"On échappe à rien, pas même à ses fuites." Jean-Jacques Goldman.
Le lendemain de l’acte charnel qui a lié Jade et Iris, un silence de plomb se fait entendre dans l’appartement.
Il est six heures du matin et les deux jeunes femmes dorment paisiblement. Iris a trouvé difficilement le sommeil, tant elle était choquée du comportement de Jade. En effet, son amie l’a laissé plantée là, sur la table de la cuisine, dénudée, après lui avoir fait l’amour. Cela a renforcé le sentiment d’inquiétude qui la submergeait jusqu’à présent. Après des heures de pensées plus confuses les unes que les autres, Iris a finalement plongé dans un sommeil profond. Jade, quand à elle, est rentrée quelques heures plus tard et ne s’est pas fait attendre pour aller se coucher.
Mais c’est à cette heure si matinale que Jade perçoit une mauvaise onde, un mauvais pressentiment. Elle ne sait pas pourquoi mais une boule au creux de son ventre est en train de se former. C’est alors qu’elle entend un véhicule se garer devant le vieil appartement. Sans réfléchir, la jeune femme enfile son pantalon de la veille, saute dans ses chaussures salies, elle se dirige ensuite vers son sac à dos et entasse le peu d’affaires qu’elle a en sa possession à l’intérieur enfilant un haut par la même occasion. Elle attrape sa veste quand elle entend des bruits de pas légers dans le couloir du hall de l’appartement. Iris se réveille finalement du canapé, alertée par le bruit provenant de la chambre se trouvant à l’étage. Elle gravit les marches deux à deux et retrouve Jade en train de grimper sur la fenêtre donnant de l’autre côté du bâtiment.
- Tu fais quoi là ?
Jade est interrompue dans sa course par la voix de son amie. C’est alors qu’elle entend la porte du bas s’ouvrir brutalement.
- Je ne peux pas t’expliquer, merci pour tout.
Sur ces dernières paroles Jade saute finalement par la fenêtre. La hauteur est conséquente mais elle sait très bien ce qu’il l’attend là haut, dans cet appartement. Elle atterrit non sans mal, heurtant sa cheville au passage, mais elle n’a pas de temps à perdre, elle doit vite partir d’ici. S’en suit alors une course effrénée contre elle-même, elle le sait personne ne l’a vu sortir, mais ils se rendront vite compte qu’elle n’est pas là et la rechercheront activement. Jade court, à bout de souffle, mais elle court aussi vite qu’elle peut.
Iris est restée figée à l’étage sans savoir quoi faire ni penser. Elle pense juste à refermer la fenêtre derrière Jade et attend que le beau monde monte la rejoindre dans la chambre. C’est sans surprise des policiers qui lui font face. Iris fait alors mine d’avoir été réveillée en sursaut. Les policiers fouillent les lieux, ignorant presque la présence de la jeune femme. Ils retournent presque l’appartement et ne trouve rien, c’est à ce moment qu’il porte de l’importance à Iris.
- Où est Jade ? Demande un des policiers, froidement et simplement.
Iris répond du tac au tac, sans réfléchir.
- Elle est partie depuis plusieurs jours déjà.
Les policiers expriment leur mécontentement en soupirant longuement. Ils restent plusieurs minutes à scruter les lieux, mais rien ici n’appartient à Jade. C’est au moment où ils s’apprêtent à partir qu’Iris ose enfin sortir de son silence.
- Qu’a-t-elle fait ?
La jeune femme pose enfin la question fatidique.
- Votre amie est liée à une affaire de meurtre, donc si jamais elle revient vers vous ayez l’obligeance de nous prévenir.
