Les premières gouttes que Nowi reçut lui arrièrent sur la tête, aussi sursauta-t-elle brusquement. Elle leva les yeux et son regard s'arrêta sur la fenêtre qui se trouvait quelques centimètres au-dessus de sa tête. Le spectacle qui s'offrit à elle la fit frissonner : des vagues immenses noyaient les rues et le ciel crachait des éclairs blancs et pleurait une pluie drue et diluvienne.
La jeune femme recula, impressionnée et désespérée, et un désagréable floc accompagna son geste : l'eau atteignait déjà ses chevilles, et le ruisseau qui se déversait dans la cave s'était mué en torrent. Malgré le courant et l'eau montante, Nowi sortit de sa cellule et, rapidement, retira ses chaussures. (« tant pis pour elles »)
- Je te conseille d'en faire autant, et de retirer tout ce que tu peux aussi vite que tu le peux.
Son ton s'était affermi, elle était redevenue Nowi et elle comptait bien le rester. Elle rougit toutefois en réalisant qu'elle venait littéralement de lui demander de se dénuder devant elle.
- Enfin...tu m'as comprise. Retire ce que tu peux, pas tout ! L'eau ralentit les mouvements, et les habits mouillés encore plus.
Comme il la regardait toujours d'un air mi-étonné mi-intrigué, elle se lança à l'eau la première. Enfin, façon de parler : elle retira sa cape, qu'elle plia rapidement et cala dans sa sacoche. Celle-ci était petite et ne serait sans doute pas une protection idéale, mais c'était mieux que rien. La scène pouvait sans doute paraître cocasse, avec un peu de recul : une jeune femme dans une cave, se déshabillant à toute allure et trempée jusqu'aux hanches. En face d'elle : un jeune homme, parfaitement inconnu de cette première, l'eau jusqu'aux cuisses (il était plus grand qu'elle), qui retirait tant bien que mal son haut trempé par les gouttes qui giclaient en tous sens. On avait vu plus traditionnel, en termes de rencontre.
Nowi jeta vers lui un regard discret, et remarqua qu'il était aussi mince qu'elle était petite. Elle se détourna aussitôt, les joues aussi écarlates que les cheveux. Elle ne portait plus qu'un haut blanc (« génial... ») qui lui collait au corps à cause de la pluie et qui moulait ses formes quoique peu proéminentes. Elle avait un peu honte d'elle même, quand elle y pensait. Aussi n'y pensa-t-elle pas. Lui se tenait toujours en face d'elle, torse nu, les bras croisés se frottant mutuellement. Il grelottait.
La jeune femme ne l'avait pas remarqué, dans le feu de l'action, mais l'eau était glacée et, cela elle l'avait remarqué, en revanche, elle montait très rapidement. Pour sa part, elle lui arrivait à présent en bas du cou. Elle regarda son compagnon d'infortune, et remarqua qu'il s'en sortait mieux qu'elle : il n'en avait que jusqu'aux côtes. « Ne plus regarder », elle se répétait intérieurement.
- Bon, il va falloir s'organiser. Les escaliers sont remplis d'eau, donc le rez-de-chaussée l'est probablement aussi. Je vais aller jeter un coup d'oeil, bouge pas.
- Chef, oui chef ! Répondit-il, encore (et toujours) souriant. Pas comme si j'allais pouvoir aller où que ça soit, de toutes façons...Nowi hocha la tête et se rua rapidement vers les escaliers. Elle n'avait que peu de temps, et l'énigmatique jeune homme ne pourrai pas retenir son souffle indéfiniment. Elle ne pouvait toutefois pas prendre le risque de perdre du temps et de l'emmener avec elle, car elle ne savait pas ce qui l'attendait en haut. Elle inspira, et plongea. La nage à contre-courant n'est pas une tâche aisée, mais la nage à contre-torrent l'est encore moins.
Se débattre avec l'eau lui demande quantité d'énergie et donc de souffle, aussi en fut-elle très rapidement à court. Dans un dernier effort, elle se propulsa vers la porte -ou plutôt son emplacement précédent car elle avait, semblait-il, démissionné de ses fonctions. Elle se trouva alors dans le long couloir d'entrée de la demeure du prêtre, toujours aussi mal décoré, mais moins sale, en revanche, sans doute l'un des rares avantages de cette inondation. L'eau montait encore, mais Nowi émergea finalement, un mètre environ en dessous du plafond.
