Chapitre 6: Une mission accomplie

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Les jours sur le bateau furent calmes, et très joyeux malgré le sort des gardes d'Absynthe qui était inconnu. Ce n'était que le soir que les démons de chacun revenaient dans les esprits. Pour certains, c'était le sort de leurs amis, pour une autre, c'était le sort de son frère. Plus d'une semaine passa. La terre des Kappas était de plus en plus proche, et la tension, de plus en plus haute. Le cœur de Terena se réchauffait à la vue de ces gardes tous plus chaleureux les uns que les autres. A la vue d'Ezarel, c'était un sentiment inconnu qui s'emparait du plus profond de son être. Elle n'arrivait pas à mettre un mot là dessus, et n'essayait même pas. Le présent lui convenait, et elle ne voulait pas penser à l'avenir inévitable qui l'attendait. 

. . .

Depuis qu'elle était en mer, Terena ne pouvait quitter des yeux l'étendu d'eau qui se dressait devant elle. Le paysage lui provoquait un sentiment de sérénité que jamais auparavant elle n'avait ressentie. Ses yeux se rétrécirent, essayant de distinguer ce qu'était la forme qu'elle voyait au loin. Sa bouche s'entrouvrit de surprise en comprenant ce que c'était.

- Terre en vue ! Cria-t-elle. Nous sommes arrivés !

L'excitation de voir une nouvelle terre, une nouvelle race, était mélangée à l'appréhension. Personne ne savait ce qui était advenu des gardes, et Terena devait bien admettre qu'elle avait peur d'apprendre qu'ils leur étaient arrivé malheur. Elle entendit Ezarel donner des ordres, puis la rejoindre. Un sourire naquit sur ses lèvres en sentant le regard de l'elfe sur elle.

- Tu es prêtes ? Demanda-t-il.

- Bien sûr que je le suis ! Aurais-tu peur ? Se moqua-t-elle gentiment.

Le regard du bleuet se perdit vers l'horizon alors que son sourire narquois disparut. Un silence s'installa alors. Terena sourit tendrement en comprenant ce qu'il avait. Sans réfléchir, elle posa une main compatissante sur son épaule et exerça une légère pression en signe de réconfort. Le visage d'Ezarel se tourna vers elle, quelque peu surpris par ce geste. 

- Ne t'inquiète pas. Ils iront bien. 

Ezarel lui rendit son sourire avant qu'elle n'abaisse sa main pour la poser sur le bord du bateau. Ce fut à son tour de poser sa main sur la sienne. 

- Merci, Terena. Chuchota-t-il.

Leur chaleur se mélangea tandis que Terena se battait intérieurement. Son cœur lui dictait de laisser sa main, son cerveau lui intimait qu'elle se devait de le repousser. Mais avant qu'elle ne put prendre une décision, il enleva sa main et retourna auprès des gardes pour préparer leur arrivée. Elle soupira longuement, fermant les yeux pour reprendre ses esprits. Ce n'est pas bon Terena, se murmura-t-elle. Il faut que tu te reprennes. Quelques secondes plus tard, elle les rejoignit en lançant un dernier regard à l'île, qui n'était plus qu'à quelques mètres d'eux.

. . .

Le bateau fut bientôt amarré sur l'île des Kappas. Armés, les gardes sortirent les uns après les autres. Ezarel se mit en tête du groupe alors que Terena sortit en dernière. Son couteau glissé dans son fourreau, elle se contenta de regarder autour d'elle, émerveillée. Devant le sable fin qui s'étendait à quelques mètres, une grande forêt était présente, regroupant une multitude d'arbres, plus grands les uns que les autres. Sur la plage, deux kappas s'approchèrent d'eux. Terena, qui n'en avait jamais vu, les observa silencieusement faire une révérence à Ezarel, qui la leur rendit respectueusement. Leur ressemblance avec de simples tortues était forte, bien qu'ils étaient pourvus de bec et que le sommet de leur crâne creux était entouré de feuillage. Ce creux contenait étrangement une sorte d'eau.  Elle décida de s'approcher, restant tout de même à une  certaine distance. Ezarel expliqua tout d'abord la situation. L'un des kappas, qui s'appelait Ethreln, expliqua calmement que les gardes allaient bien, mais que le bateau avait mystérieusement disparu. L'incompréhension régnait, car les familiers devant envoyer des messages étaient revenus sans ces derniers. Tous le monde avait donc cru qu'ils avaient été livrés. Le second Kappas regardait Terena d'un œil profond, la dévisageant avec méfiance. Il s'était présenté comme étant Neilh. La démone lui rendit son regard, se demandant si sa sagesse n'allait pas lui poser problème. Son regard lui donnait l'impression qu'il savait, et un certain malaise s'empara d'elle. Il ne pouvait pas savoir. C'était tout bonnement impossible. Cependant, elle n'osa pas s'approcher pour les saluer et attendit que les échanges se terminent et que Ezarel vienne auprès d'elle. L'elfe lui fit enfin un signe de main,et après une seconde d'hésitation, elle s'approcha d'eux. Saluant d'un signe de tête les deux individus, elle préféra éviter le regard insistant de Neilh. 

- Dis aux gardes de rester sur le bateau et d'installer un périmètre de surveillance. Ils ne doivent en aucun cas baisser leur garde. Tu viens avec moi, alors dépêche toi. Expliqua Ezarel.

Elle acquiesça. Dans ces moments là, mieux valait ne pas contredire l'elfe. De plus, elle savait que son ton froid était dû à l'angoisse qu'il avait supporté depuis la disparition de ses précieux gardes. Après avoir fait passer le message aux gardiens, elle rejoignit son compagnon et ils se mirent en route, suivant de près les deux kappas. Ezarel et Terena se mirent un peu en retraite sans pour autant les perdre de vue.

- Si Neilh n'arrête pas de me jeter ces regards, je te jure que je lui fais manger ma lame. Bouillonna-t-elle.

L'elfe ne put s'empêcher de se moquer gentiment de la témérité de la jeune femme. 

- Calmes toi, de la fumée sort de tes grandes oreilles.

- Je te ferai dire que tu as les même que moi. Répliqua-t-elle en roulant les yeux.

Ezarel rétrécit ses yeux, étant en pleine réflexion. 

- Ne serais-tu pas une elfe, Terena ? Les oreilles pointues, des yeux clairs envoûtants. Tu en as toutes les caractéristiques. Seul ton tatouage est... étrange.

- Je ne suis pas une elfe, Ezarel. Répondit-elle faiblement. Mon... Mon tatouage vient de ma tribu, mais je ne peux pas t'en dire plus.

- Cela me fend le cœur. Dit-il d'un air faussement vexé.

Ils stoppèrent toute conversation en constatant qu'ils étaient arrivé .Ethreln s'arrêta pour se mettre face à eux.

- Les gardes sont dans une grotte à côté de la Cascade des Roches que vous voyez ici présente. Maître vous attend à l'intérieur en compagnie de vos amis. 

Terena passa devant les deux kappas pour voir de plus près la cascade. Ses yeux brillaient devant la beauté de ces lieux. Jamais elle n'aurait cru voir ça. Les paysages qu'elle avait vu étaient magnifiques comparées aux terres recluses où elle avait toujours vécues. D'immenses cascades venaient se jeter dans le lit d'Amphéa, comme ils l'appelaient. L'eau brillait avec le reflet du soleil. 

- Allons-y. Lui chuchota Ezarel.

Elle détacha à contre cœur son regard puis ils pénétrèrent dans la grotte. Des torches, séparées de quelques mètres les unes des autres, étaient accrochées sur les parois humides. Bientôt, ils arrivèrent dans une grande salle et purent voir l'intégralité des gardiens Absynthe ainsi qu'un Kappa qu'une grande aura entourait. Il se retourna vers les nouveaux venus. 

- Bienvenus sur les Terres de Jades. Leur dit-il quand ils furent à quelques pas de lui.

Le remerciant chaudement mais rapidement, Ezarel accéléra les présentations  pour s'assurer que chacun de ses apprentis étaient bien présents, et surtout, en bonne santé. Terena, ne se sentant pas à sa place au milieu de ces belles retrouvailles, préféra rester à l'écart et sortit dehors. Elle laissa glisser son dos contre un arbre et contempla la cascade, une triste solitude s'emparant de son cœur meurtri. Elle devait se venger, mais ces barrières qu'elle dressait autour d'elle l'empêchait de respirer. A quoi bon vivre après qu'elle se soit venger ? Elle n'avait aucune raison de poursuivre sa vie après avoir tuer les seuls êtres qu'elle ait aimé. Elle ne le pourrait pas. Même si elle retrouvait son frère, où pourraient-ils aller? Que pourraient-ils faire? Son cœur se serrant, elle commença à trembler. Des larmes coulèrent le long de ses joues et des sanglots incontrôlables s'emparèrent d'elle. A l'entrée de la grotte, un elfe aux cheveux bleus la fixait tristement. Il fit un pas vers elle, puis se ravisa. Divisé entre l'envie de la rejoindre et le fait qu'il savait qu'elle ne voulait pas de sa présence. Soupirant, il se contenta de la surveiller de loin, se demandant ce que pouvaient êtres les divers secrets qu'elle cachait. Parce qu'il en était sûr, elle cachait bien quelque chose. Et il savait aussi que c'était ces secrets qui la dévoraient de l'intérieur. Après tout, son intuition ne l'avait jamais trahi.




La grande guerre  ~Eldarya~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant