Ses paroles me heurtent de plein fouet, je sais que cette fois ce n'est pas l'alcool qui parle. Tout ce qu'elle dit est sincère et exempte de vices. Elle n'a plus de filtre, plus de tabou. C'est juste elle. Elle marque une pause, toujours sans se retourner, puis elle se remet à parler après une grande inspiration.
-Si t'étais pas là... J'serais peut-être plus en vie à l'heure qu'il est.
J'ai l'impression qu'on vient de me donner un coup de poing dans l'estomac, qu'est ce qu'elle veut dire par là ? Je me sens complètement perdu, et comme je n'arrive pas à parler, je continue d'écouter, puisqu'apparemment elle n'a pas terminé.
-Petit à petit, on perd des amis, on perd un p'tit peu tout. Puis à force de perdre encore et toujours on se dit « à quoi bon vivre ? Si c'est ça la vie, j'ai aucune raison de continuer ». Tu sais Ian, moi j'ai tout perdu. Tout. Ma famille, mes amis, tous les gens que j'aimais sont partis. Je les y ai un peu poussés, mais personne ne s'est jamais battu pour moi. Le seul qui s'est battu, c'est mon frère, et il en est mort.
Assommé par ses mots, je reste silencieux. Je voudrais dire quelque chose, la réconforter, la prendre dans mes bras et lui dire que je suis là, mais j'en suis tout bonnement incapable. Ca ne semble pas la déranger, peut-être qu'elle ne veut pas que je parle. Peut-être que si je la coupe cela va compliquer les choses, et je ne pense pas me tromper si je dis qu'elle a encore des choses à dire.
-Mais avec toi... Moi j'ai une raison de continuer.
Cette fois elle se retourne vivement pour me faire face et ses iris se plantent dans les miens.
-Je suis douée pour cacher ce que je ressens. Personne n'y a jamais pensé. Au fait que je pourrais mettre fin à ma vie. Pourtant, moi j'y pensais. Tout le temps. C'est pour ça que j'ai quitté Paul. C'est pour ça que j'ai coupé les pont avec le monde. Je voulais être seule, je voulais avoir toutes les raisons de faire la chose la plus égoïste du monde. Je voulais qu'ils sachent, qu'ils comprennent. Qu'ils comprennent que j'avais bien trop peu d'estime de moi-même pour que ça suffise à me sauver.
J'ai l'impression de faire un mauvais rêve. Est-ce qu'elle est réellement en train de dire qu'elle a penser à se suicider ? Elle était donc désespérée à ce point ? A croire que la réponse est oui. Mais, pourquoi alors me dit-elle ça maintenant ?
-Et t'es arrivé. Tu vois, toi non plus tu savais pas. Pourtant, il y avait quelque chose de différent chez toi, dans la manière dont tu me regardais, dont tu me parlais. Tu n'avais pas pitié de moi, et tu me détestais, mais pourtant t'es le seul qui ne m'a jamais laissée tomber. Je valais plus rien, et je voulais pas que tu me donnes une raison d'imaginer le contraire. Sauf que t'as pas abandonné. Et moi j'ai décidé de donner une dernière chance à la vie.
Ses yeux sont brillants comme ils ne l'ont jamais été. Elle sourit, comme si elle avait trouvé la paix, et poursuit d'une voix douce que je ne lui connaissais pas.
-Tu m'as sauvé la vie, et tu... tu ne le sais même pas.
Sa phrase est entrecoupée par un sanglot qui lui échappe et c'est à se moment là que mon corps semble de nouveau en état de marche, comme reconnecté enfin à mon cerveau. En deux enjambées je suis face à elle, et en deux temps, trois mouvement je la serre de toutes mes forces contre moi, à l'en étouffer. J'ai envie de pleurer avec elle, je peux pas imaginer ce qu'il se serait passé si elle avait baissé les bras.
-J'te lâcherai jamais.
Ses mains agrippent fermement mon haut dans mon dos, c'est tout ce que je suis capable de dire pour le moment. Elle se détache légèrement de moi, replongeant ses yeux dans les miens. Les choses accélèrent soudainement, je ne le vois pas arriver mais elle se met sur la pointe des pieds et écrase ses lèvres contre les miennes. Elles se moulent parfaitement aux miennes, comme si nous étions faits pour nous embrasser. Je ne cherche même pas à résister, je baisse les armes, je les balance à ses pieds. Tout ce que je suis capable de lui donner, je lui donne ce soir sans compter. D'elle même, elle approfondit ce baiser, sa langue rencontre la mienne dans un rythme effréné. Je la laisse me guider, je la laisse faire ce qu'elle veut de moi, on ira jusqu'où elle voudra aller. Je réponds à chacun de ses baisers, nous sommes tous les deux désespérés, avides l'un de l'autre. Clairement, elle a craqué une allumette, ou elle a dégoupillé une grenade, je sais pas encore, mais ça finira par nous sauter à la gueule tout ça.

VOUS LISEZ
Loving at last (NIAN)
FanfictionNIAN « Nous étions inséparables, j'avais pris l'habitude de penser que j'étais irremplaçable. »