Chapitre 15 - Bien-être

160 10 36
                                    

Je m'éveille quand je sens naître une légère nausée. Le lendemain de brosse est toujours difficile pour moi. Quand ce n'est pas une nausée, c'est une migraine qui m'assaille. Je frotte mes yeux avec mes doigts et j'arrive face à l'heure de mon cadran. 8h42. La maison est plongée dans le silence, mon père dort encore et ma mère est partie faire ses courses. Je fronce les sourcils lorsque je sens quelqu'un bouger dans mon dos. Je pivote pour tomber nez à nez avec Mitzraël qui est endormi. Tous les événements d'hier me reviennent subitement en mémoire. La fête chez Shella, la discussion avec Abby, Mitzraël sur mon balcon, lui et moi qui s'embrassons. À moins que j'aie rêvé la dernière partie ?

J'observe le visage ankylosé, mais paisible du blond. La bouche légèrement ouverte et le respire léger, il est si beau comme ça. J'ai envie d'étirer ma main et de lui caresser son visage calme, mais j'évite de le faire. Comment en suis-je arrivé là ? D'avoir dormi avec celui qui était, il n'y a pas si longtemps, mon pire ennemi. D'avoir embrassé et toucher dans un consentement mutuel celui que je croyais homophobe. De savoir que je l'apprécie malgré tout ce qu'il m'a fait. Tout ce que je sais, c'est qu'au fond, Mitzraël ne montre que ce qu'il a envie de montrer, que ce soit sa personnalité authentique ou son baratin. Je crois avoir eu le droit à son authenticité récemment.

Comme s'il s'était senti dévisagé, ses yeux s'ouvrent doucement et captent les miens. Je lui souris, et il fronce les sourcils. Il bâille avant de parler.

– Tu sais que c'est flippant.

– De quoi ?

– Que tu me regardes dormir.

Je ris.

– T'es mignon quand tu dors.

Il lève un sourcil.

– Je croyais au moins qu'entre mecs on se soutenait et que l'on s'épargnait ce genre de nom, question de virilité.

– Tu sais que théoriquement parlant, aux yeux de la société, tu perds déjà de la virilité en embrassant un autre mec.

– Ouais, pas faux. Sauf que tu le sais, je l'emmerde la société.

Je souris, je reconnais bien Mitzraël dans ses paroles.

– Et le matin, t'es du style grincheux ; on me touche pas, ou happy morning ; on sourit ?

– Ça dépend avec qui je suis.

J'espère dans mon for intérieur que cela veut dire qu'il est le deuxième type de personne en ma compagnie. Enfoui en dessous des couvertures, je me rapproche de Mitzraël, redoutant quand même qu'il rejette mon affection, car je connais son habitude de changer d'attitude et d'idée en un claquement de doigts. Il me laisse toutefois l'approcher et glisser un bras entre le sien pour aller caresser son dos de mes doigts. J'avance mon visage du sien et nos fronts finissent par se toucher. Nous nous observons les yeux dans les yeux. Je sens son souffle chaud contre ma peau comme hier soir.

– Tu sens l'alcool.

Est-ce une façon de me dire qu'il trouve que je pue de la bouche à cause de ça ou pour me réprimander d'avoir consommé ?

– Ouais, j'ai bu hier.

– Je sais. Je dis ça, c'est une façon subtile de te proposer de te brosser les dents.

Ah okay, je pue de la bouche. Génial ! Il était loin de s'en plaindre la veille, pourtant.

– Ah ouais ? Sinon quoi ?

Ses sourcils se soulèvent d'étonnement et il me fait un rictus rieur.

– Sinon, je ne t'embrasserai pas.

Indéchiffrable (En pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant