Chapitre 19 - La note

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Je pénètre les portes de ma demeure avec Mitzraël sur les talons. Il s'est levé à 5h30 pour pouvoir se préparer, reprendre un taxi pour retourner chercher sa voiture, revenir chez lui pour me réveiller et me ramener chez moi pour que je puisse également me changer.

– Layten ! T'étais où ? Je me suis fait du sang froid quand j'ai remarqué que tu ne rentrais pas, se larmoie ma mère en me serrant dans ses bras dès que je passe l'entrée.

– Je suis désolé. Il était tard, j'ai pas voulu déranger en appelant.

Je ne peux tout de même pas lui avouer que je suis allé me soûler la gueule en pleine journée de semaine, et que c'est à cause de cette raison que je ne l'ai pas téléphoné.

Elle me relâche croisant son regard au mien.

– La dernière fois que tu n'es pas rentré et n'as pas donné signe de vie, tu étais à moitié mort dehors à cause que tu t'étais fait frapper. Tu comprends que j'ai eu peur que tu ne m'aies pas donnée de nouvelles ?

Je hoche de la tête. Je me souviens ensuite que Mitzraël assiste à cet échange, et sans même le regarder je peux deviner le malaise que ma mère doit avoir creusé en lui avec ses paroles. Cette dernière pose finalement les yeux sur celui-ci. Un sourire illumine son visage. Par pitié, faites qu'elle dise et ne fasse rien de compromettant pour ma fierté.

– Je croyais que mon fils sortait avec Maeva. Je suis contente qu'il ait enfin plus de fréquentations. Je suis heureuse de te revoir. Allez, viens t'asseoir. Veux-tu un café ? prononce-t-elle d'une traite en l'obligeant à s'installer à la table de cuisine.

Mitzraël se tourne vers moi et me fait un sourire rassurant lorsqu'il constate mon visage qui doit être cramoisi. Une lueur d'amusement traverse son regard juste avant qu'il ne me fasse un clin d'œil. Puis comme si c'était naturel, il commence à discuter avec ma mère. Quand tu hurles au loup, il te répond. Ma mère est comme ça. Maintenant qu'il a amorcé la conversation, je ne sais pas comment il va faire pour l'arrêter dans son élan. J'en profite toutefois pour filer en haut. Je me douche rapidement, m'habille, et retourne à l'étage où des éclats de rire me parviennent. J'arrive dans la cuisine. Mon père est adossé contre le comptoir, ma mère est en train de faire sauter des œufs, Mitzraël boit tranquillement un café à la table, mais ils s'esclaffent tous entre eux.

– J'étais en train de décrire comment tu as passé à un cheveu de te casser la gueule en descendant les escaliers, l'autre jour.

La bouche m'en tombe tandis que mon regard s'assombrit de désarrois. Mon père éclate de rire.

– C'est une blague, Layten. Ne fais pas cette tête. Non, en fait, c'est Mitzraël qui nous racontait une petite anecdote d'enfance.

Je me détends, malgré que mon père a réussi à me mettre dans l'embarras. Je me dirige vers le frigidaire en sondant Mitzraël.

– Faudra que tu me racontes aussi.

Pour la deuxième fois, il me fait un clin d'œil rieur. Il semble vraiment à l'aise entouré de mes parents. Je ne lui ai jamais vu une insouciance si paisible. Il est là à papoter ainsi qu'à rigoler, et c'est comme si c'était le meilleur moment de sa vie. La personne que je regarde est tellement sereine, contrairement à celle que je connais en Mitzraël. J'imagine que ça doit lui faire changement de chez lui. C'est compréhensible. Je me rends compte que ça me fait vraiment plaisir de le voir comme ça. Soudainement, je me dis que je serais prêt à le ramener tous les jours chez moi, rien que pour qu'il soit aussi rayonnant qu'à cet instant.

Lorsque je prends place dans sa voiture il semble toujours heureux du moment qui vient de s'écouler. Il démarre puis nous roulons. Je le couve du regard. C'est de la sorte que l'épisode d'hier soir me revient en mémoire. Nos baisers, nos caresses et tout le reste. Je ne peux pas continuer ainsi sans savoir au minimum ce que ça signifie pour lui.

Indéchiffrable (En pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant