Un Aérovoiles et du sable.

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Nuits, Jours furent happés dans la course infernale et éternelle du Temps. Les jours devinrent mois puis années. La petite fille avait atteint l'âge de douze ans. Nous la retrouvons au cœur du centre marchand en effervescence de la cité. Au dessus de la foule grouillante, elle était assise sur le toit en tuiles bariolées d'une petite structure de pierre beige, un magasin de poteries. Il était tenu par petit homme enveloppé à la moustache brouissailleuse. Cela faisait des années qu'il avait renoncé à réprimander la gamine. Quoiqu'il fasse et dise elle revenait sur son toit de toute manière.

La chevelure cendrée d'Isis flottait telle un oriflamme au rythme des bourrasques de vent et ses yeux bruns suivaient le formidable engin à l'origine de ces dernières.
L'Aérovoiles... Il s'agissait à première vue d'un voilier disposant de deux mâts s'élevant sur une vingtaine de mètres. Sa coque était en bois de chêne renforcée à intervalles disparates par des plaques de cuivres. Dont la plupart étaient oxydés et défoncées.
Il était visible que cet Aérovoiles marchand n'en était pas à son premier voyage. Il avait même été l'un des premiers modèles construits lors de la Guerre des 7 qui ravagea le continent il y'a une cinquantaines d'années de cela. Guerre qui avait aboutie par la proclamation de l'Empire. L'engin était un vestige de ces événements.

Isis s'attarda durant un court instant sur la figure de proue dorée représentant un bouc bondissant à l'air farouche. Quand soudainement l'appareil s'ébranla. Puis, sous l'impulsion de deux grandes hélices placées de par et d'autres de la coque du navire, il s'éleva en produisant un craquement sonore qui résonna dans toute la place qu'il noya sous un épais nuage de poussière soulevé par ses puissantes hélices.
Le décollage. C'était le moment préféré de la jeune fille. Lorsque ce géant de bois et métal s'arrachait au sol et s'élevait dans un mouvement qui n'était pas dénué de grâce. Elle trouvait cette action véritablement splendide. Que ne donnerait-elle pas pour s'embarquer à bord de telle machine...

Elle fut extirpé de ses douces rêveries par une voix familière venant de son dos.

" 'Sis ! "

L'interpellée tourna doucement son visage et fit face à un garçon d'environ quatorze ans. Son visage bruni par le soleil était encadré de boucles noires et percé d'un regard émeraude brillant. Torse nu, il portait une cape blanche et arborait à sa ceinture un petit couteau courbé dont le manche en ivoire était finement ouvragé.

" Uriel..."

Se contenta t-elle de répondre en découvrant son ami dont le corps longiligne se hissait à ses côtés. Un claquement retenti; le navire volant venait de déployer ses voiles d'un azur doux. Ces dernières, autrefois d'un blanc immaculé étaient couvertes de crasse. Et rafistolées avec du tissu de couleur disparates à de nombreux endroits. Ce qui donnait à cet Aérovoiles une allure pour le moins surprenant, mais étonnamment pas désagréable. Il prenait de la hauteur tout en pivotant sur bâbord et survolait les toits arrondis d'un splendide palais de pierre clair. Le bâtiment était entouré de trois tours fines et prodigieusement hautes. Une multitude de drapeaux et de longs morceaux de tissus y flottaient doucement et, se détachant de cette masse de couleur étaient mis en valeurs des étendards gris clairs sur lesquels étaient représentés un cheval brun en plein galop. Il s'agissait là de l'emblème de la ville.

Bientôt l'engin volant l'aurait franchit ainsi que les murailles circulaires de la ville et ne sera plus qu'un imperceptible point dans le ciel. Le garçon quant à lui observait Isis qui finit par plonger dans le vert de ses yeux. Il toussait et agitait sa main en marmonnant.

- Comment tu fais pour supporter ce sable dans tes yeux ?

- Il y'a du sable partout.

- Ce n'est pas ma question, hein. Je le sais bien qu'il y'a du sable partout.

Isis esquissa un sourire malicieux et vint ébouriffer les cheveux bouclés de son ami couverts d'une fine pellicule de sable blanc pour toute réponse. Elle aimait beaucoup ce garçon, enfant cadet de la famille royale ils avaient grandit ensemble à parcourir les rues de la cité. Tant qu'ils connaissaient le moindre recoin de cette dernière.

Constatant que son amie ne répondait pas, le jeune prince décida d'enchaîner en posant à son tour ses yeux sur l'Aérovoiles qui disparaissait. Il avait l'habitude des silences d'Isis. La fille aux cheveux cendrés pouvait se montrer peu loquace. En particulier lorsqu'elle était en proie au stress.

"Ça va bien se passer."

Isis tourna son regard sombre vers Uriel qui perfora le garçon par son intensité. Cette Nuit la Lune d'Argent réapparaîtrait. Et c'est durant cette nuit là que le rituel de sélection des apprenties Mukhadaï avait lieu. Aussi loin qu'Uriel parvenait à se souvenir, Isis rêvait d'intégrer ce corps d'élite... Combien de fois lui en avait-elle parlé. Et combien d'heures avait-elle passé à observer l'entraînement des guerrières dans l'espoir de reproduire leurs mouvements et techniques...

- Comment tu peux le savoir ? Répliqua t-elle visiblement peu convaincue.
- Je le sais. Il croisa son regard en amande tandis que son amie renchérissait, non sans malice.
- Ce n'était pas ma question. Elle se leva sous le regard du jeune prince et vint se positionner debout sur les bords du toit multicolore en croisant ses bras. Ses cheveux cendrés se liaient à son foulard ocre, soulevés par une faible brise plus qu'appréciable dans ce climat si aride.

" Les autres filles sont issues de grandes familles... Moi je n'en ai même pas. Je m'occupe des chevaux, je n'ai aucun prestige pour devenir Mukhadaï.
- Mais toi tu ne vis que pour ça. Il se leva à son tour et vint se mettre aux côtés d'Isis. Tu t'exerce depuis que tu as assez de force pour tenir une lame... Tu t'es même introduit dans leur palais pour les imiter, tu...
- Je sais ce que j'ai fait. Le coupa sèchement Isis, visiblement tendue avant d'ajouter avec d'avantage de douceur. Je m'en sais capable... mais...

Uriel l'interrompit en saisissant le couteau qui pendait à sa ceinture. Il recula de quelques pas puis lança en fléchissant doucement ses jambes.

" Cesse de geindre un peu..."

Isis leva un sourcil avant de sourire en coin. Elle s'empara d'un morceau de bois qui servait de poteau pour un etendoire à linge qu'elle arracha d'entre deux tuiles et brandit à la manière d'une lame.

- Tu es bien imprudent, petit prince.
- Toujours.

A peine eut-il prononcé ces mots qu'il bondit sur son amie.

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Et paf ! Deuxième partie de la réécriture ! 😃
C'est trop long ou pas assez 1000 mots ? Ah je ne sais pas.

Chroniques Forestières - Le Sceptre De Moringa.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant