Chapitre 5: La mer, source de vérité

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Les mères disaient au revoir à leur enfant, les femmes à leurs maris, les enfants à leur père ou à leur mère. Parfois, des larmes coulaient. Parfois, un sourire était seulement présent en guise d'au revoir. Une prière silencieuse, espérant que tous se passe bien durant la mission. Terena regardait ce spectacle qui lui était inconnu du haut du bateau qui était près à partir. Il la rendait encore plus haineuse envers Miiko et son maître. C'était à cause d'eux qu'elle ne pouvait plus prendre ses parents dans ses bras, revoir ses amis et son frère. Quand elle aurait retrouvé ce dernier, elle tuerait tous les habitants d'Eel. Miiko sera la seule survivante. Elle l'obligera à regarder ses amis mourir un par un. Terena la fera souffrir puis lui fera dire où est ce monstre aux yeux jaunes avant de la tuer aussi. Après l'avoir retrouvé, elle lui donnera une mort violente. Peut-être lui coupera-t-elle la tête comme il l'avait fait à son père. Elle ne savait pas. Elle n'y était pas encore. Une présence à ses côtés la fit se retourner et elle sourit à l'elfe.

- Je suis désolé pour la dernière fois. S'excusa le bleuet.

- Ça ne fait rien. Je sais ce que la peur de perdre des gens qu'on aime. 

Un silence s'installa. De derrière, Ezarel avait le loisir de la contempler à souhait. Elle était magnifique. Ses yeux brillaient avec le reflet du lever du soleil. Mais la mélancolie se dégageant de son expression la rendait encore plus mystérieuse. Il détacha son regard d'elle et vit Karenn, Nevra et Valkyon leur faire un signe de la main. Ezarel sourit en mettant un coup de coude à son acolyte. 

- Hé ! Bouda-t-elle en se tournant vers lui.

- Regardes qui est venu nous dire au revoir. Sourit il en désignant ses amis d'un signe de tête.

Elle regarda dans la direction qu'il lui montrait. Ils étaient là, un grand sourire sur leur visage. Terena leur fit un signe de la main, gênée par cette attention qu'ils lui donnaient. Elle ne pu empêcher d'apparaître un sourire tendre sur son visage. 

- Ce sont de bonnes personnes. Murmura-t-elle en baissant sa main.

- Oui, ils le sont... Même si ils sont parfois très embêtants ! Rigola Ezarel.

Un ricanement sincère sortit de la bouche de la démone.

- Mais c'est qu'elle sait rire!... S'étonna faussement l'elfe.

Elle secoua la tête avec un sourire en signe de désespoir. Le bateau commença à avancer et bientôt, la cité d'Eel qu'elle avait mis si longtemps à atteindre ne fut plus qu'un petit point disparaissant au fil des secondes.

. . .

Ce soir là, Terena mangea en retrait des autres, préférant regarder le paysage qui s'offrait à elle. Manger était un bien grand mot car elle ne faisait que picorer son morceau de pain. 

- On dirait que la naine n'a pas faim. Se moqua Ezarel en arrivant.

- On dirait que l'elfe n'a toujours pas perdu sa langue. Lui renvoya-t-elle.

Ezarel s'assit à côté d'elle, sur un tonneau. 

- Dis moi Terena, où est ta famille ?

Serrant les dents, ses sourcils se froncèrent et les images lui revinrent à l'esprit. Elle hésita à dire la vérité, mais bizarrement, elle ne voulait pas lui mentir à lui.

- Ma famille... elle est morte. Assassinée... Dévoila-t-elle.

Il s'excusa rapidement. Il devait avouer ne pas s'attendre à ça. 

- Tu n'as jamais voulu te venger de son assassin ?

La voix de la démone se fit plus basse, plus fragile, dévoilant une partie de faiblesse qu'Ezarel ne connaissait pas. 

- Si... J'y pense tous les jours. A la vie qu'ils vivent alors qu'ils ont volé celle de ma famille... et brisée la mienne. Dit-elle. Et toi? Qu'en est-il de ta famille?

- Je suis fils unique. Mes parents sont... Eh bien mes parents sont des nobles qui vivent dans un grand village au Nord d'ici, Larmenia. Ils m'ont viré de chez eux lorsque je leur ai dis que je voulais être alchimiste. Alors je me suis engagé dans la garde Absynthe. Avoua-t-il.

- Tu ne les as pas revu depuis ton départ? Demanda-t-elle, curieuse.

- Eh bien non, ils n'ont jamais essayé de me revoir et j'ai respecté leur choix.

Un silence se propagea. Mais pas un silence gênant. Un silence apaisant, chacun respectant l'histoire de l'autre. Le lien les unissant devenant peu à peu plus fort.

- Tu devrais prendre des forces, Terena. Nous arriverons dans quelques jours sur l'île des Kappas.

C'était bien la première fois qu'il l'appelait par son prénom, et malgré sa surprise, elle en fut quelque peu heureuse. Il commença à s'en aller. Terena regarda la mer, et ouvrit bientôt de grands yeux face au spectacle qui se déroulait devant ses yeux.

- Ez, regardes ! Cria-t-elle en se précipitant au bord du bateau.

Surpris qu'elle l'appelle soudainement ainsi, il se retourna rapidement et ricana intérieurement. Terena avait les yeux qui brillaient de mille feux. L'elfe s'approcha pour regarder cela de plus près. Cela faisait si longtemps qu'il n'en n'avait pas vu. Devant eux, de jeunes femmes brillant comme des étoiles couraient sur l'eau comme s'il n'était qu'un sol parmi tant d'autre. Elles couraient, rigolaient de leur voix mélodieuse. Ressemblant plus à des mirages qu'à des femmes, Terena ne savait pas si ce qu'elle voyait était réel ou pas. Ezarel lui ôta tous ses doutes.

- Ce sont des Faemhina. Une espèce que l'on ne voit que en mer. Ce sont toutes des jeunes femmes et on raconte qu'elles ont été bénies après leur mort et qu'elles ont eu droit à une nouvelle vie plus paisible que celle d'avant, se réincarnant en ces créatures. Expliqua-t-il.

- Des créatures divines murmura-t-elle. Elles sont magnifiques.

Émerveillée de ce nouveau monde qu'elle apprenait à connaître peu à peu, elle oubliait son but par moment, se concentrant sur le présent qu'elle vivait plus intensément que jamais. Les femmes disparurent en plongeant dans l'eau. L'une d'elle, avant de suivre ses compères, sourit aux deux spectateurs en leur faisant un signe de main. Puis elle plongea dans l'eau gracieusement, faisant vibrer la surface de l'eau.

- Le monde n'est pas complètement pourri de l'intérieur près tout. Se murmura-t-elle à elle même.

Ezarel avait entendu mais ne releva pas. Il était clair que la jeune femme avait beaucoup trop souffert durant sa vie. Bizarrement, son cœur se réchauffa à la vue de la jeune femme souriant sincèrement en regardant le couché du soleil. Il savait qu'il commençait à s'attacher à elle. Ne luttant pas contre ce sentiment, il se laissa engloutir par l'amour naissant qui se propageait dans son cœur. Même s'il ne s'en rendait pas encore compte, cet amour était plus destructeur qu'aucun autre.

La grande guerre  ~Eldarya~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant