoublais mon année de terminale, j'avais loupé mon baccalauréat à peu de choses. C'était donc pour la plus grande déception de mes parents et pour mon plus grand malheur que je retapais, sans bagages pour me présenter dans une Université et sans diplômes. Aucune d'elles ne m'aurait accordé une bourse. En faite, aucune d'elles n'aurait lu mon dossier entièrement.

Déçue et contrainte de rester sur place alors que d'autres voguaient vers des horizons plus ensoleillés, je souffrais la solitude de l'intérieur.

Je descendais les marches du car comme un automate et me dirigeais en trottinant jusqu'à l'intérieur. Une fois au sec, je fis glisser la capuche de mon imperméable de sur ma tête et replaçais mes cheveux avant de poursuivre ma route à travers les couloirs du lycée complètement déserts.

Je faisais face à la dure réalité seule, puisque, qui dit obtention du bac dit départ pour l'université la plus loin de chez soi, mes amis sont tous partis. Et moi je suis là, figé dans le temps une année encore.

Je rabattais la porte de mon casier et me dirigeais vers la salle de musique, le nez planté sur mon écran de portable où aucune nouvelles ne circulaient. Tous les matins, je me débrouillais pour prendre le premier bus qui me faisait arriver presque une heure en avance.

Je balançais mon sac à bandoulière sur les tables et ôtais mon manteau mouillé avant de prendre place devant le grand piano. Je soulevais le cache et frôlais les touches du bout des doigts. Mes doigts écrasèrent soudain les touches dans une mélodie que je connaissais très bien, celle sur laquelle je m'entraînais depuis des mois maintenant. A peine les premières notes de New Moon résonnèrent dans la salle déserte, mon cœur fit un bond. Mes doigts jouaient sur les touches jusqu'à ce que je pose la dernière note de façon magistrale. Je me préparais pour un second morceau quand un bruit sourd me fis sursauter.

Je me retournais brusquement, les sens en alerte et constatais avec un frisson que la salle était aussi vide qu'elle était quand j'étais entrée. La seule différence notable était la porte presque grande ouverte alors que j'avais la sage habitude de la rabattre.

Bondissant sur mes pieds, je décidais de quitter la pièce au plus vite. Je baissais le cache et récupérais mes affaires presque en urgence avant de sortir et de courir dans le couloir. Je jetais un coup d'œil derrière moi et, en me retournant, tournant à une intersection, je heurtais un corps à m'en couper le souffle. Perdant l'équilibre, je reculais, la main sur le torse.

Il attrapa mon poignet et m'attira à lui fermement. Le souffle court,je tentais de me dégager de ses bras. Levant les yeux vers son visage, je me stoppais quand je rencontrais son regard. Une décharge électrique traversa mon corps et un frisson parcourut mon échine. Ses yeux, d'un marron simple mais profondément intense, étaient brillants et expressifs. Je vis ses lèvres bouger mais je n'entendais aucun son.