Parker - (BxB)

Chapitre 4 ~ Courage et bobos au cœur

Avec la fin des vacances et le retour au lycée, les choses entre Angus et moi ont quelque peu...changées.

C'est notre dernière année, notre dernière ligne droite et en cours, en présence de tout le monde, il se contentait d'agir comme avant. Il était distant. Calme. Dans son monde. Perdu à regarder tout le temps par la fenêtre.

« - Angus ? Tu m'écoutes ?

- Hein ? Non, pardon. Tu disais quoi ?

- Je te demandais ce que tu voulais faire avec les examens.

- Ah...Bah...J'en sais rien. J'y ai pas vraiment réfléchi. »

Fidèle à lui-même.

Durant ces trois dernières semaines, il s'est montré particulièrement enjoué, excité, plein de vie, enfantin même et là...Là il est comme à plat.

Aux récrés, il part toujours le premier pour se mettre dans un coin tandis que je passe mon temps à le chercher du regard.

« - Parker ?

- Mona ! Dis-moi, tu n'aurais pas vu Angus ?

- Hmmm...Il allait aux toilettes, je crois.

- Ah merci ! »

Les toilettes, hein ?

« - Alors petit pédé ? T'as profité de tes vacances ?

- Parait que tu te fais tout mignon en ces derniers temps. T'as trouvé une queue à ton goût ?

- Bah alors ? Tu réponds plus quand on te parle ? En plus d'être pas normal, t'es muet ?

- Foutez-lui la paix. »

C'est quoi ce délire ?

« - Tiens, Parker. Toujours là pour lui sauver les fesses hein ?

- Et ? T'es jaloux parce que je ne m'occupe pas des tiennes ?

- Quoi ? Il t'a contaminé aussi ?

- C'est surtout votre connerie qui me donne des allergies bande d'abrutis. »

C'est qui ces gars-là ? Qu'est-ce qu'ils veulent à Angus ?

« - Allez foutez moi le camp avant que je m'occupe de votre débilité profonde. »

Ils finissent par quitter les toilettes, mais je me doute grandement que cette histoire n'en restera pas là.

« - Ça va ? T'as rien ? Ils ne t'ont rien fait ?

- Pourquoi ? Pourquoi t'es intervenu ? Tu ne vois pas que tu n'as fait qu'empirer la chose ?

- Comment ça ? Angus ...Tu te laisses faire ?

- C'est mieux de les laisser déverser leur venin que de m'en prendre une, mais maintenant, dès que je serais tout seul...Putain Parker...Je t'avais rien demandé. J'ai l'habitude de ce genre de chose ! »

Mon dieu. Je ne sais pas si je dois être choqué ou en colère. Avoir l'habitude ? Parce qu'en plus c'est récurrent. Je savais que l'homosexualité d'Angus était connue de pas mal de monde au lycée et je savais également il était régulièrement la cible de moquerie homophobe, mais de là à ce que cela soit du harcèlement, le prenant à part dès qu'il est tout seul...

« - Tu comptes vraiment te laisser faire ? Tu ne vas pas te battre ?

- Me battre contre quoi ? T'es con ou quoi ? Tu crois que c'est parce que tu chasses trois personnes des toilettes pour mecs que l'homophobie disparaîtra ? Réveille-toi. Cette façon de pensée et ancrée dans les gens. On ne va pas se mentir, dès qu'on s'embrasse dans la rue, qu'on se tient par la main, les gens se retournent. Ils nous dévisagent. Ils ont ce regard plein de ressenti sur nous, les « homos ». Pourquoi ? Parce qu'on n'est pas « normaux », parce qu'on n'aime pas une femme, parce qu'on n'est pas de vrais hommes. T'es peut-être pas au courant, mais ce n'est pas avec leur connerie de mariage pour tous soi-disant accepté, que les choses ont changées pour autant. Ouais, ok, certains deviennent plus tolérants et font des efforts, mais sinon, c'est toujours la même chanson. On nous pointe du doigt. On nous traite de monstres. De malades. On nous met à part. On est contagieux. »

Est-ce pour ça... ? Est-ce à cause de ça qu'il s'est éloigné de moi délibérément dès que les cours ont repris ? Parce qu'il avait...

« - Dis-moi Angus...Aurais-tu peur pour moi ? »

Pourquoi lui demander ? Son regard en disait long pour lui.

Je me suis alors approché, l'attirant vers moi. Contre moi.

Je n'en ai rien à foutre de tout ça. Des regards. Des murmures. Des préjugés. Les gens étaient débiles, ce n'était pas mon problème. La société était stupide, je n'en avais rien à faire.

Mais voir Angus ainsi, honnêtement, ça, ça me concernait d'une étrange façon. Ça me faisait mal. Intérieurement. Ça me faisait mal de voir qu'il essayait de porter ce poids pour deux. Ça me faisait mal de le voir mal, tout simplement. Je ne comprenais pas son bonheur et sa joie de vivre quand nous n'étions que tous les deux, mais peut-être qu'en fait, il s'attendait déjà à ça. Il était préparé.

Moi, pas du tout.

J'ai longtemps fermé les yeux sur tout ce côté obscur, sans vraiment m'en rendre compte. Parce qu'il est plus facile de fermer les yeux.

J'ai été lâche.

Lui, il a été courageux.

Courageux pour nous deux. Quelque part, j'ai l'impression de l'avoir laissé tomber sans me soucier de cet « après » qui nous attendait.

« - Tu sais quoi ? Qu'ils viennent. Je leur dirais comment je m'appelle !

- Sois pas con non plus. Tu vas juste te faire défoncer. Tu sais, de nous deux, normalement, c'est toi le plus responsable alors commence pas à vouloir faire des conneries.

- Pas faux ahaha ! Angus, tu as tellement grandi !

- Non, je fais juste attention à ce que tu reviennes en un seul morceau à Jo'. Honnêtement, elle me fait plus peur qu'une bande de lycéens. »

Pas bête. Ma sœur est terrifiante sous bien des aspects et pour mettre pris une ou deux raclées dans ma maigre petite vie, je le sais bien.

« - Du coup ? Tu comptes faire quoi ?

- Ce que je sais faire de mieux...Ignorer. Crois-moi, y'a rien de mieux à faire et puis je suis le champion du monde de l'ignorance !

- Tu es sûr ? Je veux dire...

- Ah t'en fais pas...J'ai l'habitude. Ils feront comme tous les autres...Ils se lasseront au bout d'un moment. Crois-moi...J'ai l'habitude. »

Mais si je te disais que croire en tes mots était ce qui me faisait le plus mal ?