〰Sentence〰

1K 69 0
                                    

PDV Adam

Flash back.
Deux jours plutôt.

-On la tient cette salope, se réjouit Jethro en montant à l'arrière du pick up.

Ash nous rejoint. Toujours aussi froid. Toujours aussi ténébreux. Peu lui importe les situations auxquelles il est confronté, il sait se mettre à distance, prendre du recul. Il s'engouffre dans l'habitacle, silencieux comme un macchabée. En plus d'être fin observateur, il est très pragmatique.
Mais ce qui en jète chez lui, c'est davantage son maquillage de squelette qu'il arbore en permanence.
C'est un peu comme une signature. Et de surcroit, c'est la dernière vision qu'ont les gens avant de mourir par sa lame.
Il est pas sophistiqué sur l'utilisation des armes, en revanche, il est plutôt branché serpes, arbalètes et couteaux de lancer en acier inoxydable.

Lorsque je me retourne pour scruter la pile de guns dans le coffre, autant dire que ça va chier.
Évidemment, les plus gros calibres appartiennent à Jethro, qui cherche toujours à en mettre plein la vue.
Pistolet mitrailleur, 357 magnum, Mustang Arms Whisper II, Smith & Wesson Beefeater...
La guerre est déclarée. Ça va faire mal au cul.

Arther s'installe au volant, sitôt rejoint par les gars qu'il a réquisitionné.
Nous prenons la route, suivis par une Jeep et deux hummers, dans lesquelles sont regroupés l'équipe des atrophiés, des gueules cassées.
On doit être une quinzaine d'hommes sur le coup, avec Louys qui compte pour un régiment à lui seul; une perche le type, environ deux mètres de diamètre: un balèze, un cogneur, une force de la nature.

Sur le trajet de l'entrepôt, y'a qu'une musique cubaine qui vient ébranler l'ambiance hostile de l'habitacle. Arther a mis les gazs, plus que déterminé à tirer un trait sur cette affaire.

-Eh, y'a Adam qui se pisse dessus, ricane Jethro.

Je lui lance une injonction pour qu'il ferme sa gueule. J'peux décidément plus le blairer. D'ailleurs, j'aurais rien contre lui faire un coup de pute une fois à l'entrepôt, histoire de plus avoir à me le farcir. Mais je sais que je n'en ai pas les couilles.
J'ai beau jouer au loubard, rouler des muscles, c'est que du vent.

A une époque pas si lointaine, j'étais encore qu'un putain de banlieusard. Aujourd'hui, adieux les teufs, les jeux de Xbox-One, les diplômes...j'me suis vendu à Los Zetas contre la rédemption de mon frère.

A seize ans, c'est bien connu que t'as rien dans le crâne. Mais lui, il a battu des records avec son absence de connexions neuronales. Comme tout pré-pubère qui se respecte je dirai, ça été la débandade quand une nénette l'a aguiché sur internet. Elle lui proposait qu'il la rejoigne au Mexique, tous frais payés. Mon frangin s'est tiré là-bas, et a été accueilli par une milice qui enrôle les jeunes via le net.

J'y ai mis le prix pour le faire rentrer au pays.
Mais pas une seule journée ne passe sans que je ne mesure l'étendu de ce que j'ai perdu. Mon boulot de barman à temps partiel, le campus, mon équipe de hockey...
J'ai pas le profil ni le tempérament d'un malfrat. Par contre Jethro, il baigne comme un poisson dans l'eau. Il s'en est fait une vocation. Tel père tel fil, j'ai envie de dire. Il a su reprendre le flambeau. Deux têtes de cons, la faute à l'hérédité.

Arther gare la bagnole à une centaine de mètres de l'entrepôt, situé à l'orée de la ville. Il a l'air plutôt serein en vérifiant que son chargeur soit gonflé à bloc. Je le soupçonne d'avoir fumé un pète avant de venir. Après tout, il n'est pas incoercible. Il doit bien avoir des démons à faire taire lui aussi.

TROIS GANGS POUR UN COEUR A PRENDREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant