Chapitre I.2

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Mes examens n'avaient été qu'une suite de formalités remplies sans aucun souci

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Mes examens n'avaient été qu'une suite de formalités remplies sans aucun souci. Mon sérieux tout au long de mon cursus avait payé et ni les épreuves théoriques, ni les vols pratiques, n'avaient soulevé la moindre difficulté. Je n'avais pas terminé premier de ma promo, mais troisième, ce qui m'allait très bien. Après tout, le classement, je m'en fichais pas mal : ce qui m'importait, c'était toujours cette même envie curieuse de décoller du sol. Le 3 juillet 1995, on me remettait officiellement ma licence de pilote de ligne, et le lendemain, nous décidions avec Zoé de fêter cela en partant vadrouiller pendant un mois. Je lui avais promis de ne pas nous embarquer dans une de ces aventures louches dont j'avais le secret, mais je savais au fond de moi que je ne pourrais pas tenir bien longtemps cette promesse.

La première partie de notre périple fut pourtant exemplaire. Nous avions voyagé de Toulouse jusqu'à Vienne en train, nous arrêtant passer quelques nuits en Italie et en Autriche, où j'avais gardé deux ou trois contacts que j'estimais assez présentables pour elle. Je l'embarquai ensuite avec moi à bord d'un vieux tacot loué sur place jusqu'à Budapest, avec comme projet de suivre le Danube jusqu'à son delta roumain. C'est là que les choses commencèrent à se corser, car nous n'étions pas franchement d'accord sur la suite de notre itinéraire. J'avais jusque-là tout fait pour lui faire plaisir, et je l'avais emmenée visiter de nombreux musées et galeries, passionnée qu'elle était par les arts en tous genres. J'avais même accepté de l'emmener un soir à l'opéra de Vienne, soirée qui creusa nettement un trou – que dis-je, un fossé – dans mes maigres économies. Mais maintenant que nous étions tous deux installés dans une vieille Ford, je voulais lui faire découvrir ce qu'il y avait d'autre à faire lors d'un voyage : explorer les alentours, les coins où personne ne vous attendait, voir l'arrière-pays et ses trésors cachés. Aucun grain de folie là-dedans selon moi, pourtant l'idée lui paraissait absurde. Elle craignait que je ne nous propulse en plein dans une situation ubuesque, ayant sans doute entendu trop d'histoires à mon sujet. Ne parvenant pas à nous mettre d'accord, nous arrivâmes finalement au ridicule compromis suivant : nous continuerions jusqu'au delta, en longeant le Danube et en nous arrêtant dans un endroit de mon choix la journée pour s'y promener, et dans une ville de son choix le soir pour y passer la nuit. J'avais tout juste réussi à éviter que nous n'élaborions un itinéraire détaillé, étape par étape, mais l'idée était pourtant bien là.

Cela fonctionna jusqu'à Belgrade. Je choisissais de mon côté des endroits originaux, mais que j'estimais relativement neutres : une ballade dans une réserve animale, un pique-nique sur une colline surplombant les plaines croates, ou encore une baignade dans un affluent du fleuve qui semblait n'avoir jamais vu passer d'homme tant il était sauvage. Çà et là, je glanais quelques informations sur les bons plans locaux auprès des pompistes ou des commerçants. J'avais la chance de parler un anglais parfait, don de ma mère anglo-saxonne, ce qui me permettait de me faire plus ou moins comprendre partout où je mettais les pieds. Zoé, de son côté, choisissait de petits hôtels sympathiques dans les cités que nous traversions, et nous arrivions toujours à trouver un bar ou un restaurant fréquenté pour y passer la soirée.

Lengaï [Publié !]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant