「 CHAPITRE VINGT-CINQ 」

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AURA ESPINOSA

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AURA ESPINOSA

24 DECEMBRE 2015


    Je ne savais pas vraiment ce que je faisais là. Peut-être parce que j'avais réfléchi toute la journée à ce que ma mère m'avait dit. Peut-être que ça pourrait m'aider à aller de l'avant et à ne plus ressentir cette douleur dans ma poitrine. La douleur qui me rappelait sans cesse ce que nous avions vécu plusieurs mois plus tôt et les épreuves que nous avions dû affronter par la suite.

     Tout ce dont j'étais certaine, c'était que j'étais bel et bien là, devant cette vieille porte qui grinçait. J'étais nerveuse. Mon estomac était noué, ma respiration saccadée malgré tous les efforts que je faisais pour rester un minimum calme. Mes doigts dans les poches de mon manteau étaient devenus complètement moites. J'étais dans tous mes états avant même d'être entrée.

     Je ne pouvais pas me permettre de faire marche arrière. Je n'avais pas le droit. Pour moi, pour Coleen, pour tout le monde. Je devais y arriver même si je devais souffrir. C'était peut-être un mal pour un bien au final.

     Après un long moment qui me sembla durer une éternité, je poussai la vieille porte du cimetière. Il n'y avait pas un chat. Personne à l'horizon. Au moins, je ne risquais pas de faiblir devant quiconque. Prenant une bouffée d'air frais, je m'avançais dans les allées. Je n'étais venue qu'une seule et unique fois, mais je savais où me rendre, quel chemin emprunter. Mes jambes avançaient automatiquement, mais prêtes à lâcher à tout moment.

     Lorsque j'arrivais devant la pierre tombale, tout remonta d'un coup. C'était plus fort que moi. Je n'arrivai pas à me contrôler, à contrôler toutes ces émotions qui me submergeait. Ça me prenait comme ça, aux tripes et je perdais le contrôle de tout. Les larmes, les sanglots, la fragilité de rester debout. C'était une véritable tempête qui s'abattait sur moi. Une tempête que j'avais constamment éloignée, repoussée. Il était temps de l'affronter une bonne fois pour toute.





Bonjour, William. Je ne sais pas vraiment par quoi commencer. Tout ça, ça me dépasse. Tu sais mieux que n'importe qui que lorsque quelque chose me dépasse, je m'emmêle et me répète alors sois indulgent avec moi, ne te moque pas, pour une fois. J'avais l'impression de passer pour une folle à parler seule au milieu de ce cimetière sans vie. Je sais que j'aurais dû venir plus tôt, mais c'était au-dessus de mes forces. Encore maintenant. On dit mieux vaut tard que jamais alors j'espère que ça compte aussi pour maintenant. Ça fait plus de huit mois que tu nous as quitté, mais la douleur est toujours présente. Pas un seul jour, je ne pense pas à toi. C'est encore plus difficile lorsque je regarde Coleen. Elle te ressemble tellement, c'est fou. Elle a toujours tes yeux verts. Ce sont exactement les mêmes que les tiens. Elle a ton nez aussi. Tu sais, ce nez que tu détestais parce qu'il est juste un peu retroussé. Tu te plaignais toujours de ça. Je ne pouvais m'empêcher de sourire à l'évocation de ce souvenir. Elle a tellement grandi, si tu savais. Je ne vois pas le temps passer. Elle va déjà avoir quatre ans en février. Ça fera un an que tu nous auras quitté et je redoute cette période tout comme cette fin d'année. Depuis qu'on s'est rencontré, on a toujours passé les fêtes de fin d'année ensemble, avec nos familles. Ce sera tellement étrange sans toi. Il manquera quelque chose, quelqu'un. J'ai revu tes parents, et même s'ils font tout pour ne rien montrer, je sais qu'ils ne s'en sont toujours pas remis eux aussi. Leur fils unique leur manque toujours autant et rien ne pourra le remplacer. T'es irremplaçable, William. Je le pensais réellement. Personne ne pouvait le remplacer, c'était impossible. À mes yeux, en tout cas. Ces derniers mois ont été un véritable enfer. Tourner la page, aller de l'avant, ça ne se fait pas en un claquement de doigts, loin de là. Aller vivre à Madrid était la chose dont j'avais besoin. Il fallait que je m'éloigne d'ici, de tout ce qui me rappelait sans cesse que tu n'étais plus auprès de nous. J'ai d'abord vécu chez mon père, le temps de trouver un travail, de me faire un peu d'argent pour acheter un logement pour Coleen et moi. J'ai réussi à trouver un travail dans le stylisme. C'est fou, pas vrai ? J'y travaille depuis cet été et ça marche plutôt bien. Coleen a commencé l'école et elle adore ça, sauf les siestes. Elle en a horreur. C'est toujours une petite boule pleine d'énergie, rien ne l'arrête. Elle est incroyable. Si elle n'avait pas été là, j'aurais certainement fait une grosse connerie. Une énorme même. Le genre de connerie sans retour possible. Plus d'une fois, j'avais pensé à mettre fin à mes jours, mais à chaque fois, Coleen était là et me rappelait que je n'avais pas le droit de faire ça, pas à elle. Elle avait déjà assez souffert comme ça. Heureusement que mon père, Clarissa, Saúl étaient là. Surtout Saúl. Il m'a permis d'avancer, d'évacuer toute la rage et la colère que je ressentais en tapant dans un sac de frappe. Ça m'a fait du bien de pouvoir extérioriser tout ça. J'en avais besoin. Et puis, j'ai rencontré des personnes incroyables. Alexia, une de mes anciennes collègues, Stephen aussi, il te ressemble énormément. Le fameux couple Adam et Kate, ils sont incroyables tous les deux. Augusto aussi. C'est comme le grand frère que je n'ai jamais eu. Et Antoine. Malgré ce qu'il a fait, sans lui, je ne serais pas là. J'avais besoin de parler et il était là. Ça a été bien plus loin que des discussions, je l'avoue, mais maintenant, plus rien n'existe entre nous. Ça a sûrement été trop vite pour moi, j'ai pas pu suivre la cadence comme bien souvent. Enfin voilà, c'était un rapide résumé de ces huit derniers mois auxquels tu n'as pas pu assister. Je m'étais accroupi devant la tombe et remettais en place les quelques fleurs qui avaient un peu bouger. J'espère que tu vas bien et que tu t'amuses à te foutre de nous dès que l'occasion se présente à toi. Je sais que tu veilles sur nous, même si j'aurais préféré que tu le fasses en étant à nos côtés.








BEHIND HAPPINESS » a.griezmannOù les histoires vivent. Découvrez maintenant