18.

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Une vague d'air frais me passe sur le corps tandis que j'inspire un grand coup. Je respire enfin. Je croyais avoir arrêté. Mes poumons semblaient vides, tout comme mon esprit. Je me sens vide. Complètement vide de tout. Comme si le monde tournait, et que j'étais là, sans trop l'être. C'est étrange comme sentiment. Vraiment étrange.

« Nous allons rentrer. Rose doit se reposer. » la voix enrouée et dure d'Harry me fait revenir à la réalité en moins de deux secondes.

Quand mes yeux se détachent de son visage extrêmement fermé mais incroyablement beau, je réalise assez vite que Will et James se tiennent devant nous. Leurs états semblent tout aussi pitoyables que les nôtres: des cernes à cause de la fatigue; les traits du visage vers le bas à force d'avoir pleuré, ou à force d'être tendu et en colère; et une incapacité à réfléchir correctement. Je sais que ça ne se voit pas, mais je sais aussi que c'est la vérité, et que j'ai raison.

« Prends-soin d'elle, Harry. Je te donne tout ma confiance, ne la brise pas. » Will tape gentiment sur l'épaule du concerné en lui souriant sincèrement.

Ne pensez pas qu'à moi, pensez à lui, aussi. Pensez à Harry. Pensez à ce qu'il vient de vivre; à ce qu'il vient de dire et entendre; à ce qu'il vient de détruire ou de construire. Pensez à tout ça. Ne le laissez pas de côté.

Mais Will n'est pas au courant.

« Aller, on y va Rose. » murmure Harry, son bras tatoué passant dans mon dos pour me rapprocher de lui, dans un geste doux. Mes pieds avancent tout seuls, je n'ai plus le contrôle de mon corps. Ni de mon esprit, d'ailleurs.

Je rencontre les yeux de Will et James pour la dernière fois avant de monter dans la voiture et, discrètement, je mime un téléphone avec mes doigts envers James, avant de refermer la porte derrière moi. Harry démarre rapidement. Le tableau de bord indique 01h34. J'ai l'impression que cette journée ne va jamais s'arrêter et pourtant, Dieu sait à quel point j'ai envie que tout se termine.

Je ne compte pas aller au café demain. Ni demain, ni cette semaine entière. J'ai besoin de passez chez Will pour, premièrement passer du temps avec lui après tout ceci, et deuxièmement, pour pouvoir l'aider à organiser l'enterrement de Judy qui sera sûrement en fin de semaine. Je n'en reviens toujours pas, c'est impossible à croire. Impossible.

Harry ne parle pas. Moi non plus, d'ailleurs. Je n'ose pas. Je sais qu'il est toujours énervé et je préfère attendre qu'il se calme. Mais le silence qui règne dans cette voiture me tord le ventre. Je déteste ça. C'est pourquoi je me tourne vers la fenêtre et je ferme les yeux.

****

« Rose, réveilles-toi. »

Le contact de sa chaude main avec ma joue me fait automatiquement ouvrir les yeux. J'ai dormi. Pendant de courtes minutes, certes, mais j'ai dormi. Et nous sommes arrivés chez nous.

Je descends de la voiture en resserrant ma veste dû au froid de cette nuit. Harry ouvre rapidement la porte, nous permettant d'entrer au chaud. Il part directement dans la cuisine, les poings serrés, sans m'adresser un mot.

Je ne sais pas quoi faire et j'ai horreur de ça. Je n'aime pas ne pas pouvoir contrôler ce qu'il se passe. Et surtout, je n'aime pas ne pas savoir comment agir quand une situation compliquée m'est imposée. Mais il va bien falloir que je fasse face à ceci, un jour ou l'autre. C'est pourquoi mes jambes bougent jusque dans la cuisine, me plantant dans l'encadrement de la porte.

Il est dos à moi. Ses deux bras sont tendus sur le côté de façon à ce que ses mains soient posées sur le bord de l'évier. Sa tête est penchée en avant et il semble respirer plus vite que d'habitude, dû au fait que son torse se lève de manière anormale.

thank you - hs. (II)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant