Chapitre IX - Rencontre

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Un cri avait retentit, puis plus rien. Le silence total, aussi sinistre et pesant que les ténèbres qui envahissaient la petite cellule à mesure que la lune disparaissait derrière les épais nuages de pluie. Nowi n'était pas dupe : elle se doutait qu'un affrontement avait eu lieu, là-haut. Impuissante, pourtant, elle ne pouvait que patienter et espérer. Espérer que l'autre gagne. Qui qu'il fut.

C'est alors que des bruits de pas résonnèrent dans la cage de l'escalier, accompagnés d'une respiration rauque et profonde. La jeune femme comprit aux sons qui lui parvenaient que l'intrus avait triomphé du mage : ce n'étaient pas des bottes mais des chaussures aux semelles plus fines et légères qui descendaient les marches rapidement.

Nowi fut prise d'effroi : que comptait lui faire l'assassin de Drinn ? Après tout, il avait commis un meurtre, alors pourquoi pas deux... ? Après quelques secondes qui lui parurent interminables, l'ombre d'une silhouette se dégagea du passage qui menait au rez-de-chaussée.

Une tête surgit, parsemée de mèches blondes colorées par le sang du mage, puis un buste et enfin des jambes. Le tout s'écroula finalement à terre en un long soupir, comme las de vivre. Pour l'instant, du moins.

Nowi était alors plus à même de l'observer, et ce qu'elle vit la réjouit grandement : l'individu qui se tenait là n'avait rien d'un assassin irréfléchi ou d'un simple brigand. Elle se trouvait face à un jeune homme aux traits délicats, au nez fin et au joues rougies par l'effort. Seuls ses yeux étaient ceux d'un assassin -elle l'avait vu il y avait un instant, mais ils étaient clos, désormais. Ils étaient d'un bleu glacé comme cette cave humide, d'un bleu à vous pétrifier sur place, d'un bleu envoûtant et terriblement irrésistible. Son visage avait toutefois un petit quelque chose d'enfantin, et ses lèvres, tirées en un léger sourire malgré sa grave blessure aux côtes -sa respiration parlait d'elle-même-, lui donnaient un air presque joyeux et innocent. Nowi ne se laissait néanmoins pas avoir : elle se trouvait devant un assassin talentueux -il avait tout de même vaincu le mage-, et rien, pas même ses beaux yeux, ne devait lui faire faire un pas de travers.

Ne sachant trop que faire, la jeune femme se résolut à attendre le réveil de son potentiel sauveur qui se trouvait toujours là, qui n'avait pas bougé, et qui prendrait sûrement un certain temps à le faire. Elle s'assit donc en tailleur, posa ses coudes sur les genoux et cala sa tête entre ses mains, histoire de se reposer un peu -c'est vrai, quoi, ce n'était pas parce qu'elle n'avait pas commis de meurtre qu'elle n'en avait pas le droit, elle aussi. Elle ferma donc les yeux un instant, bercée par le doux clapotis des gouttes qui s'écrasaient contre les dalles de Grimard. Le bruit se faisait de plus en plus fort à mesure que les minutes passaient, et le murmure d'un ruisseau qui s'écoulait s'amplifiait peu à peu.

Cela rappela à Nowi son village. Elle aimait la pluie ainsi que les jours d'orage, comme celui-ci. Loin de la déprimer, ils la poussaient au contraire à sortir dehors, à respirer l'air frais purifié par l'ondée. Le lien se forma alors dans sa tête comme s'assemblent les pièce d'un vieux puzzle poussiéreux, et une seule pensée suffit à modifier totalement son expression sereine.

En effet, Lundwal, son village, se situait entre deux collines et était de fait souvent sujet à des inondations, or la ville de Grimard contractait le même problème : les remparts qui l'encadraient retenaient l'eau, la forçant à s'agglutiner dans le centre-ville pourvut d'une cuve dans laquelle était évacuée l'eau. Seulement, Nowi le savait car elle s'était tout de même bien renseignée sur les lieux qu'elle s'apprêtait alors à « visiter », la cuve en question était rapidement pleine en cas de forte pluie, et celle-ci stagnait alors, envahissant les maisons en commençant par la cave...

Nowi ouvrit brusquement les yeux et constata avec horreur qu'un maigre ruisseau remplissait lentement mais surement le vieux sous-sol du défunt prêtre, malheureusement dépourvu d'ouvertures si ce n'était la -très- étroite fenêtre qui s'étendait simplement en largeur, et qui était à quelques centimètres à peine du plafond.

L'eau s'approchait craintivement du jeune homme qui était toujours évanoui, et celui-ci se réveilla en sursaut à son contact. Sa respiration s'était calmée, et sa blessure semblait avoir complètement disparu. (« déjà ?! »)

Il scruta Nowi de la tête aux pieds avant d'engager la conversation, quoiqu'assez maladroitement :

- Salut ! C'était simple, bref, même pas très efficace, mais il s'en contenterait pour le moment.
- Euh... ouais. Salut. Le son rauque qu'émit la jeune femme la surprit elle-même. Elle grimaça, puis lui sourit.
- Tu... tu veux peut-être que je te fasse sortir d'ici ?

Nowi réfléchit un instant. Il n'était pas question de paraître faible et empotée : elle tenait à sa fierté, même derrière des barreaux. Elle passa sa main dans ses cheveux et en sortit une mèche qu'elle commença à triturer. C'était un réflexe qu'elle avait prit, lorsqu'elle se concentrait. Elle arrêta finalement, et remarqua un brin de paille sur sa main. Les restes du combat contre le Gobelin, il semblerait.

Sentant toujours le regard interrogatif du jeune homme peser sur elle, Nowi se força à lui répondre, bien qu'elle n'avait aucune envie de s'entendre parler :

- Je vais me débrouiller, merci.

Ca sonnait sans doute un peu prétentieux, mais elle devait avoir l'air sûre d'elle. C'était important. Le jeune homme haussa un sourcil et, autant intrigué qu'amusé, la regarda faire. Faire quoi ? Eh bien, Nowi se débattait avec un morceau de foin qu'elle agitait dans la serrure, dans l'espoir vain de faire céder le mécanisme.

Après plusieurs ratés, elle remarqua au sol une tige métallique : elle appartenait sans doute au sceau qu'elle avait cassé quelques temps plus tôt. Elle l'introduisit alors au même endroit que le brin de paille, et la porte émit un grognement désapprobateur. Enfin...si Nowi commençait à écouter les portes, elle n'était pas sortie d'affaire !

- Je te conseille de t'écarter !

Elle voulait sa voix assurée, mais elle était tout de même angoissée. Elle était une nageuse hors paire, certes, mais une inondation ne laissait aucun répit, et se trouver dans un sous-sol qui se transformait en baignoire à vue d'oeil n'était pas pour la rassurer.

Kyle la dévisageait toujours, un sourire au coin des lèvres et l'air un tantinet moqueur. Il fit un pas en arrière, et Nowi fit de même. Elle se rua alors vers la porte de sa cellule et, d'un coup de pied énergique, l'étala sur le sol.

C'est alors qu'un autre grand bruit retentit, en haut des escaliers.

- La porte a cédé, s'inquiéta la jeune femme. Tu sais nager ?
- Je... non. Pas vraiment, répondit l'assassin sans se départir de son sourire malicieux.
- Merde, grogna-t-elle entre ses dents.

L'eau s'engouffra alors dans la cave, comme l'obscurité dans un pièce dont on souffle la bougie.

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- La rencontre tant attendue a finalement lieu, et dans un endroit des plus sordides...
- Quelles relations vont développer ces deux personnages l'un envers l'autre ?
- Le chapitre suivant vous en dira sûrement plus... en espérant que celui-ci vous ait plu également !

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