Après cette petite soirée qui constituait un grand pas de la part de Nina, les choses ont repris leur cours habituel. Elle est redevenue la personne froide et fermée. Et plus les jours passent, plus elle semble triste.
C'est pour ça que je la suis actuellement, lors de sa petite escapade nocturne. Je sais, c'est mal, mais j'ai besoin de savoir ce qu'elle fait toutes les nuits, où elle va, si elle a des ennuis... Peut être que je pourrais faire quelque chose pour elle.Je marche à une distance raisonnable afin de ne pas me faire remarquer. Lorsqu'elle s'arrête de marcher, mon attention se porte sur l'endroit où nous sommes. Je me sens aussitôt mal de l'avoir suivie, je n'ai rien à faire ici.
Lentement, elle avance encore un peu avant de s'accroupir et de littéralement fondre en larmes. Elle pose sa main sur le marbre sans doute gelé par la nuit et l'hiver, et commence à parler longuement.
Je ne devrais pas, mais je reste quand même là à l'écouter parler en dépit du fait que je ne saisis que des fragments de phrases.« Bon sang, c'est horrible. [...] Plus les jours passent, et plus je me demande comment je vais tenir sans toi. [...] Tu me manques tu sais. Des fois, je me demande ce que je fous encore ici, parce que par moment j'ai l'impression que plus rien ne me retiens depuis que t'es plus là. [...] je supporte plus ton absence. Je j'aurais jamais imaginé que ce soit aussi compliqué. J'ai encore besoin de toi, il faut que tu m'expliques pourquoi j'y arrive pas. Pourquoi je me relève pas. Parce que j'ai beau chercher je comprends pas. »
Elle marque une longue pause, j'ai le cœur lourd. A l'instant, j'ai juste envie de la prendre dans mes bras et de lui dire que tout ira bien.
« Je t'ai pas dit, j'ai pas fêté mon anniversaire seule cette année. Enfin, c'est Ian qui me l'a souhaité. Tu sais, le gars qui m'héberge. Il est gentil, mais je comprends pas pourquoi il essaie de m'aider. Je suis horrible avec lui, mais il est toujours là. Il me fait penser à toi des fois, parce qu'il veut toujours m'aider sans que j'ai rien à lui demander. »
Je suis plus que surpris de l'entendre évoquer mon prénom et tout ce qui suit, mais surtout d'apprendre qu'elle ne me déteste pas au fond.
Elle parle ensuite si bas que je n'arrive plus à comprendre ses propos. Les seuls sons qui me parviennent sont ses sanglots qui étouffent sa voix, me pinçant le coeur au plus je l'entends. Lorsqu'elle arrête complètement de s'exprimer je décide de m'approcher. Doucement, je la relève, et la prends dans mes bras. A mon plus grand étonnement elle se laisse faire. Du moins jusqu'à ce qu'elle ne me repousse brutalement et m'assène une gifle phénoménale.-Non mais je rêve ! Tu m'as suivie ?!
-Oui, désolé, je croyais que tu avais des problèmes, et...
-Ça ne te regardait pas ! Je te déteste putain ! T'avais pas le droit de faire ça ! T'avais pas le droit !
Elle se débat, elle frappe mon torse avec ses poings fermés, son visage inondé de larme semble tordu par la douleur. J'essaie de l'immobiliser, de la calmer. Je déteste la voir dans cet état, brisée par la vie. J'ai juste envie de la serrer tellement fort que cela recollerait tous les morceaux.
Elle fini par se calmer, n'ayant sans doute plus la force de se battre contre moi.
Je la maintiens contre moi et observe ce qui nous entoure. Beaucoup de gens détestent les cimetières. Ils trouvent ça glauque, et n'y voient que de la douleur. Certes, il y a de la peine liée au manque, mais je suppose que c'est normal. Moi je trouve ça beau, et presque apaisant. Tout ce que je perçois ici n'est qu'amour.Mon regarde se porte sur cette pierre tombale sur laquelle Nina était penchée quelques minutes auparavant.
« A la mémoire d'Alexander Dobrev. (1984-2013)»
Mes bras se resserrent autour de son corps fragile. Je ne peux imaginer la douleur qu'elle éprouve, et je peux comprendre qu'elle n'arrive pas à faire son deuil. Si je perdais ma soeur, je ne m'en remettrais jamais.
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Loving at last (NIAN)
ספרות חובביםNIAN « Nous étions inséparables, j'avais pris l'habitude de penser que j'étais irremplaçable. »