Elle se rendit alors compte qu'elle n'avait aucun moyen de prévenir le jeune homme qu'il pouvait la rejoindre, mais il ne l'aurait de toute façon pas pu, le courant étant bien trop puissant pour un débutant en natation. Elle hésita un long moment avant de retourner le chercher, après tout qu'avait-il fait pour elle si ce n'était lui sourire narquoisement ? Et quel sourire... Non, elle divaguait.
Le -et se- maudissant intérieurement, elle reprit son souffle un instant puis inspira un grand coup et plongea à nouveau. Si elle voulait y arriver, elle devait se concentrer au maximum et ne surtout pas se focaliser sur sa respiration, car elle risquait ainsi d'étouffer plus facilement. Elle ferma les yeux un instant et se laissa bercer par le courant qui la portait de lui-même vers la cave. Le retour serait plus ardu.
Là, elle arrêta un instant tout effort. Dans l'eau, tout n'était que calme, tout n'était que silence. Le seul bruit rémanent qui venait l'importuner était celui de ses mouvements, aussi préféra-t-elle cesser et apprécier l'absence total de désagrément quelconque. Elle avait toujours aimé l'eau et la natation, notamment grâce à la faculté incroyable que possède cet élément de faire taire tout bruit, tout son, toute perturbation auditive quelle qu'elle soit.
Le courant la propulsa dans le gouffre de la cave, et elle descendit les marches en flottant au dessus d'elles. Ca avait quelque chose d'assez magique, en soi. Elle se serait cru voler, et voler n'est-il pas le rêve de tout le monde ? Elle ne savait pas, mais elle aimait ça. Nowi aperçut alors la cave, ou plutôt ce qu'il en restait, et surtout le jeune homme qui l'attendait patiemment, les joues gonflées par une profonde inspiration, le sourire absent sur les lèvres mais visible dans le regard. J'ai failli attendre... C'était sûrement son imagination, mais la Traqueuse aurait juré l'entendre se moquer d'elle. (« j'aimerais bien le voir se débrouiller sans moi, tiens »)
Elle lui saisit le poignet et, brusquement, le tira vers elle. Il parut surprit -ou suffoquer, c'était selon-, mais ce n'était pas comme si la jeune femme pouvait lui expliquer quoi que ce fut. Nowi était à présent un tant fut peu rassurée : il était extrêmement léger et le tirer serait plus simple que prévu, simplement, elle n'avait pas reprit son souffle depuis le rez-de-chaussée, et l'air commençait à lui manquait crucialement. (« c'est bien le moment »).
Toujours plus fort, le courant les charriait en tous sens, et Nowi tint à grand peine la main de son « partenaire », mais elle finit par arriver au bout de l'escalier de la cave une bonne fois pour toutes. Elle remonta alors à toute allure dans le but de reprendre un grande bouffée d'air, mais elle se cogna au plafond sans avoir trouvé de quoi respirer un bon coup : la maison était entièrement inondée !
Nowi commençait à voir trouble, et elle traversa difficilement le -si- long corridor qui menait à la porte d'entrée. A l'extérieur ne l'attendait que désespoir et horreur : les rues étaient entièrement remplies d'eau, et celle-ci se hissait peu à peu jusqu'au somment des maisons les plus hautes de Grimard. Jamais la jeune femme n'avait assisté à tel cataclysme, et il lui semblait que même le lac dans lequel elle progressait bon an mal an ne suffisait plus à atténuer les bruit du dehors. En effet, l'orage grondait et elle en percevait les vibrations jusqu'aux plus profond de son âme.
Le déluge paraissait comme figé, de là où elle était : des meubles flottaient, lentement, bercés par le courant et le bruit des éclairs qui zébraient le ciel était lointain...si lointain... Nowi secoua la tête et se ressaisit : pas question d'y laisser la peau, d'autant plus qu'elle était en charge d'un parfait inconnu qui n'avait pour seul espoir de survie que cette main, à laquelle il s'accrochait tant bien que mal. Elle se tourna vers lui et constata que son regard se voilait : il manquait d'air, tout comme elle, et il ne tarderait pas à sombrer. Tout comme elle...
Dans un dernier effort -elle ne sut jamais où elle trouva la force de l'effectuer-, la jeune femme se projeta, alourdie par le corps qu'elle traînait autant que par le peu de souffle qui lui restait. Enfin, la surface de l'eau lui sembla se rapprocher, et c'est alors qu'elle se croyait tirée d'affaire que la main qu'elle tenait pourtant fermement serrée dans la sienne lui glissa entre les doigts...
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- Le cataclysme débute !! Qu'en pensez vous?
- La suite d'ici le 25/04 ;)
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Fils de l'Ombre
FantasyHistoire remise à neuf et actuellement en cours d'écriture sur le site Plume d'Argent