Les policiers sortent et referment la porte derrière eux sur ces paroles en laissant l'appartement sans dessus dessous et en laissant encore une fois la jeune femme dans son mutisme. Elle reste bloquée durant quelques minutes à fixer la porte de l’entrée de l’appartement. Un…Meurtre ? Cette pensée achève complètement la belle blonde qui se laisse tomber au sol, elle recroqueville ses jambes et les entoure de ses bras. Alors c’était ça… Jade me cachait un si lourd secret… Je comprends mieux maintenant… Et là, sans le savoir, je me suis rendue complice de sa connerie en mentant aux flics en disant qu’elle est partie depuis plusieurs jours… La jeune femme se met à pleurer, comment Jade a-t-elle pu se mettre dans situation pareille ? Que va-t-elle devenir ?
A maintenant une certaine distance de l’appartement, Jade marche dans les bois à une allure rapide. La capuche vissée sur la tête, la jeune femme est encore une fois livrée à elle-même, au milieu de nulle part. Elle ne sait pas où se rendre elle sait juste qu’elle doit partir loin de ce village. Si jamais les policiers la rattrapent cela sera la prison assurée pour elle. Elle a toujours su quoi faire dans n’importe quelle situation et c’est à ce moment précis qu’elle doit se le prouver à elle-même. Elle marchera encore plusieurs heures, passant de forêt en forêt. Quand la nuit finit par tomber, Jade se dit qu’il est temps qu’elle se repose un peu. Elle s’adosse à un arbre, les jambes lourdes, par chance il ne fait pas trop froid. La tête dirigée vers le ciel, tout ce qu’elle perçoit c’est la noirceur du ciel. Et tout ce qu’elle entend c’est le vent s’engouffrant dans les feuilles des arbres. Pour une fois Jade regrette sa solitude. Et si j’étais restée auprès de Lily, rien de cela ne serait arrivé… Elle se sent vulnérable et elle s’autorise enfin à pleurer. Si tu savais à quel point tu peux me manquer mon amour… Elle trouve difficilement le sommeil au bout de plus d’une heure de temps et c’est un rêve bien précis qui lui arrive en tête.
*Jade se trouve dans une grande maison, très luxueuse. Malgré la nuit qui submerge la grande pièce où elle se situe, la jeune femme remarque les tableaux d’artistes les plus en vogue, la décoration sur mesure, et les différentes photos de famille qui sont disposées un peu partout. Elle fouille les tiroirs, à la recherche de bijoux, d’argent, et de tout ce qu’il peut valoir cher. Ses complices, eux, sont montés à l’étage afin de vérifier que personne n’est susceptible de les surprendre.
Mais c’est alors que la jeune femme sent une pression sur son épaule, elle n’a pas le temps de se retourner qu’elle se fait emmener de force dans un coin de la pièce. C’est un homme d’une cinquantaine d’années qui la tient fermement contre le mur. Il est en pyjama, elle suppose donc que c’est le propriétaire de la demeure. L’homme lui donne plusieurs coups au niveau du ventre, cela rappelle de mauvais souvenirs à la jeune femme. Il la redresse ensuite. Jade a une cagoule sur le visage, l’homme le lui la retire violemment et regarde attentivement son visage.
- Sache une chose, j’ai une très bonne mémoire des visages.
Le sang de la jeune femme ne fait qu’un tour à cette réplique. Cet homme lui rappelle rapidement son père. C’est alors qu’elle a le cran de taper là où ça fait mal, l’homme s’écroule au sol, hurlant de douleurs. Sans plus attendre, elle sort une arme d’un étui accroché à sa ceinture. C’est un pistolet silencieux. Elle le tient à bout portant, visant l’homme au niveau de son front.
- Pitié non, je ne dirai rien je vous le promets. L’homme se met à pleurer et à protéger son visage de ses mains.
Il a vu mon visage…
Elle s’approche de lui, pose le canon sur le front du propriétaire, et sans attendre elle tire.
Ses complices, ayant entendu le bruit provenant du rée de chaussée, descendent en trombe les marches qui les séparent de celui-ci. Ils trouvent alors la jeune femme l’arme tendu vers un homme étendu au sol, le sang s’écoulant de son crâne.*