8. Deux pas en arrière

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–  Tu peux ouvrir les yeux maintenant.

Je m'exécute. Ma vision est trouble et je peine à voir une image claire. Une fois le brouillard viré de devant mes yeux, je reconnais la maison de mon enfance. Les guirlandes scintillent dans tout le jardin et la grande allée est décorée avec un faux Père Noël et son traîneau. Je ne me souvenais pas que c'était si joli. Enfin, joli, joli... C'est vite dit hein !

–  Sais-tu où nous sommes ? demande Sophie.

–  Bah oui quand même !

–  Et sais-tu quand nous sommes ?

–  Allé vas-y qu'elle remet ça, dis-je exaspérée. On est à Noël voyons ! Tu ne vois pas tout ce bordel qui clignote ?

–  Sais-tu qu'elle année ?

– J'ai comme l'impression que tu vas me le dire nan ? dis-je en la regardant de haut.

–  On est le 24 décembre 2008, soit deux ans avant la scène que tu viens de revivre au lycée.

Immédiatement, sa réponse me glace le sang. Ce jour, j'ai tenté de l'oublier dès le lendemain. J'ai rêvé tant de fois qu'il ne soit qu'un cauchemar. Espéré de tout mon coeur qu'il n'est jamais existé.

–  Je n'entrerai pas dans cette maison, dis-je déterminée.

–  Si tu vas entrer.

–  J'ai dit non ! Il est hors de question que je remette les pieds là-dedans un jour pareil !

Je commence à rebrousser chemin dans l'allée à toute vitesse. Je veux fuir cette scène absolument. Ces instants qui ont définitivement scellés mon monde. Et oui, je n'ai pas toujours la garce que vous connaissez. J'ai été une fille normale, une fille qui aimait la famille, qui aimait Noël et qui parlait aux gens avec respect. Mais depuis ce 24 décembre 2008, Shirley la petite fille modèle n'est plus. A cause de lui, de ce qu'il a fait, j'ai dû changer pour devenir la connasse sans coeur que je suis aujourd'hui. Quel homme doté d'un peu d'humanité serait capable d'abandonner sa famille le jour du réveillon de Noël ? Et bien mon père en a été capable. Il l'a fait sans aucune retenue et a déballé toute sa haine sur notre famille. Il m'a regardé dans les yeux pour me dire que je lui faisais honte et que jamais je ne serai digne du nom qu'il m'a donné. Nom que j'ai d'ailleurs changé à ma majorité. Je ne voulais plus jamais entendre Shirley et Dumont côte à côte.

J'ai subitement les larmes qui me montent aux yeux en repensant à cet odieux souvenir, mais la porte qui claque derrière moi et les cris de Sophie efface mon trouble. Je me retourne et observe ce père qui était autrefois le mien, fuir dans l'allée en bousculant le faux Père Noël, valise à la main. Je ne peux m'empêcher de scruter son regard d'homme faible et lâche. Il m'a fait culpabiliser tant d'années pour finalement se barrer. J'ai su bien plus tard que s'il nous avait quitté, c'était juste pour pouvoir s'enfiler la nouvelle prof de musique et se tirer au soleil avec elle. Quand je regarde cet homme dur et froid, j'ai de nouveau envie de pleurer et je me retiens de ne pas craquer.

–  Tu dois entrer Shirley...

–  Je ne peux pas entrer et affronter le regard de ma mère une nouvelle fois.

–  Si tu peux. Et tu vas le faire. Donne-moi ta main, dit Sophie le ton plein de tendresse.

J'écoute et attrape la main qu'elle me tend. Nous marchons toutes les deux dans l'allée décorée. Une fois entrée à l'intérieur, j'entends les cris de ma mère qui résonnent dans le salon. J'avance et je ne sais pas où je trouve la force de le faire. Je me retrouve ensuite devant ma mère, et "mon autre moi", en pleurs.

《 –  C'est de ta faute s'il est parti ! Tu ne comprends jamais rien ! Tu n'écoutes jamais rien ! Il te rabâche sans arrêt tes erreurs et tu ne fais aucun effort ! Tu as détruit notre famille. J'ai honte de toi.

–  Tu n'as pas le droit de dire ça maman ! Je n'ai rien fait...

–  C'est justement là le problème ! Ce n'est jamais de ta faute ! Heureusement que ta sœur est là elle ! 》

Parlons-en de ma chère sœur tiens ! Madame j'ai eu mon BAC à 16 ans ! Madame j'ai été faire mes études aux States ! Madame je suis parfaite !!!! Madame j'ai un mari pété de thunes ! Madame j'ai des enfants merveilleux !!!

–  Pourquoi tu m'as emmené ici ? demandé-je à Sophie. Ça te plait de me voir faible c'est ça ? Ça te fait marrer hein ? dis-je avec les larmes qui coulent sur mes joues.

–  Non, je ne trouve pas ça drôle. Mais je voulais que tu vois celle que tu étais avant. Une fille avec un coeur, et pas cette fausse Shirley que tu montres à tout le monde.

–  Je ne suis pas fausse ! Aujourd'hui, et grâce à Miranda, je suis moins faible c'est tout. Et j'emmerde tous ceux qui ne sont pas d'accord avec ça c'est clair ! Maintenant ramène-moi en 2017 dans cette putain de chambre d'hôtel !!!

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Triste chapitre pour Shirley
À demain

❄❄❄❄❄❄Triste chapitre pour Shirley À demain

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Silent NightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant