Les funérailles de Timothée furent célébrées – si tant est que ce mot puisse s'appliquer à un événement si tragique – le mercredi suivant. Patrick avait pris en charge l'organisation, Maeva étant incapable de bouger, parler ou même manger depuis qu'elle avait appris la nouvelle. Il était venu un soir auprès d'elle dans le lit et lui avait dit :
« Tu penses que ce serait une bonne idée de demander aux personnes de porter quelque chose de rouge ? Timothée aimait le rouge, je trouve que ce serait un bel hommage. »
Maeva avait simplement hoché la tête laconiquement et avait pleuré de plus belle. Oui, Timothée aimait le rouge. En tout cas, aux dernières nouvelles.
Le jour des obsèques, Patrick porta son costume noir, celui dont seule la chemise changeait entre les mariages et les enterrements, qu'il avait agrémentait d'une cravate rayée rouge et noir. Son épouse, quant à elle, attacha sa chevelure brune d'un chignon élégant piqué d'une majestueuse rose écarlate.
Pendant la cérémonie, elle crut pouvoir compter sur son mari, mais ce dernier resta en retrait. Alors ce fut la main de Marianne qui vint serrer la sienne. Après tout, elle pleurait elle-même son filleul. Quelques membres de la famille étaient dispatchés sur les premiers rangs, et certains copains de Timothée rendirent leur propre hommage, déposant tour à tour une rose blanche dans le cercueil, mais aucun ne prononça de discours. Maeva reconnut Yann, le meilleur ami de son fils, qui passa en premier. Il portait une chemise rouge impeccablement repassée. Il passa devant Maeva sans oser la regarder dans les yeux. Aucun d'eux n'eut un geste vers l'autre, c'eut été trop étrange.
Patrick et Marianne lurent chacun leur tour un petit texte qu'ils avaient préparé. Le premier le récita avec un aplomb déconcertant, la seconde, en revanche, eut bien du mal à rester intelligible jusqu'à la fin. Elle songea à Timothée, s'il voyait ça, qui devait penser que c'était un bien piètre éloge funèbre.
Après la cérémonie, lorsqu'il fallut descendre le cercueil en terre, Maeva crut s'effondrer. Mais non. Elle tint bon, car elle savait que Timothée la regardait. Aujourd'hui, toute l'attention était portée sur lui, elle ne devait pas se faire remarquer. Alors elle prit sur elle, sanglota en silence et serra un peu plus fort la main de Marianne tandis que celle d'Harold était posée sur son épaule. Patrick aida à porter le cercueil.
Et puis ce fut tout. Tout le monde prit le chemin de la maison pour prendre un verre, manger un morceau et échanger trivialités en tout genre – notamment sur la cérémonie, qui était très belle, assura la sœur de Patrick.
Maeva monta directement à l'étage. Pas dans sa chambre, non. Dans celle de Timothée, qui n'avait pas bougé d'un pouce depuis quatre jours. Pourquoi aurait-elle changé ? Timothée n'était plus là pour la déranger au gré de ses déambulations adolescentes. Elle s'allongea sur le lit et huma l'odeur de son fils encore présente sur les oreillers. Combien de temps encore avant qu'elle ne se dissipe ?
Elle pleura longuement, et Marianne ne tarda pas à venir la consoler, Harold sur les talons. Ils s'allongèrent chacun d'un côté de la mère, l'entourant de leur présence réconfortante. C'était bien la seule chose qu'il pouvait faire pour elle. Lorsque les larmes de Maeva se furent taries, un seul mot franchit la barrière de ses lèvres qui avaient été scellées jusque-là.
« Pourquoi ? »
VOUS LISEZ
Pour un fils
Short StoryMaeva est désemparée. Son fils, âgé de seize ans, vient de mettre fin à ses jours. A la tristesse et la colère succède l'incompréhension. Pourquoi Timothée a-t-il commis un tel acte ? En désespoir de cause, et pour pouvoir faire son deuil, Maeva fai...